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À La Une - Éclairage

La crise syrienne et le prochain sommet de Bagdad


Le début de solution politique que certains croient voir dans la mission de l’émissaire de l’ONU en Syrie, Kofi Annan, et dans la réunion des ministres arabes des Affaires étrangères avec leur homologue russe au Caire ne convainc pas vraiment les connaisseurs du dossier. Il ne faudrait donc pas croire au miracle et au fait qu’en deux entretiens, le président syrien Bachar el-Assad aurait réussi à convaincre M. Annan de sa vision de la situation, tout comme le ministre Sergueï Lavrov serait parvenu après la réunion à huis clos avec les ministres arabes à imposer une solution en 5 points qui prévoit, entre autres, l’arrêt des violences de la part des deux camps et le début du dialogue entre l’opposition et le régime. Les experts pensent au contraire que ces deux missions ont surtout abouti à une sorte de trêve, que les deux camps vont mettre à profit pour renforcer leurs positions, un peu comme cela se passait au Liban : entre deux rounds sanglants, l’accord sur une pause, un cessez-le feu avec document politique à l’appui, permettait aux protagonistes de reprendre leur souffle pour mieux s’emballer...
En réalité, la crise syrienne devient chaque jour un peu plus compliquée et chaque camp a besoin d’un répit pour y voir un peu plus clair. De prime abord, le régime semble avoir marqué des points avec l’opération militaire effectuée à Baba Amr. Désormais, les appels ne portent plus sur son départ, mais sur l’instauration de passages sécurisés pour faire parvenir l’aide humanitaire à la population éprouvée. Selon les déclarations officielles, la mission de Kofi Annan à Damas aurait été ainsi axée sur l’aspect humanitaire et sur l’élaboration d’une solution politique. M. Annan a même rencontré au cours de sa mission en Syrie des représentants de l’opposition de l’intérieur, qui, à la différence des opposants de l’extérieur, pourraient accepter un dialogue avec le régime, tels Hassan Abdel Azim, Louay Hussein, Ali Haïdar et Kadri Jamil, tout comme il a rencontré des représentants des différentes communautés, notamment le mufti et les dignitaires religieux chrétiens. De même, les appels répétés à l’armement de l’opposition n’ont pas eu l’effet escompté. Au contraire, ils ont montré que cette idée ne fait pas l’unanimité au sein de ce qu’on appelle communément la communauté internationale et ses alliés arabes et régionaux. En plus des États-Unis qui y ont émis des réserves par la voix de la secrétaire d’État Hillary Clinton, les Émirats arabes unis ainsi que le sultanat d’Oman y sont clairement hostiles, alors que le ministre égyptien des AE et le représentant de l’Égypte à l’ONU ont adopté une position plus nuancée, appelant à une solution de compromis. L’Égypte a ainsi entraîné dans son sillage l’Algérie, le Soudan et le Yémen. C’est dire qu’une certaine confusion règne sur ce plan, en dépit des déclarations claires sur la nécessité d’armer l’opposition syrienne faite par les ministres saoudien et qatari des AE. De son côté, l’Irak, qui s’apprête à accueillir le prochain sommet arabe le 29 mars, souhaite faire un come-back spectaculaire sur la scène politique en présentant aux autres pays un projet de solution sur la Syrie, qui se résumerait à de grandes lignes destinées à empêcher l’éclatement de ce pays, à arrêter les violences et à entamer un dialogue constructif entre le régime et l’opposition. Ce projet est très important pour l’Irak, d’abord parce que la Syrie est à ses frontières et que l’éclatement confessionnel de la Syrie entraînerait des troubles graves en Irak où le spectre de la guerre confessionnelle n’est pas totalement écarté, ensuite parce que le dossier syrien est aujourd’hui le plus important pour les Arabes et qu’il est nécessaire pour l’Irak de présenter une initiative pour le régler au cours du sommet qui se tiendra sur son sol. D’ailleurs, pour réussir ce sommet, l’Irak a dû faire de grandes concessions aux autres pays arabes, dont l’Arabie saoudite, en relâchant notamment des prisonniers saoudiens détenus en Irak pour avoir été impliqués dans des explosions confessionnelles.
Pour l’Irak, la tenue de ce sommet est vitale après le retrait des troupes américaines et pour bien marquer qu’il a tourné une page de son histoire, et le dossier syrien arrive à point nommé pour lui permettre d’enregistrer une victoire diplomatique en tenant compte de ses propres intérêts qui passent par la stabilisation de la situation en Syrie et le refus de l’arrivée au pouvoir des islamistes sunnites car elle pourrait menacer le fragile équilibre politique irakien. Si le Premier ministre irakien a dû céder sur le point d’inviter le régime syrien à participer au sommet, face à la franche opposition de l’Arabie saoudite et du Qatar, il compte quand même proposer une solution suffisamment floue pour ne pas créer de vagues, tout en préservant les intérêts irakiens. En même temps, ce sommet intervient à un moment particulier où l’administration américaine est plongée dans la campagne présidentielle et elle a fait savoir à ses interlocuteurs dans la région, y compris à Israël, qu’elle ne souhaiterait pas pour l’instant avoir de nouveaux problèmes à régler.
Face à ce tableau complexe, on comprend un peu mieux pourquoi la tendance actuelle pour toutes les parties impliquées dans le dossier syrien est de souffler un peu, histoire de voir comment réorganiser l’opposition et la rendre plus efficace, tout en cherchant les failles dans le système Assad qui, pour l’instant, selon les rapports américains, tient encore les rouages du pouvoir et ne semble pas vraiment affaibli ni par les sanctions économiques ni par les pressions répétées sur son appareil administratif et militaire. D’autant que le Conseil de sécurité reste bloqué par les positions russe et chinoise. La communauté internationale concentre donc actuellement ses efforts sur l’envoi d’aides humanitaires dans l’espoir que par ce biais, elle puisse avoir un accès sécurisé à l’intérieur syrien qui pourrait, aux yeux de certains analystes, changer la donne.
Le début de solution politique que certains croient voir dans la mission de l’émissaire de l’ONU en Syrie, Kofi Annan, et dans la réunion des ministres arabes des Affaires étrangères avec leur homologue russe au Caire ne convainc pas vraiment les connaisseurs du dossier. Il ne faudrait donc pas croire au miracle et au fait qu’en deux entretiens, le président syrien Bachar el-Assad...

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