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Liban - Décryptage

Quatre facteurs pourraient conduire à un report des municipales

Joumblatt à « L'Orient-Le Jour » : Je ne vois aucune raison de reporter les élections.

Les élections municipales pourraient-elles être compromises ? Des rumeurs circulent déjà, sur fond de polémiques autour de grands dossiers de corruption, notamment celle qui oppose depuis quelque temps le camp du député Walid Joumblatt, président du Parti socialiste progressiste (PSP), au ministre de l'Intérieur Nouhad Machnouk, sur fond de licenciement du chef de la police judiciaire et de la nomination d'un autre. Sans compter les litiges autour d'Internet illégal, et d'autres dossiers explosifs...
D'aucuns n'hésitent pas à franchir le pas et accuser notamment le leader druze de vouloir, à travers ces multiples fronts ouverts avec le courant du Futur et d'autres, arriver à un report pur et simple des élections municipales, prévues pour mai. À L'Orient-Le Jour, M. Joumblatt affirme qu'« il n'existe aucune relation entre les élections municipales et les polémiques autour des dossiers de corruption », ajoutant qu'il « répondra calmement à ces polémiques demain (aujourd'hui) ». À la question de savoir s'il estime qu'il existe un risque de report des élections, il répond : « Je ne vois aucune raison de reporter les municipales. »

De son côté, une source du ministère de l'Intérieur affirme à L'OLJ que « les préparatifs pour le scrutin électoral vont bon train », insistant sur le fait que « le ministère n'est concerné ni de près ni de loin par les rumeurs de report ». Pour preuve, selon cette source, « le ministère a annoncé (hier) qu'il a créé un numéro d'urgence (hotline), le 1766, pour recevoir les plaintes et répondre aux interrogations des électeurs », ajoutant que « la version finale du site Internet dédié aux élections municipales sera mise en ligne dès la fin de la semaine ».
Répondant aux fuites et déclarations dans les médias concernant un possible report des élections pour des raisons de sécurité ou autres, cette source « réitère la position du ministère, qui est celle de demander à toute force politique prônant le report des élections de présenter sa requête au Parlement et non au ministère de l'Intérieur, qui, lui, est plongé dans les préparatifs ».

 

(Vidéo : Dans les rues de la capitale, Beyrouth Madinati remet le débat public à l'honneur )

 

« Prétexte »
Au-delà de ces discours rassurants et vu les rumeurs insistantes, qu'est-ce qui pourrait bien conduire à un report des élections municipales ? Une source bien informée recense quatre facteurs possibles à prendre en compte : d'une part, dit-elle, il existe un véritable souci sécuritaire, contre lequel le président français François Hollande a mis en garde lors de sa récente visite au Liban, le week-end dernier. Un risque sécuritaire lié aux récents troubles constatés dans les différents camps palestiniens, qui pourraient servir de base à certaines parties désireuses de provoquer une discorde au Liban.
Le deuxième facteur est politique : les polémiques entre parties politiques qui se sont enflammées ces dernières semaines (voir plus haut) pourraient, selon cette source, servir de préambule à un report des élections, en raison du climat de tension qu'elles instaurent. Surtout si, comme dans le litige autour du département de la Sécurité de l'État, elles prennent une tournure confessionnelle.
Le troisième facteur est purement électoral : si, dans certaines villes « sensibles », aucun accord pour des listes consensuelles n'est trouvé, certaines forces politiques préféreront que les élections n'aient pas lieu du tout. À Beyrouth, Tripoli, Saïda ou encore Zahlé, notamment, l'équilibre confessionnel pourrait être rompu au niveau des membres des conseils, un équilibre qui n'était assuré qu'en vertu de coutumes et non en vertu de la loi, toujours selon cette source.
Enfin, le dernier facteur est juridique : certains, comme le député Nicolas Fattouche, soutiennent qu'une prorogation du mandat des moukhtars s'impose, puisque leur mandat expire le 2 mai (alors que les élections ne commencent que le 8), étant donné que ces élus ont une mission essentielle auprès des citoyens (papiers pour passeport, attestations...). Si, selon la source interrogée, cette question est soulevée au Parlement, elle risque de provoquer la revendication d'une prorogation des mandats des conseils municipaux aussi, ce qui pourrait servir de prétexte à un report des élections.

