Un maronite, deux chiites, x sunnites, y druzes, et je ne sais combien de grecs-catholiques, de grecs-orthodoxes, d'alaouites, ou autres. C'est ainsi, désormais, que certains chefs politiques et religieux font le décompte des fonctionnaires dans l'administration publique, dans une volonté déclarée de dénoncer à cor et à cri la marginalisation des chrétiens dans la fonction publique. Ils accusent alors tel ministre de favoriser la communauté chiite, ou tel autre de complaisance envers la communauté sunnite... Ils remontent dans le temps et fouillent dans le passé. Le tout au détriment des chrétiens, disent-ils, pourcentages à l'appui.
Les réponses fusent, par médias interposés. Des statistiques sont publiées, de part et d'autre. Sont-elles seulement exactes ? Le débat s'envenime et s'invite dans la rue. Il en devient passionnel. Quoi de mieux pour mobiliser la rue qu'un discours populiste, qui attise la peur de l'autre et réveille les angoisses passées ? Mais, dans le fond, chacun sait pertinemment bien combien les chrétiens se détournent de la fonction publique.
Indiscutablement, la polémique frise le ridicule. Mais elle est surtout dangereuse. Car elle consacre la montée du discours confessionnel islamo-chrétien. Ce discours qui a ponctué les funestes rounds de la guerre libanaise, provoqué haines, massacres et enlèvements, au point d'entraîner tout un peuple dans une interminable spirale de violence, de destruction, de douleur. Et qui met une nouvelle fois en péril le vivre ensemble et l'appartenance à une même nation, en deux mots, l'identité libanaise. Au point d'ériger de nouvelles barrières, de nouveaux interdits, de nouveaux tabous aussi entre Libanais. Et de les faire régresser à une période qu'ils se sont juré de ne plus jamais revivre.
Les droits à préserver ? Ils sont légitimes certes. Comme sont légitimes les droits de chaque citoyen libanais, chrétien ou musulman, croyant ou athée, femme ou homme, citadin ou villageois, pauvre ou riche, à servir dans la fonction publique et à gravir les échelons sur base de ses compétences et de son acharnement à la tâche, et non pas comme homme de main d'un politicien véreux.
C'est à ce stade que la réforme se fait pressante, contre la corruption, le clientélisme et le gaspillage des deniers publics, pour ne citer que ces quelques points.
Mais dans l'attente, que se taisent, de grâce, les oiseaux de mauvais augure qui jouent sur les craintes populaires et ravivent les tensions confessionnelles...
Pour mémoire
Zeaïter se défend à son tour contre les soupçons de déséquilibre communautaire
Bkerké met en garde contre toute discrimination dans la fonction publique
commentaires (4)
La conférence de soutien aux pays d'accueil des réfugiés a décidé de verser deux milliards de dollars aux pays concernés dont le Liban... Allez les corrompus de tout poil au gouvernement et ailleurs, la manne arrive !
Un Libanais
14 h 31, le 06 février 2016