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Liban - Municipales 2016

La canicule n’a pas réussi à refroidir l’enthousiasme des électeurs dans les régions de Baabda-Aley

Une journée municipale chaude à tous les points de vue a caractérisé hier les élections dans les régions du sud du Mont-Liban où le taux de participation a atteint 38 % à Baabda, 48 % à Hadeth, 56 % à Hazmieh, 37 % à Ghobeyri et 60 % à Aley.

Le président sortant, Pierre Bejjani, et le moukhtar de Araya suivant de près les élections. Photo RRT

Dans le caza de Baabda, 162 500 électeurs sont inscrits pour élire les membres de 46 municipalités. Le taux de participation avait atteint près de 38 % dans l'après-midi, dépassant même la barre des 50 % dans certaines localités. La bataille la plus rude aura été celle de Hadeth.

Deux listes se sont affrontées dans cette agglomération : l'une présidée par le président du conseil municipal sortant Georges Édouard Aoun, soutenue par le Courant patriotique libre (CPL), et la seconde présidée par l'ancien président de la municipalité, Antoine Karam, qui affirmait être soutenu par le CPL et les Forces libanaises. Dès l'ouverture du scrutin, les candidats des deux listes ont assuré une présence marquée aux entrées des bureaux de vote afin de suivre de près les votants malgré l'air suffoquant qui alourdissait l'ambiance.

Patrick Sneifer, candidat sur la liste « L'unité de Hadeth » et fils du comédien décédé Élie Sneifer, a souligné qu'il est temps que les habitants de Hadeth fassent entendre leur voix pour « briser le monopole imposé par l'actuel président de la municipalité ».

(Voir aussi : Le scrutin au Mont-Liban, en images)

M. Georges Aoun, pour sa part, se montrait confiant quant aux résultats qui devaient déterminer, selon lui, si l'action de la municipalité a été efficace et dans l'intérêt du village ou non. « Il est vrai que nous bénéficions du soutien du Courant patriotique libre, mais nous comptons surtout sur l'appui des électeurs qui sont témoins de nos efforts durant plusieurs années, que ce soit au niveau des chantiers renouvelant l'infrastructure ou sur le plan de la protection du village face au changement démographique qui le menaçait par le biais de la vente incontrôlée des terres », a souligné Georges Aoun.

« Nous sommes tous des frères et fils d'une seule région qui nous tient à cœur et qui représente tous les partis politiques », explique d'autre part un partisan de la liste d'Antoine Karam. De nombreuses familles musulmanes n'ayant pas de domicile à Hadeth sont venues du Liban-Sud pour déposer leurs bulletins à l'école des sœurs des Saints-Cœurs sans pour autant préciser pour quelles raisons elles sont intéressées par ces élections qui se tiennent très loin de chez elles.

Un phénomène analogue était perceptible dans la localité de Baabda où la tension était palpable devant les bureaux de vote du fait qu'un nombre assez important de votants étrangers à la région venaient déposer leurs bulletins pour des considérations « purement politiques » et sous le regard circonspect des habitants ou des natifs de la région. « Si vous leur demandez ils sont d'où, ils ne vous répondront même pas, regardez-les, ce sont des personnes pour lesquelles les candidats sont de simples étrangers, mais elles sont commanditées par des responsables influents qui soutiennent la liste de nos adversaires qui se moquent de l'appartenance ou de la protection des terres de Baabda », s'emporte un électeur partisan de la liste présidée par Antoine Wajih el-Hélou et qui assure que le cinquième des voix des électeurs à Baabda (quelque 1 100 voix) ne relèvent pas des habitants ou des fils de Baabda, mais sont des Arabes greffés sur les listes d'électeurs. La localité, privée de sa municipalité depuis quelques années déjà à cause de la démission de plusieurs de ses membres, est avide de nouveaux projets propulsant la capitale du Mont-Liban vers l'avant.

