Rechercher
Rechercher

Culture - Spectacle

L’homme est-il encore un miracle sur terre ?

D'après un texte de Matéi Visniec, « Paysages de nos larmes » – interprété hier soir par le collectif Kahraba au théâtre Tournesol pour le Spring Festival 2016 – pose, par la bouche de Job, la question de notre humanité.

Performance théâtrale, visuelle, musicale, chorégraphique, où marionnettes, masques et monologues interviennent dans une scénographie poétique magistrale. Photo Marwan Assaf

Il est des spectacles qu'on ne peut plus arracher de notre esprit. Des spectacles qui restent ancrés, jusqu'à s'enraciner et se ramifier. Il est des spectacles qu'on a envie d'emprisonner dans notre mémoire pour ne pas les laisser s'échapper. Il est des spectacles tellement silencieux qu'ils chahutent. Tellement minimalistes qu'ils pullulent en mouvements. Tellement sombres qu'ils éclairent la vue. Il est des spectacles tellement hypnotiques que le public (tout libanais soit-il – avec ses smartphones transformés à loisir en caméras ou laptops) se soumet à leurs diktats. Ceux de la beauté et de la paix. Landscapes of our tears (Paysages de nos larmes) – présenté hier soir au Tournesol dans le cadre du Spring Festival 2016 – en fait partie.

Éternel Job
Performance théâtrale, visuelle, musicale, chorégraphique, où marionnettes, masques et monologues interviennent dans une scénographie poétique magistrale. Le collectif Kahraba, qui poursuit son ascension depuis une dizaine d'années et qui a instauré le festival Nehna wel amar wel jiran, témoigne encore une fois de la maîtrise des disciplines citées.
Éric Deniaud, codirecteur de cette troupe, formée de Marie-Lise Youssef Aad, de Dana Mikhael et d'Aurélien Zouki, demande un jour à Matéi Visniec de lui écrire une sorte de monologue mêlant histoire et poésie. L'auteur roumain, dont les textes sont parmi les plus joués au théâtre actuellement, propose cette écriture dont les échos résonnent dans toutes les plaines et montagnes du Proche-Orient. Job, figure biblique dont la patience est proverbiale, « serait le seul personnage qui pourrait encore nous apprendre quelque chose sur notre humanité », dira Deniaud. Sa place au théâtre a donc d'autant plus de sens qu'elle rappelle combien cette région de larmes et de sang ne cesse d'attendre, impatiemment, le salut et la paix.
Éric Deniaud travaillera sur des rouleaux à l'encre. Inspiré de la technique des « makemono » au Japon, il va créer des paysages abstraits qui défileront sur fond de musique du violoniste Dominique Pifarely, de lumière (en fondu) de Ricardo Clémenti ainsi que du texte lu par Roger Assaf.
Les tissus fluides et amples enveloppent la scène, se rétrécissent pour ne plus former que rochers ou pierres, ou se déplient en forme de vagues gigantesques. La marionnette de Job, superbement exécutée, ainsi que les masques qui vous observent et vous questionnent ne sont plus que le reflet de nous-mêmes. Et l'on sort, à la fin de cette représentation scénique puissante, en se demandant : sommes-nous les nouveaux monstres ou croyons-nous encore au miracle de l'homme, tout comme Job ?

Il est des spectacles qu'on ne peut plus arracher de notre esprit. Des spectacles qui restent ancrés, jusqu'à s'enraciner et se ramifier. Il est des spectacles qu'on a envie d'emprisonner dans notre mémoire pour ne pas les laisser s'échapper. Il est des spectacles tellement silencieux qu'ils chahutent. Tellement minimalistes qu'ils pullulent en mouvements. Tellement sombres qu'ils éclairent...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut