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Économie - Liban - Compte-rendu

Khalil appelle à redresser les finances publiques et à voter le budget

À l'occasion d'une longue présentation sur la situation financière du pays au Conseil des ministres, le ministre des Finances a exhorté le gouvernement à adopter une politique de sortie de crise.

Ali Hassan Khalil a exhorté les membres du gouvernement à faire un choix clair en matière de politique économique et financière. Photo Nasser Trabulsi

Lors d'un Conseil des ministres exclusivement dédié à l'examen de la situation financière du Liban, le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, s'est livré hier à un exposé de trois heures au cours duquel il a présenté un rapport de 81 pages pour mettre en garde les autres membres du gouvernement sur la crise économique et financière du pays. « Il est important de retenir que nous avons une faible croissance économique, un chômage élevé et un grand déficit public », a-t-il résumé, selon des propos rapportés par l'agence nationale d'information, après avoir décliné une série d'indicateurs macroéconomiques et des données sur l'état des finances publiques.

Pour rappel, la Banque mondiale a estimé le taux de croissance du PIB à 1,5 % en 2015, et table sur un taux de 1,8 % en 2016. Et selon le ministère des Finances, le déficit public a atteint 1,44 milliard de dollars au premier trimestre 2016, soit une hausse de 35,7 % par rapport à la même période en 2015, alors que la dette publique brute s'est élevée à 71,7 milliards de dollars fin avril, en hausse de 3,1 % en glissement annuel.
M. Khalil a exhorté les membres du gouvernement à faire un choix clair en matière de politique économique et financière. « Des solutions existent pour résoudre la crise. Ce sera soit avec une politique d'austérité, soit en augmentant la dette, soit en augmentant les impôts. Nous devons donc étudier en toute objectivité comment nous pouvons résoudre cette grave situation », a-t-il déclaré. Comme de coutume, le ministère des Finances n'a pas été en mesure de répondre aux demandes de précisions de L'Orient-Le Jour.

(Lire aussi : « La lutte contre la corruption doit commencer par le haut »)

 

« Début de solution »
À l'instar de nombreux ministres, M. Khalil a néanmoins affiché son refus d'envisager une hausse généralisée des taxes. « Si nous décidons de reconstruire notre économie et de développer nos infrastructures, nous devons en assumer les coûts, mais ça ne doit pas être à la classe moyenne et aux plus pauvres de le faire. Il est donc important de trouver de nouvelles sources de recettes qui n'affecteraient pas les classes les plus pauvres, mais qui s'attaqueraient plutôt à des niches fiscales qui ont été épargnées jusque-là. »
Pour parvenir à une sortie de crise, M. Khalil a identifié trois conditions préalables, à savoir le vote d'une loi de finances pour l'année 2017, une réactivation des institutions constitutionnelles et le vote de la grille des salaires.
« Le vote du budget de l'État constituera un début de solution à la crise financière », a estimé M. Khalil, avant de rappeler que le Liban n'a pas voté de loi de finances depuis 11 ans, chose qui a conduit à « une accumulation de grandes erreurs ». « Cela nous a contraints à recourir continuellement aux transferts de crédits à partir de la réserve générale afin d'assurer les besoins des différents ministères et institutions (publiques) et de faire face à certaines dépenses urgentes », a-t-il regretté. Un constat partagé par le ministre d'État pour la Réforme administrative, Nabil de Freige, qui a confié à L'Orient-Le Jour « qu'on ne pouvait plus continuer sans loi de finances. Il n'y a aucun contrôle du Parlement sur le gouvernement. »

Le deuxième prérequis consisterait à mettre un terme à la crise institutionnelle qui sévit au Liban depuis 2014. « La nécessité de parvenir à une stabilité politique est une condition préalable à l'amélioration de la situation financière. Il faut donc d'abord procéder à l'élection d'un président de la République et réactiver les institutions constitutionnelles avec un travail sérieux du Parlement et un gouvernement qui ne se contenterait pas de gérer les affaires courantes. » Le ministre du Travail, Sejaan Azzi, a également considéré que « la stabilité politique, qui passe par l'élection d'un président, est la seule solution pour régler la situation financière du pays ». Pour rappel, à l'exception d'une session en novembre 2015 durant laquelle 35 lois de « nécessité économique » ont été votées, le Parlement est resté inactif pendant plus d'un an.

Le ministre des Finances a soulevé, enfin, « l'obligation de voter la grille des salaires (de la fonction publique, NDLR) tout en adoptant les mesures nécessaires permettant d'assurer des recettes supplémentaires. Cela impactera positivement l'économie, même si certains continuent d'envisager la question de manière négative ». Le principal problème qui entrave l'approbation de cette grille est la détermination de sources de financement. « Le gouvernement précédent avait élaboré une proposition sur la grille des salaires, nous (le gouvernement actuel) ne pouvons pas faire comme si elle n'existait pas, il faut la prendre en considération », a commenté pour sa part M. de Freige.

Outre ces trois préalables, le ministre des Finances a exposé d'autres mesures et projets de réforme en préconisant « quelques propositions effectives qui permettraient d'augmenter les recettes et de réduire les dépenses et le déficit et assureraient une meilleure gestion de la dette publique et une redynamisation de certains secteurs productifs ». « Il a exposé 28 solutions au total », a indiqué à L'Orient-Le Jour le ministre de la Culture, Rony Arayji. « Il a par exemple proposé d'augmenter les dépenses en investissement de l'État qui ne représentent que 4 % des dépenses totales actuellement », a-t-il ajouté.

« Délicate mais pas dramatique »
À la sortie du Conseil des ministres, la plupart des membres du gouvernement ont choisi de communiquer en chœur un message rassurant, semblant surtout vouloir retenir l'affirmation de M. Khalil selon laquelle « la crise financière actuelle est d'ordre structurel mais reste circonscrite ». Le ministre de la Santé, Waël Bou Faour, a ainsi pu estimer que « la situation financière du pays n'est pas si mauvaise que cela ». Le ministre de l'Industrie, Hussein Hajj Hassan, est allé dans le même sens, déclarant que la situation est « délicate mais pas dramatique ».
Les ministres n'ayant pas eu le temps de réagir à l'exposé et aux propositions de M. Khalil lors du Conseil des ministres, le ministre de l'Information, Ramzi Jreige, a annoncé à la fin de la réunion qu'un deuxième conseil sera consacré au rapport le 18 juillet. « C'est lors de cette séance que les membres du gouvernement pourront émettre leurs remarques sur les propositions du ministre, qui recevront une copie du rapport dans les prochains jours », a-t-il ajouté.

 

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