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"Combien d'autres corps faudra-t-il enterrer ?"

Un pasteur pakistanais a passé le lundi de Pâques à enterrer des victimes de l'attentat anti-chrétien ayant frappé la veille un parc bondé de Lahore.

"Je suis épuisé d'enchaîner les enterrements. J'ai mal, ma tête me fait souffrir", soupire un pasteur après avoir célébré six messes de funérailles, au lendemain de l'attentat suicide ayant endeuillé des dizaines de familles pakistanaises alors qu'elles profitaient d'une douce soirée de printemps en ce dimanche de Pâques. AFP / ARIF ALI

Shakeel Anjum n'a pas eu le temps de savourer les fêtes pascales. Ce pasteur pakistanais a passé le lundi de Pâques à enterrer des victimes de l'attentat anti-chrétien ayant frappé la veille un parc bondé de la ville de Lahore (est).

Il dit sa douleur et ses interrogations : "jusqu'où cela va-t-il aller? Combien d'autres corps nous faudra-t-il enterrer?" "Je suis épuisé d'enchaîner les enterrements. J'ai mal, ma tête me fait souffrir", soupire-t-il, la voix éteinte après avoir célébré six messes de funérailles, au lendemain de l'attentat suicide ayant endeuillé des dizaines de familles alors qu'elles profitaient d'une douce soirée de printemps en ce dimanche de Pâques.
Le kamikaze a déclenché sa charge près des balançoires, faisant 72 morts, dont un grand nombre d'enfants, et des centaines de blessés. La faction des talibans pakistanais qui a revendiqué l'attentat a indiqué avoir visé délibérément la communauté chrétienne.

Les six victimes enterrées lundi par M. Anjum vivaient dans deux blocs du quartier de Youhanabad, indique-t-il à l'AFP, une Bible reliée de noir dans les mains. "Nous sommes une communauté tellement aimante dans ce pays, le Pakistan", dit-il au sujet de la minorité chrétienne, qui représente 1,6% à 2% des habitants de cette République islamique de 200 millions d'habitants, majoritairement sunnites.
Les chrétiens sont fréquemment victimes d'attaques au Pakistan, où un double attentat-suicide lors d'une messe avait notamment fait 82 morts à Peshawar en 2013, et des attaques contre des églises avaient coûté la vie à 17 personnes de Lahore en 2015.

Victimes récurrentes de discrimination, ils vivent également sous la menace d'être taxés de blasphème, un chef d'accusation souvent détourné pour régler des comptes personnels, selon les défenseurs des droits de l'homme.
"Nous avons bien besoin de consolation", estime le pasteur Anjum, de la Chapelle des enfants à Youhanabad. "Nous sommes las, inquiets, nous avons peur. Nous prions que ce pays soit sûr. Nous sommes Pakistanais, nous aimons le Pakistan", explique-t-il.

Les chrétiens ont été particulièrement peinés de cette attaque qui a entaché la fête de Pâques, marquant la résurrection de Jésus selon la tradition chrétienne. Mais les victimes sont aussi musulmanes, souligne le pasteur. "Nous sommes tous frappés par cela, chrétiens comme musulmans".
Parmi les victimes enterrées lundi, Mutahir Javed, la vingtaine. "Il est mort juste devant moi", raconte son père à l'AFP, alors que les proches sanglotent pendant les funérailles. "J'ai essayé de faire un massage cardiaque à mon fils, et de le réanimer, mais il était parti".

Le père Anjum a également enterré Salamat Masih, un autre jeune âgé d'une vingtaine d'années, dont la mère effondrée devait être soutenue par des femmes de la famille. "Mon fils, mon fils, personne ne devrait enterrer son fils", se lamentait-elle. "Faire autant d'enterrements, c'est mon travail, mais mon cœur ne se sent pas bien", dit l'homme d'église. Quand on devient pasteur "on ne pense pas aux funérailles. On pense à la Bible et à transmettre son message au monde, un message de vie, pas de mort. C'est très difficile", soupire-t-il.

 

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