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À La Une - Société

Women in Front, une ONG qui milite pour une forte présence des femmes au parlement libanais

« Femmes vers le Parlement » est le premier projet signé par l’ONG Women in Front. Son objectif est de soutenir la candidature de soixante-quatre femmes aux prochaines législatives. Tous les moyens sont mis à contribution pour faire réussir le projet, ou du moins initier un changement.

Photo de groupe au terme d’une rencontre de candidates potentielles aux prochaines législatives.

Changer l’image de la femme libanaise dans les médias en mettant en évidence les femmes expertes dans les différents domaines. Un défi qui n’est pas des moindres dans une société patriarcale, mais que l’ONG Women in Front (Femmes pionnières), fondée en 2012, est déterminée à relever.


À l’origine de cette ONG, Joëlle Abou Farhat Rizkallah, publicitaire, et Nada Saleh Anid, publicitaire et écrivaine, qui se sont rencontrées sur le mur du groupe «La troisième voix / The Third Voice» sur Facebook. «Nada avait posté un commentaire appelant à mettre en valeur les femmes actives au Liban, raconte Joëlle Abou Farhat Rizkallah. J’ai saisi l’occasion et lui ai demandé de nous rencontrer pour discuter plus longuement du projet.» La rencontre a eu le lendemain. Le projet est immédiatement mis sur les rails.


«L’image de la femme au Liban est celle d’une poupée siliconée ou d’une victime de la violence, déplore Nada Saleh Anid. Pourtant, entre ces deux extrêmes, il existe toute une catégorie de femmes qui travaillent et qui sont des leaders dans leur domaine. Ce sont ces femmes que nous voulons mettre en valeur, ainsi que leurs expertises. Nous voulons qu’elles soient plus présentes dans le paysage médiatique, notamment aux heures de grande écoute.»
Et Nada Saleh Anid de poursuivre: «Le problème relatif à l’image de la femme n’est pas spécifique au Liban. Il est toutefois exacerbé, à l’instar de tous les autres problèmes d’ailleurs. Culturellement, il y a ceux dont l’image de la femme dérange et d’autres qui ont une image déformée. L’image de la femme libanaise pose même un problème dans les pays arabes où on croit, à tort, que nous sommes très libérées. Nos lois ne le sont pas et puis le culte de l’apparence ne nous permet pas de l’être.»

Femmes vers le Parlement
Au départ, Joëlle Abou Farhat et Nada Saleh Anid avaient songé à deux initiatives. La première consiste à publier un annuaire des noms de quelque 150 femmes actives, et la seconde, baptisée «Accountability», vise à demander des comptes aux personnes actuellement au pouvoir. Les législatives constituant toutefois une échéance importante, les deux femmes ont décidé de canaliser leurs efforts dans ce sens. «Dix-huit ans après le sommet sur le droit des femmes, qui s’est tenu à Beijing, aucun progrès n’a encore été réalisé au niveau du quota féminin dans les élections législatives, sachant que le Liban a ratifié la déclaration de Beijing, explique Joëlle Abou Farhat Rizkallah. Plusieurs parties œuvrent pour faire bouger les choses dans ce cadre. Les obstacles sont si nombreux qu’il est difficile de les dépasser. À Women in Front, nous avons décidé de ne pas attendre que le système du quota soit appliqué. Nous avons plutôt décidé de nous imposer. Dans cet objectif, nous avons mis en place la stratégie “Women Towards Parliament” ou “Femmes vers le Parlement”.»


Réalisée avec MEPI et Smart Center, cette stratégie consiste à soutenir la candidature de soixante-quatre femmes aux prochaines législatives. Un manifeste exposant les principales revendications des femmes, leurs principes et leurs engagements sera également élaboré en collaboration avec les différentes ONG spécialisées dans les affaires de la femme. Il sera adopté par les candidates.

