Une nouvelle séance de dialogue est prévue ce matin avec à son ordre du jour un sujet central, la loi électorale. Après avoir renvoyé les 17 projets présentés par les différents blocs politiques aux commissions parlementaires conjointes pour un nouvel examen, le président de la Chambre Nabih Berry entend évoquer ce dossier épineux lors de la conférence de dialogue, espérant pouvoir trancher le débat.
Des séances ouvertes ?
Des sources proches de Aïn el-Tiné ont confirmé hier à L'Orient-Le Jour que M. Berry sera ferme et demandera aux participants à la conférence de dialogue national de s'entendre sur une nouvelle loi électorale. Selon les mêmes sources, « le président de la Chambre pourrait bien laisser les séances ouvertes jusqu'à la conclusion d'un accord concernant la nouvelle loi électorale ». Les sources précitées ont également fait savoir que « Nabih Berry court-circuitera toute tentative de mener le débat vers d'autres sujets, tels que la démission des Kataëb du gouvernement Salam (du fait de la présence de Samy Gemayel), ou encore l'attentat de Verdun » (que pourrait évoquer le Hezbollah).
Le député Ali Khreiss (membre du bloc parlementaire de Nabih Berry) a estimé hier que « la séance de dialogue prévue demain (aujourd'hui) est décisive ». Dans un entretien accordé à al-Markaziya, M. Khreiss a souligné que « si les pôles réunis autour de la table de dialogue ne s'entendent pas au sujet de la loi électorale, les commissions conjointes n'aboutiront à rien ». Selon le député, « le président de la Chambre exhortera les leaders politiques à arriver à une entente, sous peine d'arrêter les réunions des commissions conjointes ». Il n'a pas manqué d'affirmer, en revanche, que « l'échec à élaborer une nouvelle loi électorale ne signifie aucunement une troisième prorogation du mandat de la Chambre, mais la tenue des législatives prévues en 2017 conformément à la loi en vigueur, quels que soient les résultats ».
(Lire aussi : Les Kataëb dénient désormais au gouvernement sa représentativité)
Positions figées
En dépit des efforts déployés par le président de la Chambre pour aboutir à un dénouement heureux, il n'est pas tout à fait évident que la loi électorale tant attendue verra le jour prochainement, du fait de l'attachement des formations politiques à leur propre « vision » de cette loi. Ainsi, Ammar Houri, député du courant du Futur, a indiqué hier que sa formation est toujours attachée à ses engagements (la proposition mixte présentée par le courant du Futur, les Forces libanaises et le Parti socialiste progressiste). « Nous estimons que cette proposition est la meilleure alternative possible », dit-il à L'OLJ avant de poursuivre : « Le courant du Futur est la formation qui a fait le plus de concessions en vue d'une solution, contrairement à plusieurs autres partis. »
Le député Ahmad Fatfat, membre du même bloc, précise de son côté que « le courant du Futur a fait quatre propositions de loi afin d'arriver à la formule adéquate ». Interrogé par L'OLJ, M. Fatfat a rappelé que son parti a présenté quatre propositions de loi : l'une axée sur 50 circonscriptions électorales, une autre prévoyant 37 circonscriptions (réparties entre loi majoritaire et proportionnelle à raison de 70 % et de 30 % respectivement), et une troisième avec la même répartition, mais prévoyant un Sénat élu conformément à la loi dite orthodoxe, avant d'arriver enfin à la proposition mixte qu'elle soutient actuellement avec le PSP, les FL et des chrétiens indépendants ». Le député de Denniyé n'a pas manqué de faire état de l'opposition catégorique de sa formation au projet de loi du gouvernement Mikati axé sur la proportionnelle. Selon lui, « la proportionnelle intégrale ne pourrait s'appliquer alors qu'un parti détient des armes, sans oublier que le projet en question révèle une grande disproportion pour ce qui est des circonscriptions ».
De son côté, le ministre du Tourisme Michel Pharaon estime que « l'accord sur la loi électorale nécessite des concessions qui ne seraient possibles que dans le cadre d'un compromis portant sur la présidentielle, tout comme des efforts politiques exceptionnels déployés à Doha en 2008 ont abouti à la tenue des élections présidentielle et législatives ». À L'OLJ, M. Pharaon a noté que « la séance de dialogue n'est pas exclusivement consacrée à la loi électorale ». « Nous espérons pouvoir réaliser un progrès surtout que les projets actuellement sujets à débats sont proches l'un de l'autre, ce qui facilite l'aboutissement à un dénouement heureux », a-t-il ajouté.
« L'initiative Berry » aussi...
Outre la loi électorale, Nabih Berry évoquera avec les pôles de la table de dialogue une issue au problème de la vacance présidentielle. Lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue italienne Laura Boldrini, M. Berry a rappelé que « l'obstacle essentiel reste la vacance présidentielle », avant de poursuivre : « Nous espérons trouver une solution à ce problème lors de la séance de dialogue, afin d'ouvrir la voie à une solution libanaise intégrale ». Cette affirmation pourrait s'expliquer par les réponses que les différentes formations politiques devraient présenter à son initiative présentée récemment. Cette « solution » stipule la tenue des législatives avant l'élection d'un nouveau chef de l'État. Or, elle se heurte au refus de plusieurs partis qui accordent la priorité à l'échéance présidentielle, dont notamment le courant du Futur. Pour Ammar Houri, « la logique des choses veut que la présidentielle soit la première des échéances ». « Si nous tenons les législatives aujourd'hui, le gouvernement se contentera d'expédier les affaires courantes, en l'absence d'un président de la République, ce qui signifie plonger le pays dans l'inconnu », a-t-il dit avant d'ajouter que « les engagements conclus par le passé n'encouragent pas à de nouveaux accords avec des parties qui pourraient revenir sur leurs paroles ». Ahmad Fatfat va plus loin en déclarant : « Nous insistons sur l'importance de la tenue de la présidentielle avant toute autre chose, et c'est sous cet angle que nous discuterons l'initiative de M. Berry. » Il fait état à son tour d'un manque de confiance en « des partis ayant violé leurs engagements par le passé ».
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commentaires (4)
Une séance de dialogue « décisive » une blague nouvelle pour tuer le temps .
Sabbagha Antoine
13 h 31, le 21 juin 2016