La France est sous le choc huit mois après les attentats de Paris: au moins 84 personnes, dont dix enfants, ont été tuées à Nice par un Tunisien, inconnu des services de renseignement, qui a lancé son camion jeudi soir sur la foule rassemblée pour la fête nationale.
On ignorait encore tout des motivations de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, père de famille de 31 ans, décrit par ses voisins à Nice comme taciturne et violent envers son ex-femme.
Mais pour le procureur de Paris, François Molins, patron des magistrats antiterroristes français, cette attaque, non revendiquée, correspond "très exactement aux appels permanents au meurtre des jihadistes".
L'homme, un chauffeur-livreur, était "totalement inconnu des services de renseignement (...) et n'avait jamais fait l'objet de la moindre fiche ni du moindre signalement de radicalisation", a-t-il déclaré.
Il était en revanche "connu des services de police et de justice pour des faits de menaces, violences, vols et dégradations commis entre 2010 et 2016". Son ex-femme a été placée en garde à vue.
Les enquêteurs, qui cherchent à déterminer "les éventuels liens" du tueur avec des groupes "terroristes islamistes, ont retrouvé à bord du camion frigorifique de 19 tonnes, loué le 11 juillet, deux pistolets automatiques et des armes factices.
L'homme a été abattu par la police après avoir accompli un carnage sur deux kilomètres de la célèbre Promenade des Anglais, le long du bord de mer de la capitale de la Côte d'Azur.
Dix enfants et adolescents ont été tués, a précisé M. Molins. Et le bilan total pourrait encore s'alourdir avec "202 blessés, dont 52 en état d'urgence absolue" qui sont "entre la vie et la mort".
Au moins 17 étrangers ont trouvé la mort dans l'attaque, dont trois Allemands, deux Américains, trois Tunisiens et trois Algériens.
A Tunis, Berlin, Washington, Bamako ou encore Le Caire et Rome, la condamnation de cet attentat a été unanime et l'émotion partagée.
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Le Conseil de sécurité de l'Onu a observé un moment de silence tandis qu'à Moscou, les chefs de la diplomatie russe et américaine, Sergueï Lavrov et John Kerry, se sont rendus ensemble vendredi à l'ambassade de France pour y déposer des fleurs.
"Nous n'en avons pas terminé" avec le "terrorisme", a déclaré le président François Hollande, alors que la France est frappée pour la troisième fois en 18 mois et que les attentats jihadistes se multiplient dans le monde.
Le camion qui a foncé sur la foule. REUTERS/Eric Gaillard
"Chaos absolu"
La foule venue admirer le traditionnel feu d'artifice du 14 juillet était estimée à 30.000 personnes quand le camion a foncé dans la foule peu avant 21h00 GMT.
"C'était le chaos absolu", "des gens hurlaient", a décrit un journaliste de l'AFP, Robert Holloway, qui assistait aux festivités. "Nous avons vu des gens touchés et des débris voler partout", a-t-il ajouté.
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Encore sous le choc, Tarubi Wahid Mosta raconte une vision "de champ de bataille", dans une vidéo visionnée plus de 9.000 fois sur Facebook. "J'ai failli marcher sur un cadavre, c'était horrible", confie ce témoin qui a aussi posté la photo d'une poupée et d'une poussette abandonnées.
"Les gens étaient broyés par les roues, il y a deux petits de 8 ou 9 ans qui sont morts à côté de nous", sous les yeux de leurs parents, a raconté Bachir, rencontré par l'AFP dans un hôpital niçois.
Un motard avait auparavant tenté d'arrêter le camion en cherchant à ouvrir la portière du véhicule avant de chuter et passer sous les roues du poids lourd, selon le récit d'un journaliste allemand, Richard Gutjahr.
M. Hollande, qui s'est rendu vendredi à Nice au chevet de blessés, a décrété trois jours de deuil national, à partir de samedi.
La région de Nice est connue depuis plusieurs années pour abriter un foyer de radicalisation islamiste.
"Nous devons faire bloc, être solidaires, faire preuve de sang-froid collectivement", a affirmé de son côté le Premier ministre Manuel Valls.
Un message à peine voilé à l'opposition de droite, qui a émis des critiques sur l'action du gouvernement socialiste et l'efficacité de la lutte antiterroriste, huit mois après les pires attaques en France (130 morts).
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Etat d'urgence réactivé
"Je ne cherche à accuser personne" mais "si tous les moyens avaient été pris, le drame n'aurait pas eu lieu", a pointé Alain Juppé, ex-Premier ministre en lice pour porter les couleurs de la droite à la présidentielle de 2017. "Quand on est en guerre on protège le territoire national", a renchéri l'un de ses rivaux, François Fillon.
M. Hollande a annoncé une prolongation pour trois mois supplémentaires de l'état d'urgence, qui devait prendre fin dans quinze jours. Ce régime d'exception, décrété après les attentats du 13 novembre, facilite notamment les perquisitions et l'assignation à résidence de suspects.
Il a également annoncé le recours à plusieurs milliers de citoyens réservistes pour seconder les policiers et les gendarmes très fortement mobilisés depuis 2015.
Cette attaque est la plus importante commise en Europe depuis les attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles (32 morts).
Le groupe Etat islamique (EI), qui perd du terrain en Irak et en Syrie où il a proclamé un califat en 2014, menace régulièrement la France de représailles pour sa participation à la coalition militaire internationale dans ces deux pays.
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Reportage
A Nice, le chaos et la panique
On ignorait encore tout des motivations de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, père de famille de 31 ans, décrit par ses voisins...
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LA LIBRE EXPRESSION
21 h 12, le 15 juillet 2016