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À La Une - Interview

Samar Yazbek, une intellectuelle syrienne engagée contre la dictature

Samar Yazbek veut exprimer « l’anxiété des femmes de Syrie qui sont désormais engagées dans la lutte politique » contre Bachar el-Assad.

PARIS – propos recueillis par Élie MASBOUNGI

Forcée de voir les horreurs et tortures dans les geôles syriennes, l’écrivaine et militante Samar Yazbek affirme dans une entrevue accordée à L’Orient-Le Jour que son engagement dans les rangs de l’opposition est fondé sur ses propres convictions, refusant de devenir un « faux témoin » face à la répression du mouvement de révolte en Syrie. Mais si Mme Yazbek, réfugiée depuis mi-juillet en France, accepte de parler à la presse, ce n’est pas uniquement pour relater ce qu’elle a enduré dans son pays – intimidations, menaces, visites forcées de cellules où se trouvaient de jeunes manifestants battus et mutilés. La jeune intellectuelle veut s’exprimer en tant que simple citoyenne qui veut dénoncer la dictature dans son pays.
« En tant que journaliste et écrivaine, explique Mme Yazbek, j’ai une vision de l’avenir de la Syrie et, après une période de simple observation du mouvement de contestation dans ses deux premiers mois, j’ai décidé de parler, d’écrire et de soutenir les manifestants pour la liberté qui subissent cette horrible répression. » « Je veux dénoncer toutes les violations des droits de l’homme qui sont commises en Syrie, a-t-elle poursuivi. C’est ce qui m’a d’ailleurs poussée à rejoindre les “organismes de coordination” des manifestations, ces organismes qui font un travail admirable et qui sont devenus le véritable moteur du mouvement de contestation. »

« Le peuple a toujours raison »
Et Mme Yazbek d’ajouter : « Je suis une militante qui exprime l’anxiété et les soucis des femmes de mon pays qui sont désormais engagées dans la lutte politique (contre le régime de Bachar el-Assad). Je voulais jusqu’ici rester loin de la politique, mais je n’ai pu supporter les horreurs commises autour de moi, en me basant sur le principe que le peuple a toujours raison. »
« On a voulu me terroriser en me forçant à visiter les geôles pour y voir les horreurs, les conséquences de la torture sur les manifestants arrêtés », a-t-elle dit, expliquant par ailleurs qu’elle a pu quitter le pays « parce qu’ils avaient autre chose à faire »...
Pour Samar Yazbek, son rôle dans la Syrie post-Assad ne changera pas. Elle veut continuer à exercer son métier de journaliste, tout en se consacrant à l’écriture d’ouvrages. La militante rescapée a annoncé que ses prochains écrits seront inspirés de la « descente aux enfers » qui lui a été imposée, démentant, en réponse à une de nos questions, que la femme syrienne a été moins présente que les hommes dans les mouvements de masse. « Les femmes, a-t-elle expliqué, ont été et demeurent plus efficaces que les hommes, notamment dans les domaines de la logistique, de la communication et du renseignement. Elles ne peuvent descendre en masse dans les rues des grandes villes où seuls les hommes se trouvent en première ligne. »

Une opposition multiconfessionnelle
Sur les divergences et le manque de cohésion dans les rangs de l’opposition syrienne, Samar Yazbek a reconnu ces faits, estimant que cela pourrait effectivement mener à l’anarchie, comme cela arrive après l’effondrement des dictatures. « Mais, a-t-elle affirmé, après ces tragiques développements, le peuple syrien est parfaitement apte à éviter le chaos et surtout la guerre interconfessionnelle qu’on nous annonce. Toutes les communautés sont engagées dans cette lutte pour la libération de la Syrie, et une guerre civile confessionnelle est chose impossible chez nous », a-t-elle affirmé, tout en assurant que le mouvement de révolte auquel on assiste aujourd’hui est essentiellement laïc et que les chrétiens de Syrie participent au mouvement, contrairement à ce que laissent entendre les autorités du pays. « Les chrétiens sont particulièrement actifs dans les “coordinations” implantées dans les grandes villes et en province, indique Mme Yazbek. En nommant un nouveau ministre de la Défense de confession chrétienne – le général Daoud Rajha –, le régime veut impliquer les chrétiens dans le combat pour faire assumer au commandement militaire la responsabilité de ce qu’il qualifiera plus tard de massacre des sunnites... », précise la journaliste qui ne cesse d’insister sur le caractère multiconfessionnel des « organismes de coordination ». « Ces organismes, dit-elle, symbolisent le partage équitable des responsabilités dans un mouvement à caractères populaire et national qui a besoin de la participation du peuple syrien tout entier. »
En conclusion, Samar Yazbek lance en guise de message à ses compatriotes : « N’ayez pas peur car vous affrontez la mort avec courage, et c’est ainsi que notre peuple vaincra. »
PARIS – propos recueillis par Élie MASBOUNGIForcée de voir les horreurs et tortures dans les geôles syriennes, l’écrivaine et militante Samar Yazbek affirme dans une entrevue accordée à L’Orient-Le Jour que son engagement dans les rangs de l’opposition est fondé sur ses propres convictions, refusant de devenir un « faux témoin » face à la répression du mouvement de révolte...

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