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Culture - Exposition

Regarder le rêve américain avec des yeux qui brillent

La Fondation Aïshti reçoit la seconde exposition des œuvres issues de la collection de Tony et Elham Salamé. Impressionnante et abordable, la sélection concoctée par Massimiliano Gioni et Tony Salamé est un très beau portrait de l'art contemporain américain ; une intéressante radiographie de l'état de sa société.

Un résumé parfait de l’histoire de l’art contemporain américain nous est proposé à la Fondation Aïshti.

Julian Schnabel est un monstre de l'art mondial. Monstrueux par sa stature, son charisme, son ego et les efforts qu'il déploie pour être détesté, monstrueux par le talent qu'il arrive à exprimer dans toutes les activités qu'il touche, monstrueux par la longévité de sa vie artistique et monstrueux par le format qu'il utilise pour ses toiles les plus emblématiques. Il est aussi un résumé parfait de l'histoire de l'art contemporain américain qui nous est proposé à la Fondation Aïshti – dans Good Dreams, Bad Dreams American Mythologies, une exposition réalisée en tandem par Massimiliano Gioni (l'un des curateurs de la Biennale de Venise et directeur du New Museum de New York) et Tony Salamé.

Fondateur et membre important du mouvement néoexpressionniste créé dans les années 80 à New York autour de lui et de Jean-Michel Basquiat, Schnabel a toujours su mêler expression artistique créative et thèmes ou traitements commerciaux, le tout appuyé sur une culture large et ouverte. Les œuvres qui l'ont fait connaître en France comportaient des vichys tirés du logo de la chaîne Tati, typiques des années parisiennes 70-80. Ne se contentant pas de toiles, il s'essaye aussi à la musique et surtout au cinéma pour des portraits d'artistes (Basquiat ou Avant la nuit) et un sublime, claustrophobe et poétique (le) Scaphandre et le papillon, qui lui vaudra succès critique et populaire. Depuis 2010, il travaille sur une série de portraits polaroïd, forcément plus intimistes, montrant moins la violence habituelle et appuyant la poésie qu'il avait introduite avec le scaphandre notamment.

Parmi ses œuvres présentées dans la collection Salamé, figure une des pièces les plus impressionnantes de l'exposition, Painting for Malik Joyeux and Bernardo Bertolucci, qui représente une vague immense et un surfeur s'y mesurant, presque à taille réelle. Cette pièce, elle est un temple de plus de 27 mètres carrés, plus grand donc que certains appartement parisiens... La toile représente parfaitement les thèmes préférés de l'artiste, autour de l'hommage artistique, à ses influences, ici cinématographiques avec Bertolucci et une vision plus personnelle figurée par Malik Joyeux. Le surf faisant partie des activités hors art de Schnabel, il rend ici un hommage touchant et très personnel à un sportif/artiste mort en pratiquant son sport/art. Malik Joyeux, jeune surfer tahitien, s'était noyé à Hawaï un an avant la réalisation du tableau. Une fois ces donnes absorbées, affleurent les thèmes de la nature à la fois belle et mortelle, de la faculté de l'homme à la dompter et du rôle de l'artiste pour la sublimer. Il suffisait de voir les yeux brillants, le calme olympien et le sourire éclatant d'une jeune visiteuse pour comprendre la puissance évocatrice du tableau, imposant naturellement plusieurs minutes de contemplation.

Trouver des ponts
Le propriétaire d'Aïshti, Tony Salamé, fasciné par l'imagerie US de ses années adolescentes, vit lui-même un rêve américain, fait de success et de think huge – sa personnalité bigger than life se fond avec cette cartographie impressionnante et foisonnante. Contrairement à d'autres thèmes plus intellectuels, cette exposition, et aussi parce que l'art US a toujours été un art populaire et premier degré, est une introduction facile d'accès à l'art contemporain. Elle parlera à tout le monde, des plus jeunes aux plus vieux, et les visiteurs pourront jouer à trouver les ponts entre les 60 artistes récents et leurs 235 œuvres et les artistes superstars du pop art qu'étaient Warhol ou Jasper Johns auxquels ils rendent hommage et desquels ils tirent leurs influences évidentes. En face du Schnabel, se trouve un tableau en jet de chewing-gums de Dan Colen dans lequel transpire Jackson Pollock...

Étalée sur plusieurs étages et jouissant d'une surface d'exposition gigantesque, l'exposition est presque trop riche en œuvres et nécessite certainement plusieurs visites pour appréhender vraiment tous les thèmes techniques et artistes présentés, et éviter le trop-plein. On y trouvera en effet les superstars Schnabel, Richard Prince, John Baldessari ou Sterling Ruby, une collection gargantuesque de dessins de Raymond Pettibon (dessinateur de pochettes de disques de rock californien à la base), ainsi que les représentants de la puissante vague des artistes afro-américains Rashid Johnson et Kehinde Wiley.

*L'exposition se tiendra jusqu'en octobre 2016.

 

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commentaires (1)

Ou la douce folie du rêve américain apprécié toujours par des fantaisistes.

Sabbagha Antoine

08 h 50, le 30 juin 2016

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Commentaires (1)

  • Ou la douce folie du rêve américain apprécié toujours par des fantaisistes.

    Sabbagha Antoine

    08 h 50, le 30 juin 2016

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