Depuis la conférence qu'il a tenue à Bickfaya le 22 janvier dernier, où il avait annoncé le refus de son parti d'élire un candidat porteur du projet du 8 Mars, le chef des Kataëb, Samy Gemayel, mène une campagne isolée de ses partenaires politiques et fondée sur quatre constantes : la « souveraineté absolue » du Liban, sa neutralité, la nécessaire entente autour d'une réforme du système, qui inclut un examen des failles du confessionnalisme, et enfin le respect de la Constitution, comme seule référence de la vie institutionnelle, à appliquer à la lettre et sans sélectivité.
C'est sur la base de ces quatre principes qu'il avait adressé une question commune à Michel Aoun et Sleiman Frangié relative à leur position par rapport au conflit syrien. Il avait en outre donné une lecture critique du document de Meerab : il avait entre autres posé la question de savoir si le vocable « groupes armés », dont il est question dans ce texte sous le volet du « contrôle de la situation à la frontière libano-syrienne », incluait le Hezbollah.
Lors d'une rencontre hier avec les médias à Saïfi, le jeune député rapporte qu'il n'a reçu jusqu'à ce jour « aucune réponse » à ses questions, ni de la part du Courant patriotique libre ni des Marada, en dépit de rencontres bilatérales régulières.
C'est toutefois un récent entretien accordé par le général Aoun au quotidien al-Akhbar, le 29 janvier dernier, qui lui a fourni une réponse sur la portée de la clause relative à la protection des frontières. « La formulation des dix points annoncés à Meerab reproduit celle de l'accord de fraternité, de coopération et de coordination (libano-syrien), en vertu duquel le Liban s'était engagé à ne servir de couloir ou de base à aucune force, entité étatique ou organisation qui seraient une menace à sa sécurité et celle de la Syrie », avait ainsi déclaré Michel Aoun, en ajoutant : « Pour ce qui est des armes de la résistance (du Hezbollah), c'est l'accord de Taëf qui en fonde la légitimité. »
Ainsi, « on sait désormais que le général Aoun a décidé d'exclure le Hezbollah de la référence aux groupes armés », constate Samy Gemayel. Mais le plus dangereux est que la confirmation de cette position du général Aoun conduit à se poser des questions sur celle de Samir Geagea concernant le Hezbollah, sinon à révéler les limites de l'entente CPL-FL. « Le chef des FL maintient-il sa position, celle qui inclut le Hezbollah dans la catégorie des groupes armés ? Ou y a-t-il une divergence sur la question ? » s'interroge le chef des Kataëb.
Le premier « grand test du sérieux de cette initiative » se fera le 8 février, date de la séance électorale. Le maintien du boycottage par les factions du 8 Mars « met en doute d'ores et déjà l'engagement du général Aoun en faveur des dix points de Meerab », qui incluent le respect de la Constitution. « Comment concevoir que les candidats à la présidentielle soient ceux qui boycottent la séance, et leurs électeurs ceux qui s'y rendent ? », ajoute-t-il, dénonçant ainsi l'ambivalence de l'appui, par des parties du 14 Mars, à des candidats du camp opposé.
Il accuse surtout ces parties de s'être « pliées devant le chantage dont elles font l'objet depuis dix ans » et de s'être « rendues à un axe diamétralement opposé, qui est l'axe syro-iranien ». « Cela s'appelle une capitulation », déplore-t-il.
Conscient que sa position risque de le marginaliser, il dit être prêt à l'assumer « jusqu'au bout ». Mais n'est-il pas paradoxal de dénoncer la capitulation du 14 Mars face au Hezbollah et de maintenir, en contrepartie, des canaux de communication avec le parti chiite ?
Le chef des Kataëb tend à minimiser la portée de ces contacts, qu'il serait erroné de qualifier de dialogue. Ces canaux sont établis depuis trois ans (après la tournée de l'ancien président de la République, Amine Gemayel, au Sud, ndlr) et se poursuivent à « une fréquence inchangée ».
Garder le contact avec le Hezbollah obéirait à la tendance des Kataëb à maintenir un lien avec toutes les parties. Il révèle toutefois l'impasse des échanges avec le parti chiite. « Il n'y a aucun point par lequel nous puissions percer actuellement. Le Hezbollah n'est pas prêt à changer son attitude à l'égard des autres. Nous attendons l'instant où il décidera de se libaniser, c'est-à-dire de se comporter comme une partie essentielle de ce pays. Notre but est de garder le lien avec lui, en attendant de pouvoir percer sur les fondamentaux », déclare Samy Gemayel. Du reste, ce qui se dit sur les velléités des Kataëb de se rapprocher du Hezbollah « s'inscrit dans le cadre d'une campagne médiatique visant à désavouer nos positions actuelles », conclut-il.
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commentaires (11)
Une citation que j'ai lue je ne sais plus où:"un homme Politique est celui qui s'intéresse aux prochaines élections. Un homme d'Était est celui qui s'intéresse aux prochaines générations". Que chaque électeur libanais réféchisse avant de voter, qu'il s'agisse de Municipales ou de Législatives...
Zaarour Beatriz
17 h 08, le 03 février 2016