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À La Une - Éclairage

La situation en Syrie, une pièce maîtresse dans une confrontation stratégique


C’est actuellement la course entre le projet de solution russe et les pressions de la Ligue arabe et de la communauté internationale pour faire chuter le régime syrien. D’un côté, le régime de Bachar el-Assad cherche à gagner du temps, en tentant de mater ceux qu’il considère comme étant des terroristes, notamment dans leurs bastions à Homs et à Edleb, et de l’autre, les adversaires du régime cherchent à augmenter les pressions en l’encerclant diplomatiquement et en poussant l’opposition à s’unifier et à se renforcer militairement.
Des milieux diplomatiques proches des pays du Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) révèlent que les Russes – qui appuient totalement le régime pour des raisons stratégiques – ont un projet de solution qui consiste à pousser certains opposants à nouer un dialogue avec le régime pour aboutir à des réformes structurelles et pour former un nouveau gouvernement qui regrouperait des membres du parti Baas, des indépendants et des opposants, avec une part importante accordée aux Kurdes. Les mêmes sources affirment que le régime syrien aurait promis d’accélérer le processus de réformes et la tenue d’un dialogue national ; mais le problème est que les opposants, même ceux de l’intérieur, seraient soumis à des pressions de la part de l’opposition radicale qui rejette toute forme de dialogue avec le régime. C’est pourquoi il faut d’abord affaiblir « les foyers de rébellion » à Homs et Edleb pour ouvrir la voie à un tel dialogue. La dernière visite du ministre russe des AE en Syrie aurait donc été particulièrement importante à ce sujet. Ce dernier se serait assuré des intentions du régime et de sa détermination à faire avancer les réformes, tout en s’enquérant des développements sur le terrain. Avec ses alliés chinois, il aurait promis de faire de son mieux pour amener certains opposants à accepter de dialoguer avec le régime. Mais ce projet se heurte à la fois à la poursuite des opérations militaires, à Homs et à Edleb en particulier, et à une recrudescence de la violence dans l’ensemble du pays, notamment à Alep, via les voitures piégées et les attentats-suicide.
Pour le régime syrien et ses alliés, il s’agit d’une tentative claire de la part de l’opposition armée d’empêcher toute percée vers un dialogue national. Pour les détracteurs du régime, il est clair que chaque fois que ce dernier reprend du terrain à l’opposition armée, une nouvelle flambée de violence embrase le pays pour redistribuer les cartes et provoquer un tollé diplomatique international empêchant toute possibilité de contacts avec les opposants modérés. De plus, le régime et ses alliés font le lien entre le regain de violence et les réunions diplomatiques au Conseil de sécurité et au Caire, pour que les images des victimes marquent l’opinion publique et influent sur les décisions.
Les sources diplomatiques proches du Brics ajoutent que le régime possède encore de nombreux éléments de force, notamment l’incroyable cohésion de l’armée syrienne qui a surpris de nombreux analystes occidentaux. Cette armée qui compte près de 400 000 éléments, dont des milliers d’officiers, n’a vu jusqu’à présent que la défection d’un colonel, Riad el-Assaad, fondateur de l’Armée libre de Syrie, et d’un général, Moustafa Cheikh, qui a lancé l’offensive de Zabadani seul sans coordonner son action avec el-Assaad. D’ailleurs toutes les tentatives pour pousser les deux hommes à intégrer une même formation militaire ont échoué jusqu’à présent, el-Assaad refusant d’être sous les ordres de Cheikh, même si celui-ci a le grade de général.
Le régime mise en tout cas sur ce genre de conflits entre les déserteurs et les opposants en général, alors qu’il juge tout à fait satisfaisante la cohésion de son armée. Assad continue aussi de bénéficier de l’appui des minorités, même si de nombreux efforts sont actuellement déployés pour pousser les chrétiens et les druzes à prendre leurs distances avec lui, et enfin, il est encore soutenu par la bourgeoisie commerçante, la situation économique du pays étant jugée plutôt acceptable. Les usines d’Alep fonctionnent à pleines turbines pour satisfaire le marché irakien qui a leur a ouvert ses portes, alors que le surplus des récoltes est acheté par l’Iran. Pour l’instant donc, les sanctions économiques n’ont pas eu un impact décisif sur le régime, et comme le fait remarquer un diplomate, ces sanctions n’ont jamais fait chuter un régime. Il n’y a qu’à se rappeler le cas de l’Irak de Saddam Hussein soumis pendant plus de dix ans à un sévère embargo.
Pour toutes ces raisons, les sources proches du Brics estiment que le régime d’Assad est encore solide et peut tenir longtemps, sauf imprévu. D’autant qu’il a le soutien stratégique de la Russie qui considère la Syrie comme sa tête de pont dans une région particulièrement riche en ressources énergétiques, et de l’Iran qui considère la chute du régime syrien comme une tentative de l’affaiblir. Mais il doit en même temps accélérer le processus de réformes, ce à quoi le président syrien s’est engagé auprès des autorités russes.
En même temps, le camp occidental cherche à contourner le Conseil de sécurité bloqué par le double veto russe et chinois, en augmentant la pression de la Ligue arabe et en poussant vers la reconnaissance internationale du Conseil national syrien, tout en donnant tacitement un feu vert à l’armement de l’opposition. Ce qui annonce de nouvelles vagues de violence en Syrie.
La situation reste donc confuse et la Syrie est devenue une pièce maîtresse dans le bras de fer qui oppose les États-Unis et leurs alliés européens et arabes à l’Iran et ses alliés objectifs russe et chinois. La situation en Syrie cristallise désormais la nouvelle division du monde et elle ne laisse plus personne indifférent. Surtout pas le Liban où la politique de rester à l’écart prônée par le Premier ministre est chaque jour un peu plus en butte aux développements sur le terrain et aux critiques des deux camps. Une position de plus en plus inconfortable sur fond de tensions politiques et confessionnelles...
C’est actuellement la course entre le projet de solution russe et les pressions de la Ligue arabe et de la communauté internationale pour faire chuter le régime syrien. D’un côté, le régime de Bachar el-Assad cherche à gagner du temps, en tentant de mater ceux qu’il considère comme étant des terroristes, notamment dans leurs bastions à Homs et à Edleb, et de l’autre, les...

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