La Vierge Marie suscite la ferveur des ecclésiastiques, l'étonnement des psychanalystes, la curiosité des anthropologues, les sarcasmes des athées. Que sa virginité soit symbolique ou réelle, Marie demeure un archétype de la femme. Pour le meilleur et pour le pire...
« Ce qu'Ève lie par l'incrédulité, Marie l'a délié par la foi. » Et cette pensée comme ce propos résument à eux seuls toute l'ambiguïté du message de l'Église sur Marie. Elle est l'archétype de la pureté. Pure, Marie le devient de plus en plus au fil du temps. Dès les premiers siècles, la croyance populaire nourrie à la source des Évangiles affirme la virginité perpétuelle de Marie. En 649, au premier concile du Latran, sa virginité perpétuelle selon l'esprit est consacrée. Douze siècles plus tard, Marie est déclarée conçue sans péché : c'est le dogme de l'Immaculée Conception.
L'éclat de Marie est incomparable : vénérée au-delà du monde chrétien, dans l'islam en particulier, elle a inspiré tant d'œuvres d'art, de Fra Angelico à Murillo d'Espagne ; elle a donné son nom à tant de cathédrales et elle inspire tant de lieux de pèlerinages dont « Harissa » au Liban. Sa gloire n'est pas une gloire passée. Sous le pontificat de Jean-Paul II, originaire de cette Pologne qui vénère la Vierge de Czestochowa, elle connaît un extraordinaire rayonnement dans le monde.
Et si la mère céleste, dont la virginité proclamée fait couler beaucoup d'encre, et qui, à Lourdes, à Fatima, à Medjugordje, en Bosnie, draine les foules, représentait tout simplement un autre visage de Dieu, un visage de miséricorde et non de rigueur. La dévotion à Marie est un chemin pour atteindre le divin.
C'est avant tout à l'Évangile et au Coran qu'il faut aller si l'on veut trouver la Vierge. L'Évangile est là tout entier pour aider à les mieux interpréter. Lorsque le Christ, dans ses discours et ses paraboles, décrit le comportement du chrétien, il dessine devant nous le visage de celle qui fut l'enfant de lumière par excellence. Les faits et gestes du Seigneur achèvent également d'éclairer la physionomie de Marie. Voir le Christ, c'est en quelque sorte voir sa mère. Celle-ci ne lui a-t-elle pas donné sa figure d'homme, en même temps que lui la façonnait à son image divine ?
Admirable échange dans lequel s'est consommée la ressemblance de ces deux êtres ! Transformée en son Fils. Marie n'a en propre que cette transparence, cette limpidité qui permet à l'âme de Jésus de se refléter en elle avec toutes ses perfections, de s'y imprimer d'une manière vivante. À regarder le Christ vivre et prier, on apprend donc à mieux connaître sa mère.
Une certaine physionomie de la Vierge se dégage de l'Évangile. Quelques figures et quelques textes de l'Ancien Testament, interprétés symboliquement par la liturgie et la tradition, ajoutent des traits à ce dessin. Nous en savons assez, semble-t-il, pour « entrevoir » la vie réelle de Marie. Enfin, le témoignage des spirituels, qui ne saurait constituer une source comparable à l'Écriture, intervient cependant lorsqu'il s'agit de mieux comprendre nos rapports avec la Vierge.
Mais ces sublimités ne peuvent nous faire oublier que la Vierge reste très proche de nous. Non contente de nous avoir engendrés à la vie divine, elle continue à nous former avec l'aide de l'Esprit-Saint. Et elle veut nous unir étroitement à elle, afin de poursuivre à travers nous sa mission terrestre et céleste.
En même temps qu'elle se manifeste comme la « Toute Petite qui a plu au Très-Haut », la Vierge reste la femme forte par excellence. Il ne faut pas oublier, quand on songe à elle, l'admirable portrait dessiné au livre des Proverbes. Cette femme, qui a «ceint de force ses reins et affermi son bras», afin d'accomplir avec courage son devoir d'épouse et de mère, c'est Marie, dont «la force et la grâce sont la parure », au point qu'elle «surpasse» toutes les autres filles d'Ève. De cette virilité d'âme, l'Èvangile rend témoignage.
Le Magnificat nous montre l'ampleur de sa pensée. Comme les maîtres, lumières de leur temps, elle a scruté les Écritures, mais combien différemment. Eux se sont complus dans des subtilités exégétiques, dans des interprétations humaines. Le Magnificat nous montre à quel point elle s'est assimilée l'Écriture sainte. En se laissant emporter par sa propre spontanéïté, sa pensée se coule naturellement dans des images et des formules bibliques.
Elle atteint dans l'Écriture la pensée même de Dieu. Avant la prédication de l'Évangile, la Vierge a discerné la conduite mystérieuse du Père, préférant les humbles et les petits aux puissants et aux sages, se servant de ce qui «n'est pas» pour faire par ce «qui est» pour faire. C'est toute la «bonne nouvelle qu'elle pressent et dont elle vit déjà.
On se plaît à songer que l'expérience humaine de la Vierge n'a pas cessé avec sa vie terrestre. Transportée au ciel avec son corps, ses facultés, son intelligence, depuis deux mille ans, elle continue à se pencher de là-haut sur toutes les misères de la terre pour les consoler et les guérir. Elle connaît ses pauvres enfants infiniment mieux qu'ils ne se connaîtront jamais. Comment pourrait-on lui donner le change ou l'aborder? Justement au cours de ce mois de mai, mois de Marie, la Madone appréciera qu'on lui récite une dizaine d'Ave Maria chaque jour ou alors tout simplement organiser un pèlerinage à Harissa dont les portes restent ouvertes tant aux chrétiens qu'aux musulmans.
Nos Lecteurs ont la Parole - Sylvain THOMAS
Mai, Marie, mère, Madone
OLJ / le 25 mai 2016 à 00h00
commentaires (9)
Marie, que de crimes sont commis en ton nom !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
11 h 21, le 26 mai 2016