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Liban - Municipales

Les Beyrouthins sauront-ils transformer l’idéal Beyrouth Madinati en réalité ?

« Il ne s'agit pas d'un combat entre forces politiques, mais d'un combat politique par excellence. »

La campagne Beyrouth Madinati a dévoilé hier, sous un soleil de plomb et avec en toile de fond la Méditerranée, la liste de ses 24 candidats au conseil municipal de Beyrouth. Douze femmes et douze hommes affichant une détermination farouche pour sauver la capitale, qui agonise sous la tutelle d’une classe politique jugée laxiste et corrompue, ont invité les Beyrouthins à être les acteurs principaux de ce changement, lors d’une conférence de presse sur la corniche de Aïn Mreissé, un des rares endroits de la capitale où le citoyen se sent encore chez lui... Photo RRT

La campagne municipale a commencé depuis quelques semaines et les portraits des candidats au large sourire viennent décupler le désordre ambiant dans le pays. Pour sortir du décor classique, la campagne non affiliée aux partis politiques traditionnels, Beyrouth Madinati, a opté pour un tableau différent qui sort de l'ordinaire en reléguant la personne des candidats au deuxième plan au profit d'un plan d'action au service des citoyens.
C'est sur la corniche de Beyrouth, au niveau de Aïn Mreissé, dans un espace à ciel ouvert, où toutes les couches sociales se mêlent sans aucun complexe, que les jeunes militants et activistes de Beyrouth Madinati ont décidé d'annoncer lors d'une conférence de presse hier leur liste de candidats à la municipalité de Beyrouth pour 2016.
Sous un soleil de plomb, deux semaines avant les élections et après un travail acharné sans interruption d'un millier de militants durant quatre mois, le temps est venu de dévoiler cette liste tant attendue de candidats qui promettent avec assurance de « provoquer une brèche dans le mur du laxisme et de la corruption politiques et administratifs qui encercle la capitale ». C'est « une chance à saisir, ou peut-être votre dernière chance de pouvoir changer le paysage de votre capitale et de la protéger pour qu'elle reste la vôtre », souligne Carole Chebli Tuéni, une candidate de la liste de Beyrouth Madinati, dans son introduction à l'adresse d'une assistance enthousiaste et conquise d'avance.

« Nous avons choisi cet endroit exprès, car il est le seul qui nous a été laissé pour avoir accès à la mer, nous sommes tous privés de voir notre mer et j'en suis triste », relève de son côté, indigné, le chanteur et compositeur Ahmad Kaabour, originaire et résident à Beyrouth, candidat lui aussi sur la liste de Beyrouth Madinati.
Cette année, une variable est venue bousculer les constantes bien enracinées des municipales orchestrées par une classe politique inactive et corrompue. La campagne électorale de Beyrouth Madinati est d'un autre genre, loin, même très loin, des partis politiques et de leurs listes-bulldozers, qui font fi des doléances des citoyens. Beyrouth Madinati est une idée qui a germé dans les esprits de quelques jeunes activistes de la société civile, proposant une liste de haut calibre réunissant autour d'une même table des architectes, des urbanistes, des médecins, des artistes, des enseignants, des ingénieurs, un pêcheur, une spécialiste en police criminelle et des chercheurs universitaires.

Avec en toile de fond le bleu turquoise d'une Méditerranée qui symbolise l'ouverture d'esprit et qui tend vers l'infini, Nadine Labaki, actrice et réalisatrice, candidate aux municipales, a exprimé pour sa part sa déception et son angoisse face à une réalité de plus en plus sombre. « Je suis terrifiée à la seule idée d'ouvrir les fenêtres de ma maison, nous sommes encerclés par les ordures et les moustiques. Il faut faire quelque chose, j'ai peur pour nos enfants, les miens, les vôtres, il faut que vous changiez ceci dans les urnes le 8 mai », dit-elle. « Derrière nous se tiennent des centaines de jeunes militants qui croient en un Liban différent, et nous sommes là grâce à eux et pour vous », ajoute la jeune réalisatrice. « À ceux qui disent que notre place n'est pas sur cette liste pour la simple raison que nous sommes des artistes, nous répondons : Oh que si ! Nous sommes les gardiens de l'âme de Beyrouth, Beyrouth la ville de tous, sans aucune exception », lancent tour à tour Ahmad Kaabour et Nadine Labaki.
« Cette liste formée de technocrates, de jeunes et de moins jeunes, auxquels peut s'identifier le citoyen ordinaire, propose un programme bien défini, consistant, ambitieux certes, mais qui laisse planer une lueur d'espoir que vous devez concrétiser car nous serons à votre service à vous, notre expertise sera mise à votre disposition et à la disposition de la capitale, tous quartiers confondus, et non pas au service d'une classe politique stérile », souligne le chef de file de la liste, l'architecte et urbaniste Ibrahim Mneimné.
« Il ne s'agit pas d'un combat entre forces politiques, mais d'un combat politique par excellence », poursuit-il. « Notre programme est un combat contre sa (NDLR : le conseil municipal actuel) mauvaise gestion. Un combat pour des transports publics, des jardins publics, le parc de Beyrouth, la défense de ce qui reste de la façade maritime de la capitale et de son héritage, un combat pour l'eau potable, pour des aménagements aux personnes à mobilité réduite, pour le droit des habitants à vivre dans la capitale. Voilà notre combat », a expliqué M. Mneimné.