(Lire aussi : Au Metn central, quelques batailles acharnées, en toute courtoisie)

D'autres votants, par contre, ne semblent guère intéressés par cette échéance : « Je viens voter parce que mon mari me l'a demandé, mais je ne pense pas que quelque chose changera avec l'une ou l'autre des deux listes », déclare une jeune femme à l'entrée du bureau de vote à Baabda. « Cela fait une demi-heure que nous attendons notre tour, il paraît que les mesures sont draconiennes », relève, sur un ton plaisantin, Abdo Nakhlé, un ancien militaire, qui se demande pour quelles raisons lui, qui réside à Wadi Chahrour, devrait venir voter à Baabda. « Je ne vois pas pourquoi, mis à part les appréhensions politiques des uns et des autres et les menaces de changement démographique, chaque citoyen ne choisirait pas le conseil municipal de son lieu de résidence vu qu'il va finalement profiter des services de ce dernier ; mais dans tous les cas, je choisis ma propre liste regroupant les meilleurs des candidats des deux listes car il s'agit de mon village natal et j'y suis attaché. »

La liste « Baabda-Louaizé », appuyée par le Courant patriotique libre et les Kataëb, et la liste « Ardouna Baytouna » (Notre terre, notre maison), soutenue par le CPL et les Forces libanaises, essaieront d'encourager autant que possible, durant la journée, les électeurs à venir voter. Jihad Khoury, avocat, se présente comme candidat indépendant au conseil municipal de Baabda sans se joindre à l'une de ces listes. « J'ai fait du porte-à-porte, je suis entré en contact avec tous les habitants afin de les convaincre de l'importance de voter pour des candidats libres qui sont déterminés à servir leur village sans être étouffés par les considérations politiques quelconques, et je suis certain qu'il s'agit là d'une bonne tactique », explique-t-il.

Choueifate

À Choueifate, dans le caza de Aley, la colère des votants se faisait entendre devant l'école publique dans laquelle étaient aménagés cinq bureaux de vote. Les files d'attente dévalaient les escaliers dans une ambiance chaotique et une chaleur étouffante. Des observateurs de la Lade tentaient tant bien que mal de suivre le déroulement du scrutin dans des conditions inhumaines, tant pour les fonctionnaires que pour les citoyens, pour la plupart des « Arabes sunnites », comme les appellent des locaux, qui s'empressaient dans un établissement aux couloirs et salles très étroits et insalubres.
Nidal, interrogé devant le bureau de vote, a indiqué qu'il avait voté pour les membres de la société civile formant la liste soutenue par le PSP du leader druze Walid Joumblatt. « J'ai voté aujourd'hui pour la liste regroupant des membres de la société civile, soutenue par M. Joumblatt, pour marquer mon mécontentement après la crise des déchets et le scandale autour du dépotoir de Costa Brava », souligne-t-il. De son côté, Charbel, agent de la police municipale, a assuré qu'il donnerait sa voix à la liste soutenue par le leader druze Talal Arslane « car elle compte un représentant aouniste ».

(Lire aussi : Au Chouf, des votes en faveur du « changement » et du « développement »)

Hazmieh

À Hazmieh, c'est Jean Asmar, président sortant, cigare à la main et regard confiant, qui surveille de près le déroulement des élections au Collège Élysée. « Avec seulement 2 725 électeurs, M. Asmar a peu de gens à satisfaire pour assurer sa victoire dans les urnes, mais Hazmieh compte quelque 70 000 résidents qui ne sont pas pour autant tous satisfaits de sa politique d'exploitation illimitée des ressources de la municipalité et des prérogatives dans des transactions immobilières ou autres, sans aucun service en retour pour la population », explique Ziad Akl, président de l'association Yasa et candidat sur la liste « La dignité de Hazmieh », présidée par Georges Bassil et soutenue par le CPL. Plus tard en soirée, M. Akl a relevé des violations commises par la liste adverse lors du dépouillement des bulletins de vote.

Ghobeyri

À Ghobeyri, une première depuis une dizaine d'années, une liste, « Ghobeyri pour tous », formée de la société civile et des familles, essaye de se faire une place face à la liste traditionnelle, amalgame des deux partis géants qui se partagent la banlieue sud, Amal et Hezbollah. L'ambiance était pour le moins qu'on puisse dire tendue dans cette localité où les déclarations et témoignages étaient presque inexistants face à l'omniprésence de la machine électorale du tandem chiite.

