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Moyen Orient et Monde - Portrait

Hassan Rohani, un « cheikh diplomate » ambigu

Réformateur bien que proche du guide, ouvert sur le monde bien qu'héritier de la révolution de 1979... Retour sur le parcours personnel et politique du président iranien.

Le président Hassan Rohani, élu en 2013, a obtenu des puissances étrangères la levée des sanctions économiques. Photo archives AFP

Il avait la clé. Cette petite clé en or qu'il agitait des mois durant comme symbole de campagne. Elle devait ouvrir l'Iran au monde. Il voulait en finir avec le pouvoir qui imposait « des restrictions dans la vie des gens ». C'était le 14 juin 2013, Hassan Rohani accédait à la présidence de la République islamique d'Iran, porté par les 50,7 % de voix acquises dès le premier tour. L'enfant de Sorkheh, village situé à l'est de Téhéran, s'est affirmé progressivement comme un « cheikh diplomate », surnom acquis quand il était le négociateur du dossier nucléaire iranien entre 2003 et 2005, pragmatique et modéré.
Rohani signifie « clerc » en persan. La route des études religieuses est ainsi toute tracée pour ce fils d'épicier, qui rejoint le séminaire de Qom, la ville sainte, à l'âge de 13 ans. Dans les années 1960, comme beaucoup, le jeune religieux est rapidement séduit par les idées révolutionnaires de l'ayatollah Khomeyni, exilé en Irak. Désormais mollah, il entre à l'Université de Téhéran, pour suivre une formation en droit qu'il complétera à Glasgow en Écosse. De retour dans son pays natal, en 1975, son engagement politique prend forme dans la lutte contre le chah. Il prêche activement dans les mosquées et n'hésite pas, de Téhéran à Ispahan, à octroyer le titre d'imam à l'ayatollah, c'est-à-dire le guide de la communauté. Il est le premier à le faire. Durant la révolution, il fait partie des jeunes qui préparent le retour d'exil de Khomeyni, qui l'entourent.

 

(Commentaire : À travers Gholam Ali Haddad Adel, la haine médiatique face aux néo-principalistes iraniens)

 

« Il était très apprécié des Occidentaux »
Proche du guide Ali Khamenei, conciliant et mesuré, Hassan Rohani devient familier des plus hauts arcanes de la République. Que ce soit en tant que responsable des forces aériennes durant la guerre Iran/Irak, ou bien comme chargé de la cellule idéologique de l'armée, il se spécialise dans les problématiques de sécurité et de défense. C'est précisément ces qualités que le président Mohammad Khatami vient chercher lorsqu'il le nomme négociateur en chef sur le dossier nucléaire, en 2003. François Nicoullaud, alors ambassadeur de France à Téhéran (2001-2005), raconte à L'Orient-Le Jour : « Il était très apprécié des Occidentaux dans la gestion du dossier. Au début de la négociation, c'est un homme qui n'avait pas d'expérience particulière de la diplomatie et des étrangers en général. Il avait vécu à l'intérieur du système. Cela montre son intelligence, il s'est ouvert et a compris l'enjeu du dossier et la nécessité de compromis. Il s'est très bien inséré dans le jeu diplomatique et conduisait ce dossier avec beaucoup de maîtrise. C'était un bon interlocuteur. Loyal, facile, il allait au fond des choses. » En 2005, il obtient du guide la suspension de l'enrichissement d'uranium ; l'accord avec les Européens n'est pas loin... Mais ce n'est pas pour tout de suite ! L'ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad remporte les élections à la surprise générale et interrompt toute négociation. Le mollah désormais diplomate est congédié.
C'est en candidat d'une large coalition, unissant modérés et réformateurs, que Hassan Rohani revient sur le devant de la scène en 2013. « Il ne se voyait pas comme président, mais plutôt comme soutien de (l'ancien président) Rafsandjani. Comme ce dernier a été disqualifié par le Conseil des gardiens, il s'est retrouvé au premier rang pour incarner les espoirs de changement », confie M. Nicoullaud.

