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Moyen Orient et Monde - Dossier spécial - Focus

Topographie de ces houthis qui continuent de défier l’Arabie saoudite

Des partisans du mouvement chiite houthi paradent à Sanaa, le 29 août 2014, affichant un portrait d’Abdul-Malik al-Houthi. Khaled Abdullah/Reuters

Un an après l'offensive « Tempête de la fermeté » menée par l'Arabie saoudite, les rebelles houthis poursuivent leur lutte contre le gouvernement et les forces loyales au président Abd Rabbo Mansour Hadi. Qui sont-ils ? Que veulent-ils ? Qui sont leurs alliés?

Qui sont-ils ?
Les houthis tiennent leur nom de leur dirigeant principal et chef spirituel Hussein Badreddine el-Houthi. Ce n'est qu'à la mort de son leader en 2004, tué lors d'un commando des forces armées yéménites, que le groupe « rebelle » décide de porter son nom. Depuis sa formation en 1992, ce groupe politique – Ansarullah (partisans de Dieu) –, religieux et armé, s'est inscrit en désaccord total avec le pouvoir en place. Alors que plus de 60 % de la population yéménite est sunnite, les houthis sont issus de la forte minorité chiite, vivant essentiellement dans les régions montagneuses au nord-ouest du pays, à la frontière avec l'Arabie saoudite, et plus particulièrement de la branche zaydite. Ces croyants reconnaissent Zayd (Zayd ibn Ali as-Sajjad) comme cinquième et dernier imam. L'imamat zaydite, millénaire, perdurera jusqu'en 1962, date de la révolution républicaine. Comme le rappelle François Burgat, directeur à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman (Iremam) à Aix-en-Provence, « cette communauté a constitué pendant plus de mille ans l'aristocratie religieuse et politique régnante du Yémen ». Les zaydites se réclament d'un chiisme arabe, éloigné du chiisme iranien duodécimain.
Notons par ailleurs la présence au Yémen d'une autre obédience du même courant chiite, les Ismaéliens.

Que veulent-ils ?
Si certains les accusent de vouloir étendre leur territoire et de rétablir un imamat zaydite au nord du pays, ils s'en défendent en assurant vouloir « lutter contre la corruption » et contre « l'extrémisme sunnite ». Dans le contexte de l'après-11 septembre 2001, les houthis se sont montrés extrêmement virulents envers la politique américaine au Moyen-Orient, irritant les autorités yéménites, partenaires des États-Unis dans la lutte antiterroriste.
« Dieu est grand, mort à l'Amérique, mort à Israël, malédiction aux juifs, gloire à l'islam. » Tels seront les slogans scandés après l'invasion américaine en Irak par les partisans houthis lors de manifestations que tenteront de mater virulemment les autorités. Selon Samy Dorlian, spécialiste du Yémen, l'origine du soulèvement remonte au 17 janvier 2002, lorsque dans la province de Saada, Hussein al-Houthi, député de 1993 à 1997 du Hizb el-Haq, donne une conférence au cours de laquelle il incite ses compatriotes à combattre l'hégémonie américaine sur le monde arabe et musulman.

Affirmant être victimes de discrimination religieuse de la part d'intégristes sunnites, et insatisfaits des promesses énoncées par le président Ali Abdallah Saleh suite à la guerre civile de 1994, les rebelles prennent les armes, déclenchant ainsi la guerre du Saada en 2004. La mort de leur chef Hussein Badreddine al-Houthi ne va pas permettre pour autant l'arrêt du conflit. En 2009, l'opération « Terre brûlée » ne permet pas au gouvernement, aidé de l'Arabie saoudite, de réprimer la rébellion zaydite. Ainsi, les houthis ont été engagés, de 2004 à 2010, dans six guerres contre le régime d'Ali Abdallah Saleh, contraint de quitter le pouvoir en 2012, mais devenu en 2014 leur allié. « Se souvenant qu'il est lui-même issu d'une tribu zaydite, il a mobilisé, pour se venger, l'arme de la division sectaire », explique François Burgat.
Marginalisés et violemment réprimés par l'ancien président, les houthis ont profité d'une situation d'instabilité pour s'emparer de la capitale et étendre leur pouvoir. Ils sont, selon l'expression de Samy Dorlian, passés d'une situation de « plutôt opprimés à plutôt oppresseurs ». S'ils n'ont sans doute pas les moyens de dominer tout le pays, ils se sont imposés comme la principale force sur la scène politique yéménite.

Qui sont leurs alliés ?
Après les avoir combattus férocement entre 2004 et 2010, l'ancien président Ali Abdallah Saleh est contraint de quitter le pouvoir en 2012. Mais il revient sur le devant de la scène deux ans plus tard, fort d'une alliance avec ses ennemis d'hier : les houthis. Cette alliance de circonstance va leur permettre de s'emparer de la capitale yéménite en septembre 2014. En janvier 2015, c'est le palais présidentiel qui tombe, provoquant la fuite du président Abd Rabbo Mansour Hadi en Arabie saoudite. Sans le soutien d'Ali Abdallah Saleh et des forces armées qui lui sont restées fidèles, l'ascension fulgurante des rebelles houthis n'aurait pu se faire. Mais leur coalition improbable est allée de pair avec leur aversion pour le parti islamiste al-Islah, affilié aux Frères musulmans.
Leurs opposants les comparent souvent au Hezbollah libanais et estiment qu'ils sont au service des ambitions politiques de Téhéran. Selon un rapport confidentiel d'experts de l'Onu, communiqué au Conseil de sécurité en avril 2015, l'Iran livre des armes aux rebelles chiites depuis au moins 2009. Mais la relation entre Téhéran et les houthis n'est pas pour autant comparable à celle qu'entretient l'Iran avec le Hezbollah. Les houthis restent indépendants sur les plans politique et religieux, mais les bombardements de la coalition saoudienne ont contribué à renforcer les liens qui unissent ces houthis à Téhéran.

Sources :
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-moyen-orient/houthis-saleh-freres-musulmans-leur-role-dans-la-crise-au-yemen_1666499.html


Samy Dorlian, « Les partisans d'al-Hûthi au Yémen : de plutôt opprimés à plutôt oppresseurs »
http://www.lorientlejour.com/article/917898/les-houthis-en-cinq-questions.html

 

 

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