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Liban - Entretien

Le PM islandais à « L’OLJ » : Le Liban subit noblement, mais injustement, le flux des réfugiés

Le Premier ministre d’Islande.

Le Liban est sûr d'avoir l'Islande comme allié à la Conférence des donateurs de Londres, qui se poursuit jusqu'à aujourd'hui. Petit pays en terme démographique, qui commence à se remettre du « choc » de la crise financière de 2008, son appui au Liban n'en est pas moins efficace. Ainsi, en janvier dernier, l'Islande a entamé une procédure d'accueil graduel de réfugiés syriens, choisis exclusivement parmi ceux qui sont enregistrés auprès du Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) dans des camps libanais.
Particulièrement sensible à la détresse du Liban – sans doute « par affinité pour les petits pays », dit-il –, le Premier ministre islandais, Sigmundur Davíð Gunnlaugsson, est aussi « fasciné par la résilience et la dignité des Libanais face à la crise ».
Il a ainsi tenu à passer par Beyrouth – à l'exclusion des autres pays du voisinage – avant de se rendre à Londres. L'Islande fournit déjà une aide aux camps de réfugiés palestiniens au Liban ainsi qu'à la Croix-Rouge. La tournée du Premier ministre, lundi et mardi derniers, a inclus d'ailleurs le camp de Chatila, en plus du siège de la Croix-Rouge à Chehim.
Reçu en outre par le Premier ministre et le président de la Chambre, il révèle qu'il a informé ses interlocuteurs de son intention de s'exprimer « au nom du Liban auprès des donateurs ».


(Lire aussi : Derbas : Le Liban compte demander onze milliards de dollars sur cinq ans)

Décisions « contre-productives »
Dans une interview exclusive à L'Orient-Le Jour, M. Gunnlaugsson dénonce une « injustice » à l'égard du pays du Cèdre. « Il est illogique, voire dangereux, que la Turquie bénéficie d'un accord spécial avec l'Union européenne, et pas le Liban », souligne-t-il, en référence à la déclaration UE-Turquie du 29 novembre dernier visant à contenir les demandeurs d'asile pour l'Europe, en contrepartie d'un réajustement des aides à la Turquie. Y aurait-il une volonté orientée dans ce sens chez les donateurs en ce qui concerne le Liban ? « Je l'espère », répond-il. Hier néanmoins, rien n'a semblé conforter ces espoirs à Londres.
Son approche de la crise des réfugiés est sous-tendue par les réserves qu'il oppose à l'Union européenne, aussi bien dans sa gestion de la crise sur son territoire que dans son aide aux pays d'accueil situés au voisinage de la Syrie. Il faut savoir que ces réserves sont dans ligne de la politique eurosceptique du Premier ministre islandais, issu du centre-droit, dont le gouvernement a décidé, en mars dernier, de retirer la candidature de l'Islande à l'Union européenne.

Pour lui, l'Union européenne « a pris certaines décisions contre-productives » dans sa réaction au flux des réfugiés. En effet, « certains pays de l'UE ont négligé la situation des réfugiés basés dans le voisinage de la Syrie et accepté en même temps d'accueillir des réfugiés arrivés illégalement sur leur territoire, ce qui a constitué une sorte de motivation pour les réfugiés de faire le long voyage clandestin vers l'Europe ». Une autre faille dont les pays de l'UE ont subi les retombées, « leur incapacité à coordonner leur mécanisme de réponse au flux des réfugiés sur leur territoire, ce qui a mis en péril le système Schengen et compromis inutilement les accords de Dublin ». Aujourd'hui, à l'heure où il est question de plans d'expulsion des réfugiés syriens par une Europe dépassée par la crise, M. Gunnlaugsson met en garde contre « un risque de nouvelles complications liées à l'expulsion, qu'aucun État européen n'a les moyens de contrer ». Parmi les facteurs qui compliquent la situation et que l'UE a manqué d'anticiper, « le fait que les réfugiés arrivés récemment en Europe ne sont que minoritairement syriens, d'autres nationalités ayant profité de l'ouverture des frontières pour se frayer une entrée sur le Vieux Continent ».

 

( Lire aussi : « Les réfugiées de Syrie sont exposées à l'exploitation et au harcèlement sexuel », selon Amnesty International )

 

« Heureux de les voir apaisés »
C'est « une approche globale de la crise des réfugiés » que le gouvernement islandais favorise. « Il s'agit non seulement de nous concentrer sur les réfugiés affluant vers l'Europe, mais surtout de soutenir les États limitrophes de la Syrie », dit-il. Si cette approche rejoint, sur le principe, la ligne directrice de la conférence de Londres, l'Islande a des moyens spécifiques de la mettre en œuvre.
« Au lieu d'accueillir les réfugiés sur la base d'un système de quotas, à l'instar des autres pays européens, nous avons décidé d'accueillir des réfugiés parmi ceux qui sont basés déjà dans des camps de réfugiés aménagés dans les pays voisins de la Syrie », explique-t-il. Il faudrait favoriser « la relocalisation des réfugiés enregistrés comme tels dans les pays de la région au lieu de permettre l'entrée des clandestins en Europe ». L'assistance aux pays d'accueil comme le Liban devrait obéir à deux enjeux, « le développement à long terme de l'infrastructure et l'élaboration d'un plan de retour des réfugiés lorsque cessera la guerre dans leur pays ».

 

(Lire aussi : « La marginalisation des réfugiés syriens, un facteur de déstabilisation sécuritaire », met en garde Nadim Houry)



L'Islande fournit un exemple minimaliste de cette politique. En début d'année, le Premier ministre Gunnalugsson s'était rendu en personne à l'aéroport pour souhaiter la bienvenue à six familles de réfugiés syriens, soit au total 35 personnes, arrivées d'un camp de la Croix-Rouge au Liban. « J'étais heureux de les voir ravis et apaisés. Et je suis certain qu'on prendra bien soin d'eux, surtout que de nombreux bénévoles se sont mobilisés à cette fin. »
Un autre groupe doit suivre prochainement. « Nous optons pour l'arrivée par petits groupes des réfugiés afin de faciliter leur adaptation au pays », souligne-t-il. Le premier groupe de réfugiés a été réparti sur trois municipalités, « qui avaient exprimé au préalable leur disposition à les accueillir ».
Sachant qu'une liste de réfugiés est transmise par le HCR, « notre politique est d'accueillir les réfugiés les plus vulnérables. Nous favorisons notamment ceux qui ont des besoins médicaux spéciaux », souligne-t-il.
Il reconnaît que le fait que l'Islande soit beaucoup moins convoitée par les réfugiés syriens que le reste des pays de l'UE facilite l'intégration graduelle, sans pour autant lui ôter son mérite. « Certains réfugiés ont décliné notre offre, mais cela ne nous offense pas. Nous sommes conscients que notre pays est très froid », dit-il sur un ton badin. Même si, conclut-il, « nous aussi avons beaucoup à apprendre des réfugiés... ».

 

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commentaires (2)

"Le Liban subit noblement...." ! Le Liban ! "Noblement" ? Il sort d'où çuilà ? Du fond du cratère de son "Eyjafjallajökull", ou quoi ? !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

15 h 34, le 04 février 2016

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Commentaires (2)

  • "Le Liban subit noblement...." ! Le Liban ! "Noblement" ? Il sort d'où çuilà ? Du fond du cratère de son "Eyjafjallajökull", ou quoi ? !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    15 h 34, le 04 février 2016

  • Pour faire une déclarations aussi lénifiantes...il faut surement avoir fait, des études dans une université de science Po.....

    M.V.

    10 h 11, le 04 février 2016

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