 

Deux leaders politiques toujours en résidence surveillée
Trois ans après, 55 millions d'électeurs sont appelés à sanctionner cet espoir. Hassan Rohani a-t-il redressé le
pays ? A-t-il répondu aux attentes ? C'est la réponse qui sera donnée par les Iraniens à l'issue du scrutin législatif qui se tient aujourd'hui, à travers le pays. Ce sera le premier écho politique à l'accord historique sur le nucléaire, entré en vigueur à la mi-janvier 2016. Que la route a été longue pour celui qui a entamé les négociations avec l'Europe en 2002. Quatorze ans, c'est le temps qu'il lui aura fallu pour parvenir à son objectif.
Fruit de sa persévérance, l'accord nucléaire existe aussi grâce aux qualités relationnelles du président. À la différence de Hachémi Rafsandjani, il a toujours pris soin d'entretenir de bonnes relations avec le guide suprême. « Les deux hommes s'estiment. Ils se respectent. Ils ne sont pas sur la même ligne sur certains sujets, mais l'ayatollah voit en Hassan Rohani un homme loyal à la République islamique. Rohani, pour sa part, sait que le guide, malgré ses doutes personnels sur le dossier nucléaire, l'a soutenu loyalement, jusqu'au bout. Il l'a même imposé à son propre camp conservateur », selon l'ancien diplomate français. L'atout est de poids lorsque l'on sait l'étendue du pouvoir de Ali Khamenei sur l'ensemble des organes institutionnels.


En glissant leurs bulletins dans les urnes, les électeurs iraniens peuvent avoir un doute sur les capacités de Hassan Rohani à aller jusqu'au bout. Ce doute, c'est la promesse formulée durant la campagne de 2013 que davantage de libertés individuelles verront le jour. C'est le serment de la libération des prisonniers politiques. Hossein Moussavi et Mehdi Karroubi, leaders réformateurs de l'opposition, incarcérés en 2009, sont par exemple toujours en résidence surveillée. C'est l'amélioration du droit des femmes, de la liberté d'expression... Alors que le pays s'ouvre au monde à nouveau, ces questions vont se faire chaque jour plus pressantes, et Hassan Rohani devra répondre. Est-il le réformateur modéré que l'Occident appelle de ses vœux, ou bien le fils légitime et loyal de la révolution islamique ? Pragmatisme et modération, c'est la troisième voie que semble proposer Hassan Rohani aux Iraniens.

 

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Il avait la clé. Cette petite clé en or qu'il agitait des mois durant comme symbole de campagne. Elle devait ouvrir l'Iran au monde. Il voulait en finir avec le pouvoir qui imposait « des restrictions dans la vie des gens ». C'était le 14 juin 2013, Hassan Rohani accédait à la présidence de la République islamique d'Iran, porté par les 50,7 % de voix acquises dès le premier tour....

commentaires (4)

Il "terminera?", au mieux.... comme Khatamîîî !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

13 h 40, le 26 février 2016

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Il "terminera?", au mieux.... comme Khatamîîî !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    13 h 40, le 26 février 2016

  • UN HOMME DE BONNE FOI ET DE BONNES INTENTIONS... TOUJOURS LE SOURIRE AUX LEVRES... MAIS... QUE PEUT-IL DECIDER OU FAIRE DAMS LA MARRE DE FANATISME QUI L,ENTOURE, LE SURVEILLE ET S,IMPOSE A LUI ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 56, le 26 février 2016

  • ambigue comme GORBACHEV...designe pour sauver le systeme,il sera l artisan involontaire de son effondrement....

    HABIBI FRANCAIS

    12 h 54, le 26 février 2016

  • un GORBACHEV perse...voila e qu est ROHANI...

    HABIBI FRANCAIS

    11 h 14, le 26 février 2016

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