Aux abords du secteur, des pancartes indiquaient aux électeurs venant de la Békaa les points de rencontre où des directives et des listes étaient distribuées. Dans l'école Ghandour, le député Bilal Farhat du bloc Amal a effectué une tournée auprès des bureaux de vote en s'assurant du bon déroulement de l'opération électorale, en compagnie de la candidate au conseil municipal de Ghobeyri, Hassana Hamdar. « Je vous prie de vous assurer du bon emplacement de chaque enveloppe », devait-elle souligner sur un ton ironique, dans une allusion à peine voilée à la confusion manifestée par le leader du courant du Futur, Saad Hariri, lors de la première journée électorale à Beyrouth.

(Lire aussi : Au littoral du Metn, comme ailleurs, un pot-pourri d'alliances entre familles et partis)

Des jeunes étaient mobilisés par ailleurs pour transporter les personnes âgées ou les handicapés aux étages supérieurs afin de leur permettre de participer aux élections. « J'ai envie de voir un changement, de voir des jeunes qui nous ressemblent arriver et décider, et de mettre un terme à ce monopole que l'on nous impose », lance à mi-voix un jeune homme à L'OLJ sans pour autant donner d'autres détails avant de s'engouffrer dans une ruelle.

Araya et Bsous

À Araya, deux listes étaient en compétition avec en arrière-plan des accusations multiples : une liste présidée par le président sortant Pierre Bejjani, dont les portraits gigantesques décoraient la grande partie des immeubles de la localité et qui bénéficie d'une grande popularité auprès des habitants, et une autre, présidée par Constantin Irani, qui désire un changement à tous les niveaux et surtout « la préservation du visage écologique de Araya ». Un point positif pour les responsables de la région résidait dans l'aménagement d'une allée réservée aux personnes handicapées qui désiraient participer à ces élections.
À Bsous, la bataille était serrée. À midi, les estimations étaient très proches pour les deux listes en lice. Une première liste était parrainée par le parti des FL, omniprésent dans le village, et une autre, « Bsous, ma famille », composée des représentants des familles mais qui comptait aussi des partisans FL. Sami Abou Atmé, fervent partisan FL et candidat sur la liste « Bsous, ma famille », se dit cette fois-ci contre la liste proposée par le parti chrétien.

Kfarmatta

À Kfarmatta, où les conflits intercommunautaires sanglants entre druzes et chrétiens sont presque oubliés et remplacés par une atmosphère de réconciliation, les élections étaient sereines avec des Beyrouthins qui se sont déplacés spécialement pour essayer de changer la donne dans les urnes. Sur la liste des électeurs des chrétiens de la région, 532 hommes étaient inscrits contre 548 femmes. Presque la moitié avait déjà participé au vote en début d'après-midi. Deux listes présidées par la famille Khaddaj étaient en lice : « L'unité et le développement », présidée par Ajwad Khaddaj et soutenue par Walid Joumblatt et les FL, et « Pour une plus belle Kfarmatta », présidée par Nazir Khaddaj et formée des familles. Pour Sleimane Rameh, candidat sur la liste « L'unité et le développement », l'essentiel était de pouvoir percer avec cinq candidats chrétiens indépendamment de la liste sur laquelle ils se sont présentés. « Si nos confrères druzes respectent leurs promesses et s'il n'y a pas de panachage de nos candidats, nous devrions avoir cinq membres municipaux, sinon la coexistence est tronquée. La dernière fois, nous nous sommes retrouvés avec un seul chrétien au sein du conseil municipal, et il a fini par démissionner », explique le candidat devant l'église Saint-Georges en cours de construction et dont le parvis a été transformé en bureau de vote pour les chrétiens de Kfarmatta.

À Aley, des pancartes de remerciements de la part du député Akram Chehayeb pour les candidats qui se sont désisté accueillent les visiteurs aux abords de la ville qui a opté pour l'entente. À Bhamdoun, les listes étaient choisies sur base d'un consensus entre les familles, sauf à Bhamdoun Mhatta où deux listes ont décidé de croiser le fer.


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Deux listes se sont affrontées dans cette agglomération : l'une présidée par le président du...

commentaires (1)

Étant si grands, ces politiques, ils n'ont nul besoin de mendier....

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

14 h 54, le 16 mai 2016

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Commentaires (1)

  • Étant si grands, ces politiques, ils n'ont nul besoin de mendier....

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    14 h 54, le 16 mai 2016

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