« Prétexte » est un mot qui sied bien à la situation. Les parties politiques sont-elles nombreuses à vouloir que les élections municipales se tiennent à temps ? La réponse, selon plusieurs sources concordantes, est plus négative que positive. Selon la source précitée, « certains leaders politiques, comme Walid Joumblatt ou le président du Parlement Nabih Berry, craignent les effets de l'alliance entre le Courant patriotique libre (CPL) et les Forces libanaises (FL) ». « Nabih Berry, notamment, pourrait redouter une victoire significative du camp du député Michel Aoun, qui pourrait pousser ce dernier à consolider son leadership et revendiquer la tenue d'élections législatives (reportées à deux reprises), en vue du scrutin présidentiel, poursuit-elle. En effet, si les élections municipales ont lieu, qu'est-ce qui empêchera la tenue d'élections législatives ? » Pour d'autres leaders et partis, le moment ne serait pas bien choisi pour une élection populaire, comme c'est le cas, toujours selon cette source, de l'ancien Premier ministre Saad Hariri, « qui fait face à des campagnes farouches », ou encore le Hezbollah, « dont l'assise populaire est moins motivée et soudée depuis son implication dans la guerre en Syrie ».


(Lire aussi : Le tandem CPL-FL s'active et conforte son alliance en prévision des municipales et plus encore)

 

« Un climat de changement »
Que pense la société civile de ces développements ?
Mona Harb, professeure d'études urbaines à l'AUB, estime que les initiatives de formation de listes civiles, non liées à des partis et non tributaires des équilibres politico-confessionnels, ont pu inquiéter les partis traditionnels.
« Ces partis n'étaient pas conscients, je crois, du fait que les élections municipales pouvaient être vues par le public comme un facteur de changement et une motivation pour les initiatives civiles, dit-elle à L'OLJ. Je crois qu'ils y avaient vu un bon exutoire pour le mécontentement populaire et ont été surpris des tentatives de créer des listes avec des programmes. Nous avions d'ailleurs déjà constaté cette lecture faussée des capacités de la société civile, lors de l'émergence d'un mouvement civil parallèlement à la crise des déchets (en été). En fait, les autorités n'approuvent la société civile que quand celle-ci est divisée, non quand elle forme des groupes et qu'elle se politise, parce qu'elle risque d'ôter toute légitimité à ce régime. »
Malgré tout, Mona Harb continue de penser que les élections auront lieu dans les délais. « Rien n'indique pour l'instant qu'il y aura report », dit-elle, estimant que la société civile ne tient pas compte de ces rumeurs.

 

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commentaires (4)

GOUPIL... LE CAMELEON... LE BARBU... LE PARAVENT...

LA LIBRE EXPRESSION

16 h 21, le 21 avril 2016

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Commentaires (4)

  • GOUPIL... LE CAMELEON... LE BARBU... LE PARAVENT...

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 21, le 21 avril 2016

  • JOUMBLATT, BERRI...., BERRI JOUMBLATTT. JOUMBLATT BERRI, BERRI JOUMBLATT ..............

    Gebran Eid

    14 h 20, le 21 avril 2016

  • "...En fait, les autorités n'approuvent la société civile que quand celle-ci est divisée, non quand elle forme des groupes et qu'elle se politise, parce qu'elle risque d'ôter toute légitimité à ce régime..." Voilà, en clair, les raisons de tous les reports d'élections chez nous: notre "régime" en craint les résultats, voyant qu'une partie de notre société commence à réfléchir...et compare avec ce qui se passe dans les pays vraiment démocratiques qui se respectent ! Alors que chez nous, au Liban, on nous ressert continuellement les mêmes "NULS" ayant depuis longtemps dépassé la date-limite de consommation... On en a la nausée et on les vomit ! Irène Saïd

    Irene Said

    11 h 10, le 21 avril 2016

  • Un pays mascarade pour des dirigeants corrompus , impossible de voir donc un brin d'espoir.

    Sabbagha Antoine

    08 h 10, le 21 avril 2016

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