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Liban - Municipales 2016

Au Metn central, quelques batailles acharnées, en toute courtoisie

Zoom in sur une journée électorale caniculaire à Dhour Choueir, Beit Chabab, Bickfaya et Beit-Méry.

Le député Samy Gemayel, également chef des Kataëb, vote à Bickfaya. Photo A.-M.H.

Un scrutin sans histoires, morne par endroits, malgré quelques rudes batailles, des accusations d'achats de voix, des intentions de panachage et un taux global de participation de 52,24 %. C'est l'impression générale qui ressort de l'étouffante journée électorale dominicale dans quatre villages du Metn, Dhour Choueir, Beit Chabab, Bickfaya et Beit-Méry. Quoi qu'il arrive, les grandes familles de ces localités sont gagnantes, indiscutablement, car représentées dans les listes, de part et d'autre. Au lendemain des élections, c'est de pair et sans rancœur qu'elles devront donc travailler pour leur village. En revanche, ce scrutin met en valeur la nécessité de réformer l'organisation des élections. Autrement dit d'informatiser le système, de mobiliser les femmes, de sélectionner des locaux plus adaptés qui prennent en compte les personnes âgées, handicapées et à mobilité réduite, de mieux gérer les machines électorales, la présence des scrutateurs, notamment, qui tentent, envers et contre tous, de s'ingérer dans l'opération, jusque dans l'isoloir. Mais aussi et surtout de mettre fin à l'argent politique.

(Voir aussi : Le scrutin au Mont-Liban, en images)

Locaux exigus et candidat oublié

Dhour Choueir, 9 heures. La place du village est encore vide. Seuls sont mobilisés les scrutateurs des deux listes rivales, reconnaissables à leurs casquettes et leurs T-shirts. De même que l'armée, présente en force. Présidée par l'homme d'affaires Élias Sawaya, la liste de Choueir et de Sindiyané est soutenue par le ministre de l'Éducation, Élias Bou Saab, et par le PSNS d'Assaad Hardane. Elle se veut pourtant « apolitique » et veut « œuvrer au développement », comme l'assure à L'Orient-Le Jour la tête de liste. Baptisée « Sawa », l'autre liste, présidée par Naïm Sawaya, ex-président de la municipalité, a pour objectif de « sortir le village de l'emprise du ministre Bou Saab », mais déplore « les menaces qu'elle reçoit », assure son président. Toutes deux espèrent la mobilisation des 2 000 votants du village (sur 5 000 inscrits).

Dans les locaux en chantier de la municipalité où se déroule déjà le scrutin, quelques personnes âgées montent péniblement les marches qui les séparent des bureaux de vote. Des scrutateurs font de leur mieux pour les aider. Des familles se présentent aussi. « Je ne sais pas pour qui voter, aide-moi », lance une femme à son époux. Mais à l'entrée des bureaux de vote, la foire règne déjà. Et pour cause, les scrutateurs itinérants s'interpellent à haute voix, offrent petit déjeuner, boissons et café à la ronde, même aux forces de l'ordre, et ne tarissent pas de « conseils » aux votants, jusque dans les bureaux de vote. Quant aux locaux, ils sont d'une exiguïté telle que le responsable d'un bureau de vote laisse éclater sa colère. « C'est le pire centre électoral. Nous pouvons à peine respirer. Nous avons dû éliminer un isoloir », lance-t-il, doutant « du bon déroulement du décompte des voix ». Dans cet état des lieux, difficile pour les responsables de déceler les irrégularités. Un candidat au poste de moukhtar, Ghassan Philippe Sawaya, a eu la mauvaise surprise de constater que son nom ne figure pas sur la liste des candidats affichée dans les isoloirs. L'erreur ne sera pas totalement réparée. Dans quelques isoloirs, son nom sera affiché sur un papier, aux côtés de la liste officielle, tout en restant peu visible. Ailleurs, il n'en sera rien.

(Lire aussi : La canicule n’a pas réussi à refroidir l’enthousiasme des électeurs dans les régions de Baabda-Aley)

Scrutateurs envahissants

Beit Chabab, 10h15. Entre la jeune liste « Chbabiyé », présidée par l'avocate Myriam Jabre, et la liste de l'actuel président de la municipalité, Élias Achkar, en place depuis 18 ans, la bataille tourne à l'aigre, même si, dans les apparences et les bureaux de vote, la courtoisie est de rigueur. Dans ce village où 2 700 votants sont attendus sur 6 269 inscrits, les accusations d'achat de voix vont bon train, de part et d'autre. Soutenue par des habitants de diverses appartenances politiques, la jeune membre du conseil municipal appelle « au changement, au vote pour du sang neuf », et ambitionne notamment « de mettre fin au clientélisme ambiant » et de « redonner sa place et sa beauté » au village. « Le travail municipal nécessite de l'expérience », répond, imperturbable, M. Achkar. Il faut dire que ce dernier tire sa force du soutien d'Élias Murr et du chef du parti Kataëb Samy Gemayel. Il bénéficie d'ailleurs d'une solide machine électorale et d'un nombre impressionnant de scrutateurs. Mais le panachage n'est pas à écarter. La candidate a déjà fait ses preuves. Confiant jusqu'à l'arrogance, Tony Hayek, partisan de M. Achkar, refuse de se rendre dans l'isoloir, malgré l'insistance du responsable du bureau de vote. « Je veux annoncer à tout le monde que je vote pour le président », répond-il. Plus loin, une dame âgée, Jeannette Hayek, doit se faire aider pour descendre les marches qui la mènent au bureau de vote. Elle se dit heureuse de participer à ce « processus démocratique ». La responsable du bureau de vote lui explique scrupuleusement la tâche à accomplir. Mais les scrutateurs itinérants du président de la municipalité piaffent d'impatience. « Laissez-nous l'aider », lancent-ils à la responsable, qui ne cède pas.

