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Moyen Orient et Monde - Brexit

La succession de Cameron vire au drame shakespearien

Coup de théâtre hier à Londres : Boris Johnson renonce à briguer le poste de Premier ministre, redistribuant complètement les cartes au sein du Parti conservateur.

La stupeur était totale, hier, au Royaume-Uni. Même si Boris Johnson suscitait une grogne croissante depuis la victoire des pro-Brexit, personne ne s’attendait à ce qu’il abandonne seulement une semaine plus tard. Leon Neal/AFP

À peine lancée, la course à la succession de David Cameron a viré au drame shakespearien hier au Royaume-Uni avec la décision de Boris Johnson, le leader du camp du Brexit, de ne pas briguer le poste de Premier ministre. « Je dois vous dire mes amis, vous qui attendez la ''phrase choc'' de ce discours, que je ne peux pas être cette personne », a lancé l'imprévisible M. Johnson à une assistance médusée. La stupeur était totale. Car même si l'ex-maire de Londres suscitait une grogne croissante depuis la victoire des pro-Brexit, personne ne s'attendait à ce qu'il abandonne seulement une semaine plus tard.
Ce coup de théâtre, qui s'apparente à un refus d'obstacle, redistribue complètement les cartes au sein du Parti conservateur et laisse entier le suspense sur la façon dont les négociations de sortie de l'Union européenne vont être menées. La ministre de l'Intérieur, Theresa May, et le ministre de la Justice, Michael Gove, dont la candidature surprise hier matin a été perçue comme une trahison par « BoJo », sont désormais les favoris pour s'installer au 10, Downing Street.
Toutefois, Theresa May pâtit du fait qu'elle s'était ralliée à David Cameron pour défendre un maintien dans l'UE. Mais cette eurosceptique notoire a montré tellement peu d'empressement pendant la campagne qu'elle a le profil pour ressouder le parti. « Notre pays a besoin d'un dirigeant qui soit fort et reconnu pour traverser cette période d'incertitude économique et politique », a-t-elle déclaré. Si elle est élue, elle ne va pas activer l'article 50, qui régit le divorce avec l'UE, « avant la fin de l'année », a-t-elle précisé. Michael Gove jouit, lui, d'une excellente réputation auprès du parti. Reste à savoir comment sera perçue sa volte-face, alors que le député écossais Alex Salmond l'a comparé hier à lord Macbeth, le général qui, dans la tragédie de Shakespeare, commet un régicide pour s'emparer du pouvoir.
Boris Johnson hors course, cinq candidats au total postulent pour mener les négociations de sortie de l'UE qui s'annoncent difficiles. Le ministre du Travail Stephen Crabb, l'ancien secrétaire d'État à la Défense Liam Fox et la secrétaire d'État à l'Énergie Andrea Leadsom ont également déposé leurs candidatures. Les députés conservateurs doivent désormais se mettre d'accord pendant l'été pour désigner deux finalistes, et les 150 000 membres du parti choisiront l'élu(e) qui sera intronisé(e) le 9 septembre.

Brutus et César
L'abandon de Boris Johnson est le dernier épisode d'une saga qui l'a vu remporter le pari du Brexit et ouvre des interrogations sur son avenir politique. L'ancien vice-Premier ministre conservateur, Michael Heseltine, s'est dit « consterné ». Boris Johnson « est comme un général qui fait avancer son armée au son des canons et qui abandonne au moment où il découvre le champ de bataille. Je n'avais jamais rien vu d'aussi méprisable et irresponsable. Il devra vivre avec cette honte », a-t-il déclaré.
Réfugié dans un quasi-mutisme depuis le référendum, comme sonné par le choc, M. Johnson avait commencé à susciter l'inquiétude chez les Tories. Le coup fatal est venu de son plus proche allié pendant la campagne : Michael Gove, qui a pris tout le monde par surprise en annonçant sa propre candidature. Le revirement du ministre de la Justice a aussitôt été interprété comme un coup de couteau dans le dos de M. Johnson. Lequel y a fait allusion en citant dans son discours les mots que Brutus prononça avant de poignarder Jules César.
Personne n'avait vu venir M. Gove, qui avait déjà rompu avec un autre grand ami, David Cameron, en se prononçant en faveur d'un Brexit au printemps. Il a enfoncé le couteau dans la plaie en disant être arrivé « à la conclusion que Boris ne peut pas assumer le leadership ou construire une équipe pour la tâche qui nous attend ». Theresa May a, elle aussi, mis en doute la compétence de Boris Johnson. « La dernière fois que Boris a noué un accord avec les Allemands, il est revenu avec trois canons à eau », a-t-elle lancé, moqueuse.
« Seul Shakespeare aurait réussi à retranscrire la magnitude de toutes ces trahisons. On est devant un nid de vipères déguisé en parti politique », tranchait Nick Turnbull, maître de conférence à l'Université de Manchester.
À Bruxelles, réunis mercredi pour la première fois en plus de 40 ans sans le Royaume-Uni, les dirigeants européens ont édicté leurs lignes rouges pour le divorce, assurant qu'il n'y aurait « pas de marché unique à la carte », selon les termes du président du Conseil européen, Donald Tusk. « L'effet traumatisant » du vote sera ressenti « pendant très longtemps », a estimé hier le président russe Vladimir Poutine, qui « suivra attentivement jusqu'où iront les négociations entre Londres et Bruxelles » et leurs « conséquences ».
Enfin, sur le front économique, le gouverneur de la Banque d'Angleterre, Mark Carney, a annoncé qu'il envisageait un assouplissement monétaire à l'été pour faire face à des perspectives « détériorées ». La livre britannique est aussitôt tombée à un nouveau plus bas en plus de deux ans face à l'euro.

(Source : AFP)

À peine lancée, la course à la succession de David Cameron a viré au drame shakespearien hier au Royaume-Uni avec la décision de Boris Johnson, le leader du camp du Brexit, de ne pas briguer le poste de Premier ministre. « Je dois vous dire mes amis, vous qui attendez la ''phrase choc'' de ce discours, que je ne peux pas être cette personne », a lancé l'imprévisible M. Johnson à une...

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