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À La Une - Révolte

Geste sans précédent de Damas en faveur de Téhéran

Quarante-huit otages iraniens et plus de 2 000 prisonniers syriens ont été libérés mercredi.

Arrivés hier fatigués, en survêtement ou portant des pulls, dans un grand hôtel de Damas, les 48 otages iraniens, détenus depuis le mois d’août, ont reçu des fleurs de lys blanches. Certains pleuraient. Louaï Beshara/AFP

Le régime et les rebelles en Syrie ont procédé hier au plus important échange de détenus depuis le début du conflit il y a 21 mois, à l’issue de laborieuses négociations qui ont abouti à la libération de 48 Iraniens contre plus de 2 000 personnes détenues par le régime. Vers 15h30, à bord de minibus, les 48 otages, détenus depuis le mois d’août, sont arrivés dans un grand hôtel de Damas. Fatigués, en survêtement ou portant des pulls, ils ont reçu des fleurs de lys blanches et embrassé les diplomates iraniens, certains des otages pleurant. C’est la première fois qu’un tel échange est annoncé publiquement, un geste sans précédent de la part de Damas en faveur de son allié iranien, deux régimes isolés au plan international.


L’ambassadeur d’Iran Mohammad Reza Chibani a indiqué que ses concitoyens avaient été enlevés au sud-est de Damas, sur la route entre l’aéroport et Sayeda Zeinab, un lieu de pèlerinage chiite où est enterrée, selon la tradition, la petite-fille du Prophète Mohammad. Cette région bordant Damas au sud est le théâtre d’âpres combats entre l’armée et les rebelles. Selon M. Chibani, ses concitoyens vont rester deux jours à l’hôtel, où ils seront examinés par des médecins. « Nous n’avons pas encore discuté de la manière dont ils vont quitter le pays, mais cela semble difficile par la route. En tout cas, ils tiennent absolument à se rendre à Sayeda Zeinab », a-t-il précisé. « Les négociations ont été longues et ardues », a-t-il encore dit, remerciant les responsables syriens pour leur « coopération ». À Téhéran, le ministère iranien des Affaires étrangères a « salué les efforts déployés par la Syrie, sœur et amie, ainsi que l’aide du Qatar et de la Turquie pour la libération des pèlerins ». « Deux ingénieurs iraniens, travaillant dans le secteur électrique, sont toujours portés disparus en Syrie », a encore indiqué M. Chibani sans plus de précisions. Il pourrait s’agir de ceux enlevés en décembre 2011 dans la province de Homs.

 

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Également présent à l’hôtel, Ezzat Chahine, vice-président de l’organisation humanitaire islamiste turque IHH qui a joué les médiateurs dans cet échange, a indiqué que la libération des otages iraniens avait été périlleuse. « Ils ont été amenés aujourd’hui depuis la Ghouta orientale. Nous étions en grand danger, car il y avait des combats et des bombardements », a-t-il dit. L’armée syrienne mène dans cette région de vergers à l’est de Damas une opération d’envergure pour tenter d’en déloger les rebelles qui y ont établi leurs bases arrière. À deux reprises au moins, les insurgés avaient menacé de tuer leurs otages si l’armée ne se retirait pas de la Ghouta. « Les négociations ont impliqué nous, l’Iran, l’État syrien et l’opposition armée. L’État turc a été aussi partie prenante et nous le remercions pour son rôle. Ceci a abouti à la libération de 2 139 prisonniers », a-t-il ajouté. Serkan Nergis, porte-parole de l’ONG turque, a précisé que quatre Turcs figuraient parmi ces détenus.


Aucune précision n’a été obtenue en revanche sur la manière dont les détenus dans les geôles syriennes ont retrouvé la liberté ni sur le lieu où ils se trouvent. Auparavant, Ahmad al-Khatib, porte-parole du Conseil révolutionnaire de l’Armée syrienne libre (ASL, rebelles) dans la région de Damas, avait confirmé que des négociations sous l’égide de la Turquie et du Qatar avaient abouti « à la libération de 2 135 détenus par le régime, dont certaines figures importantes, en échange des Iraniens ». L’Iran est également intervenu auprès de Damas, selon lui.

 

(Eclairage : Syrie : vers une solution américano-iranienne ?)


Sur le front des violences, des jihadistes se sont emparés d’une partie de l’aéroport militaire de Taftanaz, qu’ils assiégeaient depuis des semaines, a rapporté l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). De violents affrontements avaient lieu également près des aéroports militaires de Menagh, Kouiress et Nireb dans la province d’Alep. L’armée a en outre poursuivi ses raids aériens, dont l’un a tué quatre enfants d’une même famille près de Homs. L’artillerie du régime a également pilonné des localités proches de Damas et les rebelles tentaient de prendre des positions de l’armée dans le nord-ouest du pays. Un bilan provisoire des victimes fait état de 62 morts hier.

Sectaire et partial
Enfin, sur le plan diplomatique, l’émissaire international Lakhdar Brahimi a qualifié de « sectaire » et « partial » le discours du président Bachar el-Assad, dans un entretien accordé hier à la chaîne britannique BBC. Ce discours « est la répétition d’initiatives anciennes qui n’ont clairement pas marché (...) Ce qui a été dit cette fois-ci n’est vraiment pas différent », a-t-il notamment déclaré. « Ce qu’il faut, c’est reconnaître qu’il y a un problème, un très très grave problème entre les Syriens, et que les Syriens doivent se parler pour le résoudre », a-t-il poursuivi. « En Syrie, comme ailleurs, nos peuples dans la région réclament un véritable changement, pas un changement cosmétique. Le temps des réformes généreusement accordées (par le pouvoir) est révolu », a-t-il dit avec ironie. « Le peuple veut avoir son mot à dire sur la façon dont il est gouverné. En Syrie en particulier, ce que les gens disent c’est qu’une famille qui règne pendant 40 ans, c’est un peu trop long. Je pense que le président Assad pourrait prendre l’initiative de répondre aux aspirations de son peuple, plutôt que d’y résister », a-t-il conclu.

 

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