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Moyen Orient et Monde - Entretien express

À côté de Lieberman, Netanyahu apparaît comme un modéré

Sébastien Boussois, chercheur spécialiste du Moyen-Orient associé à l'ULB (Bruxelles) et l'Oman (Montréal), et auteur de « Israël entre quatre murs : la politique sécuritaire dans l'impasse » (éditions du Grip, Bruxelles, 2014), revient sur la personnalité d'Avigdor Lieberman, nommé mercredi ministre de la Défense par Benjamin Netanyahu.

Le nouveau ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman. Archives AFP

Pourquoi le nouveau ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman, est-il un personnage tellement controversé ?
C'est effectivement l'un des hommes politiques israéliens les plus provocateurs qu'il y ait eu ces dernières années parmi les membres du gouvernement. Il est provocant dans ses propos, car il s'attaque d'une manière virulente à ceux qui ne sont pas d'accord avec lui, d'une part, mais surtout aux Palestiniens et aux Arabes, en général. En effet, il a eu des mots très durs, à plusieurs reprises, contre les Arabes, notamment lors des dernières élections avant qu'il ne quitte le gouvernement. Avigdor Lieberman avait promis qu'il décapiterait les Arabes israéliens qui trahiraient Israël, ce qui dans le contexte actuel peut être perçu comme très limite. Il a probablement un fort caractère et possède une sorte de personnalité très proche de ce que les gens ont tendance à imaginer chez les personnalités russophones, très rentre-dedans, très autoritaires, très énergiques.


Il possède également une espèce de jusqu'au-boutisme, qui est difficilement conciliable avec d'éventuelles négociations. La dernière en date, qui a été l'une des raisons liées à son départ de la coalition, lors de la proposition de loi sur « l'État juif », portait sur l'anéantissement total du Hamas lors de la guerre de 2014. À côté de lui, le Premier ministre Benjamin Netanyahu apparaît comme un faible et un modéré. En tant que ministre des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman avait été problématique puisqu'il a été globalement très détesté par une grande partie de la communauté internationale, à cause de son intransigeance. Enfin, il a été fortement critiqué par un certain nombre de ses compatriotes, notamment au sein même du personnel du ministère des Affaires étrangères. Certains avaient des problèmes à travailler pour lui, car il était difficile d'accorder du crédit à ses positions et de côtoyer un personnage aussi provocateur. Le mettre maintenant au ministère de la Défense, c'est évidemment tout un symbole.

 

(Lire aussi : Initiative de paix : Valls se heurte à la résistance et une contre-offre israéliennes)

 

Le 3 juin doit se tenir la Conférence de Paris en vue de relancer le processus de paix israélo-palestinien. Une conférence à laquelle participeront les Américains. Que peut-on dire des rapports entre M. Lieberman et les États-Unis ?
Ce sont globalement des rapports détestables par rapport à l'administration actuelle. Barack Obama a lâché l'affaire. Il y a déjà un vrai problème d'entente entre l'administration américaine et Benjamin Netanyahu, notamment avec John Kerry qui a eu des propos très durs à l'égard d'Israël, en parlant souvent d'apartheid. Ce qui n'est pas pour plaire au gouvernement israélien. Il y a en outre un rejet de la part de l'administration américaine de ce type de tempérament et de ce caractère très colérique.

 

(Lire aussi : Washington s'interroge sur le gouvernement israélien après l'entrée de Lieberman)

 

Qu'en est-il des relations avec la Russie ?
Avec la Russie, les relations se sont normalisées. L'État hébreu a eu des positions presque prétentieuses, notamment lors de la crise entre l'Ukraine et la Russie. Les deux pays se sont rapprochés après le recul des relations américano-israéliennes. Cependant, il s'agit d'un recul de façade, puisque Barack Obama est sur le point de faire voter l'augmentation du budget alloué par les États-Unis à Israël, comme chaque année. Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu'Avigdor Lieberman est originaire de l'ex-Union soviétique et qu'il a été videur de boîte de nuit à l'époque où il était étudiant.  Il fait partie de ces courants d'immigration russophone, qui sont un million en Israël aujourd'hui, et cette immigration est, en partie, responsable du délitement de la démocratie en Israël, car ayant amené la corruption, le trafic, la prostitution et autres.

 

(Lire aussi : La grande muette et le petit bavard)

 

Pensez-vous que la menace d'une escalade de la violence à Gaza est réelle, notamment après le retour au gouvernement de Lieberman ?
C'est évidemment toujours un risque à double tranchant parce que, depuis qu'Avigdor Lieberman a quitté le gouvernement (en 2015), Benjamin Netanyahu a tenté des rapprochements avec le Hamas au détriment de l'Autorité palestinienne. Ces rapprochements se sont faits probablement de la part du Premier ministre de crainte que l'État islamique ne gangrène progressivement Gaza. L'objectif de Lieberman est probablement toujours d'en venir à bout et de raser Gaza. Ce n'est pas deux ou trois roquettes, ou une nouvelle escalade qui vont l'impressionner. Cela ne relève pas d'une conviction profonde de la part de Lieberman, mais je pense qu'en grande partie c'est en raison d'une non-vision politique, d'un nihilisme et finalement d'une obsession pour la sécurité et la défense, sans une mesure des conséquences. Ce qui pourrait le rapprocher d'un personnage très colérique comme Donald Trump, par exemple.
Il n'est pas impressionné par 3 000 morts. Cela peut constituer une inquiétude pour les Palestiniens.

 

 

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Pourquoi le nouveau ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman, est-il un personnage tellement controversé ? C'est effectivement l'un des hommes politiques israéliens les plus provocateurs qu'il y ait eu ces dernières années parmi les membres du gouvernement. Il est provocant dans ses propos, car il s'attaque d'une manière virulente à ceux qui ne sont pas d'accord avec lui, d'une...

commentaires (4)

Le singe aux yeux de sa mère n'est qu'une gazelle.

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

07 h 49, le 29 mai 2016

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Commentaires (4)

  • Le singe aux yeux de sa mère n'est qu'une gazelle.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    07 h 49, le 29 mai 2016

  • Et si enfin , la nomination du videur de night club était enfin le piège qu'il fallait tendre à ce pays usurpateur d'une terre sunnito/chrétienne de la Palestine usurpée , pour qu'on puisse enfin voir la disparition de toute cette classe de natibaba et ses 40 voleurs ??? IL EN SERAIT GRAND TEMPS, TONTON !

    FRIK-A-FRAK

    14 h 17, le 28 mai 2016

  • ZOZ HAMAM... LE GRIS PARAIT BLANC DEVANT LE NOIR !

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 09, le 28 mai 2016

  • C'est un phénomène endémique connu ...surtout chez divers intervenants politiques au Moyen Orient...(pour ne citer brièvement que cette région du monde) par exemple considérons, le curseur du fléau ,de la balance Roberval des mesures du poids de "la dangerosité médiatique "..., il se situe dans un espace de temps " T "... quelques part entre avant et après la conquête islamique ...si l'on mesure le/les changements géopolitique ,d'un point de vue historique , les comportements de certains dirigeants peuvent paraître " logique " même vis à vis du choix de faire des guerres ...par contre , du point de vue religieux ..donc intemporel....la notion de " faire la guerre" devient une paranoïa permanente...! d'où des comportements guerriers aux pulsions récurrentes , chez certains politiques où le politico/religieux précède la gestion pragmatique du temps et de l'espace ...

    M.V.

    07 h 12, le 28 mai 2016

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