(Voir aussi : Micro-trottoir spécial Municipales 2016 : A Beyrouth, les électeurs entre colère, lassitude et dégoût)

 

Un combat précurseur
Convaincus que le scrutin prévu pour le 8 mai prochain aura lieu et qu'il constituera sans aucun doute un tournant décisif, les militants de cette campagne n'ont pas chômé depuis plusieurs mois. Enchaînant rencontres, débats, enquêtes, distributions de tracts dans tous les quartiers de la capitale qu'ils ont visités, ils affirment avoir pu stimuler les habitants à participer aux élections, étape incontournable pour changer l'équipe aux commandes de la municipalité de Beyrouth. S'ils réussissent dans leur combat, ces militants volontaires sont confiants dans le « rôle que peut jouer la capitale comme précurseur pour les autres régions libanaises ».

C'est donc cette fois-ci une équipe soudée, enthousiaste, fraîche, jeune, sage, honnête et intègre, dans un cadre politique, pour le moins qu'on puisse dire, noir et à l'odeur nauséabonde, qui avance main dans la main en affichant une détermination à la fois farouche et contagieuse. Une liste formée à égalité de douze femmes et de douze hommes représentatifs de la société beyrouthine et de ses confessions.
« Pour moi, c'est très simple, je rêve d'une ville accueillante pour les personnes à besoins spéciaux et handicapées. Ce n'est pas trop demander d'aménager des passages et des trottoirs qui nous permettent de circuler librement sans devoir demander de l'aide pour être portés lorsqu'on rencontre des obstacles durant notre déplacement », explique Amale Chérif, directrice artistique, recevant les félicitations de ses amis sur sa chaise roulante.
« Je rêve que mon association, Donner sang compter (DSC), cesse d'exister et que l'État prenne en charge les malades en manque de sang en plus d'autres questions vitales qui ne sont assurées au pays que grâce à l'effort individuel de jeunes activistes bénévoles de la société civile », souligne de son côté à L'Orient-Le Jour Yorgui Teyrouz, pharmacien, fondateur de cette ONG et l'un des plus jeunes candidats de la liste. « Je crois au changement, du moins au niveau de Beyrouth, et nous allons y arriver car je sens le soutien et l'enthousiasme des habitants que nous avons rencontrés », reprend-il.

Pour Farah Kobeissi, la benjamine de la liste Beyrouth Madinati, activiste et chercheuse à l'Université américaine de Beyrouth, il était primordial de former cette liste pour initier un changement et essayer de trouver une échappatoire à cette ambiance de désespoir généralisé, surtout auprès des jeunes. « Il ne s'agit pas de nous, les 24 candidats, mais de tout un projet en gestation depuis plusieurs années et dont l'objectif est de transformer cette anarchie dans laquelle baigne la capitale, nous entraînant inévitablement avec elle », reprend la jeune femme au sourire énergique.
Une autre candidate, Rita Maalouf, experte en police criminelle, fait partie de cette campagne car elle tient à tout prix « à améliorer le paysage de la capitale et faire profiter son pays de son expertise acquise aux États-Unis. J'ai pris la décision de rentrer dans mon pays et je tiens maintenant à participer au changement avec toute l'équipe », explique la jeune femme.

Une chose est sûre et palpable au niveau de la rue, c'est que cette campagne a été brillamment réussie et qu'elle a, heureusement pour les électeurs même les plus désabusés, débouché sur une liste impressionnante de candidats expérimentés, intègres et prêts à servir corps et âme. À bon électeur beyrouthin, salut !

 

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commentaires (4)

« Beyrouth Madinati », un rêve que seuls les électeurs peuvent transformer en réalité le 8 mai CONTRE LE CAUCHEMAR URBAIN HERISSEE DE BLOCS D'ACIER ET DE BETON,LE REVE DU CHANGEMENT ET DU RETOUR A L'ESPACE VERT. POURVU QUE LES NOUVEAUX /URBANISTES CANDIDATS NE SOIENT CONTAMINEES/INFECTEES PAR L'ESPRIT DU BUSINESS SI CARACTERISTIQUE DE LA SINISTRE SOLIDERE QUI 25 ANS APRES CONTINUE A RASER/ECRASER LES ESPACES VERTS ET BETONNE LA MERRR.

Henrik Yowakim

16 h 25, le 23 avril 2016

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Commentaires (4)

  • « Beyrouth Madinati », un rêve que seuls les électeurs peuvent transformer en réalité le 8 mai CONTRE LE CAUCHEMAR URBAIN HERISSEE DE BLOCS D'ACIER ET DE BETON,LE REVE DU CHANGEMENT ET DU RETOUR A L'ESPACE VERT. POURVU QUE LES NOUVEAUX /URBANISTES CANDIDATS NE SOIENT CONTAMINEES/INFECTEES PAR L'ESPRIT DU BUSINESS SI CARACTERISTIQUE DE LA SINISTRE SOLIDERE QUI 25 ANS APRES CONTINUE A RASER/ECRASER LES ESPACES VERTS ET BETONNE LA MERRR.

    Henrik Yowakim

    16 h 25, le 23 avril 2016

  • Bien que pas beyrouthine, un grand bravo aux 24 membres de la liste de "Beyrouth Madinati"! Que votre exemple serve d'inspiration à toutes les régions libanaises! Beyrouth et le Liban méritent une nouvelle sève humaine capable de faire renaître leur splendeur d'autrefois! Mes respect, et mes félicitations!Je vous souhaite un plein succès dans vos efforts! Bonne chance!

    Zaarour Beatriz

    16 h 11, le 23 avril 2016

  • Oui à la restauration, la redécouverte, l'aménagement de l'espace public beyrouthin: décliner et mettre en œuvre ses aménités peut servir de socle au renouveau du Liban! Bravo!

    Beauchard Jacques

    09 h 16, le 23 avril 2016

  • Bravo pour cette initiative. Vous avez mon vote. Good Luck!

    Aref El Yafi

    08 h 55, le 23 avril 2016

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