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À La Une - Catastrophe humanitaire

Réfugiés syriens : le Liban au bord de l'implosion

Plus de 900 000 ressortissants syriens au Liban, un chiffre en hausse constante.

 

Le PNUD lance conjointement avec le ministère des Affaires sociales un programme de soutien aux communautés accueillant des réfugiés syriens. Photo d’archives

Le Liban compte actuellement 907 000 ressortissants syriens ! C’est ce qu’ont annoncé hier les ministres Marwan Charbel et Waël Bou Faour lors d’une conférence au cours de laquelle un programme de soutien aux communautés accueillant les réfugiés syriens a été lancé. Ce programme conjoint du PNUD et du ministère des Affaires sociales est opérationnel depuis plusieurs mois mais c’est hier qu’il a été officiellement présenté aux donateurs et à la presse.

 

L’événement a rassemblé les ministres de l’Intérieur, des Affaires sociales et de l’Éducation, respectivement Marwan Charbel, Waël Bou Faour et Hassan Diab, le représentant permanant du PNUD au Liban, Robert Watkins, la représentante du l’UNHCR, Ninette Kelley, ainsi que des délégués d’autres organisations onusiennes présentes sur le terrain comme l’Unicef, des représentants de pays donateurs comme l’Italie et le Canada, et des délégués d’ONG qui tentent d’aider les réfugiés syriens tels que World Vision.


Plusieurs problèmes ont été exposés lors de la conférence : le nombre grossissant de réfugiés, l’inexistence de camps pris en charge par le gouvernement libanais et l’UNHCR, comme c’est le cas en Jordanie et en Turquie, la pauvreté des communautés qui accueillent les réfugiés dans la Békaa et le Akkar et une éventuelle détérioration de la situation en Syrie qui amènerait plus de réfugiés au Liban.

 

(Pour mémoire : Incapable de nourrir sa famille, un réfugié syrien se pend à Saïda)


Le ministre de l’Intérieur a souligné que, « selon les chiffres disponibles actuellement auprès de la Sûreté générale, le nombre de ressortissants syriens ayant traversé la frontière vers le Liban se chiffre aux alentours de 907 000. Ils sont divisés en trois catégories : les déplacés fortunés ayant les moyens de louer des appartements et pouvant vivre sans l’aide de la communauté internationale ou du gouvernement libanais, les journaliers qui travaillaient au Liban et qui y sont restés avec le conflit, et faisant appel à leurs familles pour les rejoindre, et les réfugiés pauvres – constituant la catégorie la plus importante – qui ont besoin urgemment de l’aide du Liban et de la communauté internationale ».
Selon les derniers chiffres de l’UNHCR, 317 000 réfugiés ont été enregistrés. Le nombre est en train de grossir de plus en plus rapidement.


Dans un article publié par le New York Times la semaine dernière, l’on mettait l’accent sur le fait que Damas est toute proche de Beyrouth et que la bataille de la capitale syrienne n’a pas encore commencé. Il faut donc imaginer la vague de réfugiés syriens qui déferlera à ce moment au Liban.
« Que ferons-nous si le nombre de réfugiés doublera ou triplera ou si encore dans l’avenir, avec la fin du conflit en Syrie, un certain nombre d’entre eux décidaient de rester au Liban », s’est demandé M. Charbel, notant dans ce cadre que « quel que soit le régime qui sera mis en place après celui du président Bachar el-Assad, il y aura inévitablement des opposants qui préféreront rester dans les pays voisins, dont certes le Liban ».

 

(Lire aussi : Les USA débloquent 60 millions de dollars d’aide à l’opposition syrienne)

 Comparaisons proportionnelles...
Le ministre des Affaires sociales a établi, quant à lui, des comparaisons pour mettre l’accent sur l’ampleur du poids que le Liban, pays fragile à la base, est en train d’assumer. « Si l’on compte actuellement 907 000 ressortissants syriens qui ont trouvé refuge sur tout le territoire libanais, cela est comparatif, toutes proportions gardées à 560 000 déplacés qui auraient pu arriver en Suisse, deux millions en Arabie saoudite, 4,4 millions au Royaume-Uni, 4,5 millions en France et 22 millions aux États-Unis », a-t-il estimé.


