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À La Une - Ramadan

Les crieurs publics du Ramadan se font de plus en plus rares en Irak

"Autrefois, chaque rue avait son propre mousaherati, qui avait son propre tambour".

L'un des derniers mousaheratis de Bagdad en plein action le 1 août 2012. AHMAD AL-RUBAYE

Frappant sur un petit tambour en arpentant les rues de Samarra au petit matin, Luay Sabbah crie "S'hour! S'hour!". Ce crieur chargé de réveiller son voisinage exerce une pratique de plus en plus rare en Irak.

 

Le jeune homme d'une vingtaine d'années, comme les autres crieurs publics du ramadan, réveille ses voisins pour le premier repas, appelé "s'hour", qui précède la prière de l'aube et le jeûne diurne pendant ce mois sacré pour les musulmans.

 

Mais ils ne sont plus très nombreux à pratiquer ce réveil public, vêtus de la dishdasha traditionelle, sorte de chemise à manches longues, généralement blanche, descendant jusqu'aux chevilles. La faute au progrès techologique, et aux mesures de sécurité mises en oeuvre après l'invasion américaine de 2003 qui a détrôné le dictateur Saddam Hussein.

 

Les autorités imposent un couvre-feu de 1 à 4 heures du matin dans les villes les plus importantes du pays. C'est le cas à Samarra aussi, à 110 km de Bagdad. Mais pour le ramadan, la règle s'assouplit afin de permettre à Sabbah, le crieur public ou musaheratis en arabe irakien, et à ses confrères, de sortir à l'aube dans la ville.

 

"Les mousaheratis ont presque complètement disparu. Il n'y en a plus que quelques-uns, et encore, ils ne travaillent pas tous les jours," dit Sabbah, qui a repris la fonction que son père a exercée pendant dix-huit ans, jusqu'à sa mort en 2008.

 

A la fin du Ramadan, pour la fête du Fitr, les mousaheratis font le tour des maisonnées qu'ils ont réveillées, et acceptent des étrennes pour leur travail.

 

Mais les sommes récoltées sont maigres, alors les mousaheratis ont aussi un travail à l'année: Sabbah, par exemple, vend de l'huile de cuisine.

 

"Autrefois, chaque rue avait son propre mousaherati, qui avait son propre tambour," se souvient Abou Jassim, un retraité assis chez un épicier de Bagdad.

 

"Parfois leurs voix se mêlaient, parce qu'ils étaient très nombreux. Les enfants les accueillaient avec des cris de joie, mais aujourd'hui, la peur et l'insécurité les tiennent à l'écart."

 

Après l'invasion de l'Irak, des dizaines de milliers de personnes ont trouvé la mort dans une spirale de violences confessionelles qui a culminé entre 2006 et 2008.

 

La sécurité s'est améliorée depuis, mais les attaques sont encore nombreuses et le pays a connu un regain de violence depuis le début du ramadan - soixante-neuf personnes ont été tuées les premiers jours d'août.

Couvre-feu, murs anti-explosion et check-points ont été mis en place pour lutter contre ces violences, mais ils rendent les déplacements difficiles.

 

A Baqouba, capitale de l'une des provinces les plus dangereuses d'Irak, Diyala, Ahmed Abbas, un crieur de 27 ans, a dû demander une autorisation aux autorités locales, et ne peut déambuler que "dans les zones stables."

 

Baqouba, qui comptait une soixantaine de mousaheratis l'an dernier, en a moitié moins en raison de l'insécurité et des restrictions pesant sur les déplacements, selon un membre d'un conseil local, qui préfère rester anonyme.

 

A Mossoul, l'une des villes les plus violentes d'Irak, et dans sa province de Ninive, il n'y a plus du tout de mousaheratis, selon les responsables religieux.

 

Selon un résident de Mossoul, ouvrier en bâtiment, Mukhlis Jarallah, "de vastes quartiers se réveillaient au son des cris d'un vieux grand-père." Mais, ajoute-t-il, "l'invasion a mis fin aux mousaherati."

Frappant sur un petit tambour en arpentant les rues de Samarra au petit matin, Luay Sabbah crie "S'hour! S'hour!". Ce crieur chargé de réveiller son voisinage exerce une pratique de plus en plus rare en Irak.
 
Le jeune homme d'une vingtaine d'années, comme les autres crieurs publics du ramadan, réveille ses voisins pour le premier repas, appelé "s'hour", qui précède la prière de l'aube...

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