Esprit d'appartenance

Fair-play. C'est le mot d'ordre à Bickfaya-Mhaydssé, marquée par l'absence de bataille électorale dans le vrai sens du terme, mais une liste complète, présidée par Nicole Gemayel, fille de l'ancien président Amine Gemayel. Une liste dont les membres sont majoritairement Kataëb, certes, avec quelques figures du PSNS. En face, cinq candidats indépendants espèrent tout au plus une ou deux places au sein du conseil. Mais la jeune femme jouit d'une grande popularité. Les votants ne tarissent pas d'éloges sur les événements qu'elle organise pour promouvoir le village. « Elle a tant fait, le marché de Noël, le marché aux fleurs, le festival des pêches, et, surtout, le centre de tri mis en place avec la crise des déchets », affirme Madou Gemayel, venue voter avec ses deux jeunes. Même les personnes âgées n'hésitent pas à gravir les marches pour soutenir leur candidate, mais aussi leurs proches, indépendants. « Il m'est difficile de monter les escaliers, alors je m'aide de ma canne. Je fais mon devoir. Je vote pour les bons candidats et pour les membres de ma famille », souligne Nadia Omeyra. Panachage ou pas, Nicole Gemayel est convaincue de la volonté de chaque candidat d'œuvrer pour le bien de Bickfaya. « Nous servirons le village avec ceux qui seront élus, car il n'y a aucune animosité, mais un bel esprit d'appartenance et une volonté commune de contribuer au développement », affirme-t-elle à L'OLJ. Venu soutenir sa sœur, Samy Gemayel invite les électeurs « à faire le meilleur choix pour le développement de leur région ». Il assure que ces élections ont été menées « par les familles », « loin des calculs politiciens », et sont l'occasion de « se réhabituer au processus électoral ».

(Lire aussi : Au Chouf, des votes en faveur du « changement » et du « développement »)

Pour le changement

Beit-Méry, 14 heures. Cette journée électorale est également jour de première communion à la paroisse du village. À l'école publique, le taux de participation plafonne à 45 %. Sur 4 000 électeurs, 2 200 sont attendus. La cour de récréation est pleine de sympathisants, de scrutateurs, de familles, de candidats. Les deux listes rivales se livrent, certes, une bataille acharnée, mais ici tout le monde se connaît, s'embrasse, s'encourage. Les municipales, c'est bien une affaire de familles. Dans les bureaux de vote, l'atmosphère est calme et bon enfant, sans irrégularités apparentes. On sert le café. On s'ennuie un peu. Le Dr Sami Moukheiber, candidat à la vice-présidence de la liste « Killna Byout Méry » dirigée par Roy Abou Chédid, espère que le taux atteindra la moyenne historique de 55 %. Il fait déjà des projets. La victoire est à portée de main. Le médecin est intarissable sur les projets de sa liste pour l'eau et l'environnement. « Nous voulons faire de Beit-Méry un village idéal, au sein duquel les habitants qui le désirent peuvent participer au débat », ajoute-t-il.

En face, la liste de Beit-Méry, présidée par l'actuel président de la municipalité, Tony Maroun, est aussi confiante. « Tout se passe très bien », lance une candidate, Nada Bou Khalil. Mais, dans la file d'attente, une habitante qui désire préserver l'anonymat évoque son « désir de changement ». Même discours de la part d'un jeune homme, Salah Baz, qui vote pour la première fois. « Je vote pour le changement, pour le respect de la loi et de la transparence », insiste-t-il. Les résultats officiels se prononceront-ils en faveur du changement ?


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Un scrutin sans histoires, morne par endroits, malgré quelques rudes batailles, des accusations d'achats de voix, des intentions de panachage et un taux global de participation de 52,24 %. C'est l'impression générale qui ressort de l'étouffante journée électorale dominicale dans quatre villages du Metn, Dhour Choueir, Beit Chabab, Bickfaya et Beit-Méry. Quoi qu'il arrive, les grandes...

commentaires (2)

Cpmment permet-on à un PSNS d'avoir une activité politique au Liban ? Ce parti à fait deux coups d'Etat en 1949 et en 1961. Son fondateur fut fusillé le 8 juillet 1949. Dansun Etat qui se respecte, il ne devrait pas exister.

Un Libanais

17 h 11, le 16 mai 2016

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Commentaires (2)

  • Cpmment permet-on à un PSNS d'avoir une activité politique au Liban ? Ce parti à fait deux coups d'Etat en 1949 et en 1961. Son fondateur fut fusillé le 8 juillet 1949. Dansun Etat qui se respecte, il ne devrait pas exister.

    Un Libanais

    17 h 11, le 16 mai 2016

  • Mais d’où sortent-ils donc ces ces "zâïîms?", qui le dupent ainsi si facileMent à ce "peuple" libanais.... soi-disant si "Äâzîîîm?" !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    14 h 34, le 16 mai 2016

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