Pour sa part, la représentante de l’UNHCR à Beyrouth a souligné que « le Liban, qui est le plus petit voisin de la Syrie, accueille le plus grand nombre de réfugiés, en comparaison avec la Jordanie et la Turquie ».


De son côté, M. Watkins a indiqué qu’au « cours des derniers mois, le nombre de réfugiés a nettement augmenté. Ainsi une hausse de 400 % a été observée en comparaison avec les chiffres enregistrés il y a moins d’un an ».
Notant que « les réfugiés les plus pauvres se trouvent aussi dans les zones les plus démunies du Liban », il a affirmé que « le PNUD et le ministère des Affaires sociales ont lancé le programme de soutien aux communautés qui accueillent les réfugiés syriens il y a six mois. Le PNUD gérera les fonds versés par la communauté internationale et le programme sera chapeauté par un comité qui compte des représentants du bureau du Premier ministre, du PNUD, des donateurs ainsi que des ministères des Affaires sociales, de l’Intérieur, de la Santé et de l’Éducation ». « Jusqu’à présent, deux millions de dollars ont été reçus, la moitié a été dépensée. Il existe des promesses de fonds qui devraient parvenir à l’organisme onusien s’élevant à 9 millions de dollars », a-t-il poursuivi.


Mais le Liban a besoin de beaucoup plus pour pouvoir être à la hauteur de la crise et répondre aussi bien aux besoins des réfugiés syriens et des communautés hôtes et cela pour éviter une éventuelle implosion. Dans ce cadre, M. Bou Faour a affirmé que « lors du sommet des pays donateurs au Koweït, le Liban avait proposé la somme de 370 millions de dollars, alors que le nombre de refugiés enregistrés était de 200 000, aujourd’hui que nous sommes à 317 000 réfugiés enregistrés, il nous faudra 520 millions de dollars environ ».


De son côté, le ministre de l’Éducation a mis l’accent sur « les besoins qui grandissent avec le flux de réfugiés. Il faut constamment revoir les chiffres à la hausse avec l’arrivée, parfois très rapide, de nouveaux déplacés ».
Pour des raisons humanitaires, le Liban ne fermera jamais sa frontière. Seulement, jusqu’à présent, le gouvernement n’a pas donné aux ressortissants qui franchissent la frontière fuyant leur pays le statut de réfugiés. Il préfère les désigner comme déplacés. Cette appellation n’engage pas trop Beyrouth en matière de droit international.


MM. Charbel et Bou Faour ont estimé que dans un avenir proche, il sera impossible au Liban de garder cette attitude et qu’il faudra dans les prochains mois envisager l’ouverture de camps sécurisés où les aides seront centralisées et l’accès aux réfugiés plus facile, comme c’est le cas en Turquie et en Jordanie.

 

(Pour mémoire : Dans la Békaa, les camps de réfugiés poussent et grossissent comme des champignons)


Jusqu’à présent, le gouvernement libanais n’a pas fait officiellement le décompte des réfugiés syriens se trouvant sur son territoire. Les responsables reconnaissent qu’un retard a été enregistré dans ce cadre, mais annoncent également que dans les semaines à venir municipalités et moukhtars commenceront le recensement. Des équipes sont également en train d’être formées au ministère des Affaires sociales pour aller sur le terrain et mesurer les besoins des déplacés.
Mme Kelley souligne également que « les délais d’enregistrement des réfugiés auprès de l’UNHCR varient normalement entre quatre semaines et quatre mois. Pour plus d’efficacité en ce qui concerne la crise au Liban, des mesures ont été prises pour que cela se passe en un maximum de 28 jours ». De nouveaux bureaux seront ouverts très prochainement dans la Békaa, à Tyr et à Beyrouth. Elle a également indiqué que « l’UNHCR effectue constamment des pronostics et est préparé pour le meilleur et le pire scénarios ».


Avec la situation en Syrie et la gestion du gouvernement libanais de la question des réfugiés, qui avaient commencé à affluer au Liban il y a un tout petit peu moins de deux ans, il serait judicieux peut-être de penser à réfléchir au pire scénario.

 

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