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Culture - Mashrou3 Leila censuré en Jordanie

« Nous continuerons à prôner l’égalité et l’amour dans nos chansons »

L'annulation par les autorités jordaniennes du concert que devait donner Mashrou3 Leila demain, vendredi 29 avril, à Amman, a surpris et soulevé un tollé de protestations. Dans un message posté sur Facebook, le groupe de rock alternatif libanais précise que le ministère jordanien de l'Intérieur a pris cette décision en raison des « croyances politiques et religieuses » du groupe. Explications pour « L'Orient-Le Jour ».

Mashrou3 Leila à Baalbeck. Photo archives

« Nous sommes très surpris par cette décision, assure le producteur de Mashrou3 Leila, Karim Ghattas. C'est la première fois que ça nous arrive. D'autant que Mashrou3 Leila s'est précédemment produit à trois reprises à Amman, où il est très apprécié. »
« Nous étions très enthousiastes à présenter notre nouvel album Ibn el-Leil en Jordanie. Un pays qui est un peu notre seconde patrie, où nous avons de très nombreux fans et où nous rejoignent à chacun de nos concerts nos inconditionnels en provenance des divers pays arabes », signale pour sa part Carl Gergès, l'un des musiciens du groupe.

En 8 ans de tournées dans le monde et les pays de la région, le groupe n'a jamais été confronté à ce genre de situation. « On ne lie pas cette décision à la région. Cela pourrait arriver dans n'importe quel pays », affirme d'ailleurs le producteur. « Nous avons donné des concerts partout, aussi bien dans les pays occidentaux qu'en Égypte, au Maroc, aux Émirats et au Liban bien sûr sans aucun problème jusque-là. »

Quelles sont les raisons avancées pour justifier cette annulation ? « Elles sont floues, répond Carl Gergès. Selon le ministère du Tourisme, il semblerait que nos valeurs ne s'accordent pas avec l'authenticité du site, l'amphithéâtre antique romain de Amman, où nous devions nous produire. Ce qui est étonnant, vu que c'est là que nous avions donné nos trois précédents concerts. »
Le groupe indique sur sa page Facebook avoir été informé « officieusement » que la raison de ce brusque changement, quelques jours avant le jour du concert, était due à l'intervention de certaines autorités qui auraient fait pression sur des personnalités politiques. Des rumeurs courent même sur la possibilité que cette annulation soit due à une requête du lobby catholique jordanien. « On ne peut pas porter ce genre d'accusation sans preuves, avance prudemment Carl Gergès. Mais la presse, qui, dans son ensemble, nous soutient largement, fait état de pressions religieuses exercées sur les autorités. »

Une décision du Parlement jordanien
Dans un article du quotidien jordanien el-Khabar, qui circule sur les réseaux sociaux, une quelconque implication d'autorités religieuses n'est cependant pas évoquée directement. L'auteur rapporte plutôt la décision prise par le Parlement jordanien d'interdire définitivement au groupe de se produire sur son territoire – le message véhiculé par leurs chansons n'étant pas, selon les autorités à Amman, conforme aux valeurs et aux traditions du pays et de la société jordanienne. Une dépêche de l'AFP faisait mention hier d'un post sur Facebook du député Bassam al-Battouche, indiquant avoir lui-même demandé au gouverneur de Amman l'annulation du concert du groupe Mashrou3 Leila. Pour le député jordanien, « le groupe libanais controversé fait l'apologie d'idées étrangères à notre société et culture arabo-musulmane. Il évoque dans ses chansons sexe et homosexualité, appelle à la rébellion contre les gouvernements et les sociétés, et fait l'apologie du satanisme ».

« Nous ne prônons que la liberté, l'égalité et l'amour dans des textes qui ne parlent au final que de choses très humaines, assure Carl Gergès. Et nous continuerons à le faire, sans rien changer à notre répertoire et notre style », poursuit-il. « Cette annulation injustifiée nous a frustrés bien évidemment, mais la réaction des fans qui nous soutiennent nous a largement réconfortés. » Sont-ils prêts à se produire à nouveau à Amman si le gouvernement jordanien revient sur sa décision ? « Sans doute. Pourquoi devrions-nous punir nos fans jordaniens?... »
« Nous voulons juste continuer à porter les couleurs de notre musique partout dans le monde, sans avoir à justifier de ce que nous sommes ou de notre mode de vie », affirme en conclusion Karim Ghattas.

 

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« Pour la première fois de ma vie, j'ai honte de la Jordanie, mon pays... »

Sur son compte Facebook, Zane Siraj Sinno, la mère de Hamed Sinno, elle-même d'origine jordanienne, écrit : « En tant que jordanienne et mère du chanteur de Mashrou3 Leila, je suis fière de ce que ce groupe a osé accomplir. Je suis fière de mon fils. Je suis fière de l'intégrité de tous les membres de cette formation. Du courage que secrète chacune de leurs chansons, de la somme de réflexion et de lectures qu'ils ont mise dans chaque mot, sachant qu'ils s'adressent à toute une génération. Il est regrettable que la profondeur de leurs textes ait échappé à ceux qui les critiquent et qui ne sont, hélas, que le reflet de la situation dans notre région du monde (...) Je suis fière de Mashrou3 Leila, mais pour la première fois de ma vie, j'ai honte de mon pays, la Jordanie, qui n'a pas apprécié le fait que ce groupe ait du sang jordanien... »

 

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