Campagne médiatique
Cette stratégie sera appuyée par une large campagne médiatique. Ainsi, un annuaire des biographies de quelque 150 candidates potentielles sera distribué aux médias pour «augmenter la visibilité de ces femmes». De plus, six spots publicitaires mettant l’accent sur le rôle de la femme dans la société, principalement dans la vie publique, passeront sur les différentes chaînes télévisées à partir de la fin du mois courant.
Par ailleurs, une formation sera organisée à l’intention des journalistes sur la manière d’approcher ces candidates. « Il ne s’agit pas de savoir si la femme va réussir à allier entre sa famille et ses nouvelles fonctions au cas où elle est élue, une question qu’on ne pose d’ailleurs jamais à un homme, mais de mettre l’accent sur sa vision des choses, son programme, etc., insiste Joëlle Abou Farhat Rizkallah. Nous sommes intelligentes pour pouvoir nous organiser. D’ailleurs, nous le faisons au quotidien. Nous travaillons et nous nous occupons bien de nos familles et de notre foyer. Si nous nous ne targuons pas de nos capacités, cela ne veut pas dire que nous n’en avons pas. La nature nous a donné cette aptitude à pouvoir gérer plusieurs choses à la fois. Maintenant, c’est à nous de nous faire accepter et de nous imposer. Nous faisons partie de ce pays. Nous formons la moitié de la population. On ne peut continuer à nous ignorer et à former des gouvernements et des Parlements sans les femmes.»


Et Nada Saleh Anid de renchérir: «Souvent, c’est par ignorance qu’on n’inclut pas les femmes. On ne réalise pas que cela constitue un problème majeur. On a toujours tendance à nous faire croire que nous sommes en état d’urgence et que ce n’est pas le moment de résoudre ce genre de problèmes. Or c’est justement parce que le pays se trouve dans cette situation que les femmes doivent jouer un rôle. C’est une porte ouverte sur le changement.»
Une formation sera aussi organisée à l’intention des candidates pour améliorer leurs performances à tous les niveaux.

Plateforme pour la prochaine échéance
Sur le terrain, Women in Front travaille avec les femmes affiliées à des partis ou avec des indépendantes. «Dans chaque circonscription, il y a des chances que les femmes percent les listes», assurent les cofondatrices de l’ONG qui confient avoir identifié les circonscriptions où «un lobbying peut être exercé». Il est à noter que toute la stratégie a été élaborée sur base de la loi électorale de 1960.


«Nous travaillons avec des candidates indépendantes, mais aussi avec des femmes affiliées aux différents partis politiques, ces dernières ayant plus de chances de percer, constate Joëlle Abou Farhat Rizkallah. Nous essayons de pousser les partis à avoir plus de femmes sur leurs listes. Nous ne sommes pas très optimistes à cet égard, mais l’idée derrière tout ce travail est de préparer une plateforme pour les prochaines élections municipales et parlementaires.»
«Pour une fois, nous avons réussi à aboutir à une sorte de coalition entre les candidates, relève Nada Saleh Anid. Toutes les femmes ont senti l’urgence de se fédérer pour une cause commune. Certaines le font pour la cause. Elles savent qu’elles n’ont aucune chance, mais elles se présentent quand même parce qu’elles sont convaincues qu’il faudrait changer les choses.»


Malgré leurs ambitions, les cofondatrices de Women in Front ont les pieds sur terre. Joëlle Abou Farhat Rizkallah souligne à ce sujet: «Étant donné la structure et la conjoncture actuelle du pays, nous n’espérons pas avoir beaucoup de femmes au Parlement. Nous formerons toutefois un gouvernement de l’ombre qui sera composé entièrement de femmes. Elles travailleront à exécuter le manifeste que nous allons lancer et qui contient un nombre de revendications et de réformes dans les différents domaines. Nous allons certainement réussir à opérer un changement. C’est la raison pour laquelle les femmes doivent être prêtes.»

 

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