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Un projet empêchant de faire des courses toute la nuit met l'Egypte en émoi

Le gouvernement veut obliger les magasins à fermer à 22h00 et les restaurants à minuit.

Le Caire, avec ses embouteillages à n'importe quelle heure et sa vie nocturne trépidante, a été classée en 2011 ville du monde "la plus animée 24 heures sur 24". Khaled Desouki/AFP

Acheter un pantalon à une heure du matin n'a jamais été un problème au Caire, mais un projet limitant l'ouverture des commerces le soir pourrait porter un coup au mode de vie très noctambule de la mégalopole égyptienne, une "ville qui ne dort jamais".

 

Le ministre du Développement local, Ahmed Zaki, vient d'annoncer que le gouvernement envisageait d'obliger les magasins à fermer à 22h00 et les restaurants à minuit. Seuls seraient épargnés les "établissements touristiques" - hôtels et bars - munis d'une licence spéciale.

 

Le projet, qui vise en premier lieu à économiser l'électricité, est rapidement devenu source de controverses et de moqueries.

 

"Cela ne marchera jamais. Nous sommes en Egypte, et tout le monde reste debout tard la nuit", assure Mohamed Mohsen, gardien de parking dans une rue commerçante de la capitale.

 

Le Caire, avec ses embouteillages à n'importe quelle heure et sa vie nocturne trépidante, a été classée en 2011 ville du monde "la plus animée 24 heures sur 24" dans une étude du réseau social Badoo, surclassant même New York.

 

La mesure, selon le ministre, "va permettre d'économiser de l'électricité, amener le calme dans les rues, inciter les gens à se reposer et permettre aux balayeurs municipaux de travailler".

 

"Nous ne poussons pas les gens à se coucher avec le soleil, mais il faut qu'ils dorment pour pouvoir travailler le lendemain. Y a-t-il un autre pays au monde où l'on reste éveillé toute la nuit?", a-t-il ajouté, visiblement irrité par les critiques, sur la chaîne privée ONTV.

 

Mais pour Ahmad Farag, un serveur de café, l'idée de fermer plus tôt est "stupide".

 

"Les gens arrivent au café vers 9 heures du soir. Que faudra-t-il faire? les mettre à la porte un peu plus tard?" s'interroge-t-il en soulignant que plus les clients restent, plus ses pourboires s'alourdissent.

 

Autour de lui, les idées fusent parmi les consommateurs pour économiser l'énergie sans avoir à fermer boutiques et cafés. "Il n'y a qu'à éteindre la moitié des feux de signalisation aux carrefours" dit l'un. "Il faudrait couper le courant entre deux et six heures du matin", assure un autre.

 

"On voudrait que l’Égypte devienne comme la Suisse du jour au lendemain", ironise le client d'un magasin de chaussures, Ahmed Mahmoud, 63 ans.

 

D'autres y voient l'influence grandissante des islamistes, dont est issu le président Mohamed Morsi, élu en juin.

 

"Ils ne veulent pas que les gens restent dehors tard. Ils souhaitent voir les femmes rester au foyer, cela me rend nerveuse", affirme Chérine, une mère de deux enfants.

 

Les motifs sécuritaires invoqués sont aussi critiqués. "Je fais mes courses la nuit parce que je suis rassurée d'avoir du monde autour de moi. J'aurais davantage peur dans des rues noires et désertes", affirme Raja Kabil, une décoratrice.

Mais d'autres rétorquent que le projet va amener un rythme de vie plus normal dans une société jugée trop noctambule.

Ihab Mohammed, qui tient une boutique dans une artère commerçante, y voit une opportunité d'en finir avec des journées de travail interminables, où il faut attendre tard dans la nuit avant de rentrer chez soi.

 

"J'arrive le matin et je reste jusqu'à ce que le dernier client soit parti. Je rêve de pouvoir fermer à 22h00 heures et avoir plus de temps pour ma famille", affirme-t-il. Pour lui, "si les gens respectent la loi, ils feront leurs achats plus tôt".

 

Le ministre du Commerce et de l'Industrie a assuré que la fermeture anticipée permettrait d'économiser quelque 6 millions de livres égyptiennes (1 milliard de dollars, 750 millions d'euros) par an.

 

Mais ce projet rencontre aussi une forte résistance de la fédération des chambres de commerce du pays, qui redoute une baisse de l'activité des magasins et restaurants et réclame une réunion d'urgence avec les autorités.

Salah Taha, qui dirige la chambre de commerce de Guiza, à la périphérie du Caire, déplore que la mesure envisagée ne soit pas modulée selon les régions.

 

"Dans les gouvernorats très touristiques comme Louxor ou Assouan, les visiteurs passent la journée dans les musées et sur les sites archéologiques. Il ne faudrait pas que les boutiques ferment en soirée quand ils font du shopping", affirme-t-il.

Acheter un pantalon à une heure du matin n'a jamais été un problème au Caire, mais un projet limitant l'ouverture des commerces le soir pourrait porter un coup au mode de vie très noctambule de la mégalopole égyptienne, une "ville qui ne dort jamais".
 
Le ministre du Développement local, Ahmed Zaki, vient d'annoncer que le gouvernement envisageait d'obliger les magasins à fermer à...

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