Geagea : Nous étions à deux doigts du gouffre, une opération de sauvetage s’imposait

Dans le discours qu'il a prononcé pour annoncer le soutien de son parti à la candidature du chef du bloc parlementaire du Changement et de la Réforme, Michel Aoun, à la présidence de la République, le leader des Forces libanaises (FL), Samir Geagea, a expliqué les circonstances qui motivent sa démarche, ainsi que les principes de base sur lesquels reposent cette nouvelle alliance, avant d'inviter ses alliés au sein du 14 Mars à soutenir à leur tour la candidature de M. Aoun.
« La vacance présidentielle n'a que trop duré. La paralysie s'est étendue à pratiquement toutes les institutions, menaçant d'ébranler la souveraineté nationale et l'existence même de l'État au moment où la région vit ses pires moments », a déclaré d'emblée le chef des FL, soulignant « la fragilité de la situation locale au plan de la sécurité, la gravité de la crise des réfugiés syriens et l'épuisement de l'économie nationale ». « Nous étions dès le départ soucieux d'organiser la présidentielle dans les délais constitutionnels et nous avons pris part à toutes les réunions électorales, sans pouvoir mettre fin au vide. Nous étions à deux doigts du gouffre et il nous fallait une opération de sauvetage exceptionnelle », a poursuivi Samir Geagea.

Un programme présidentiel
Et d'annoncer : « Après de nombreuses discussions au sein du parti, les FL annoncent leur soutien à la candidature de Michel Aoun à la présidence de la République, dans l'espoir de sortir de la situation dans laquelle se trouve le Liban. Notre conviction selon laquelle cette démarche est opportune a été confortée par l'évolution positive de la relation entre le Courant patriotique libre et les Forces libanaises, notamment grâce à la déclaration d'intention signée en juin 2015 », dont il a rappelé les dix points, qui représentent, selon lui, les grandes lignes d'un programme présidentiel.
Ces dix points sont les suivants :
– Se conformer à l'accord de Taëf et respecter les dispositions de la Constitution, sans sélectivité aucune, loin des considérations politiques et de toute interprétation de ses clauses.
– Se référer aux principes en rapport avec la souveraineté pour approcher les questions liées à des dossiers régionaux ou internationaux.
– Renforcer les institutions de l'État et la culture du recours aux lois et non pas aux armes et à la violence, quelles que soient les appréhensions et les tensions.
– Soutenir l'armée au double plan moral et matériel et lui permettre ainsi qu'à l'ensemble des services de sécurité de traiter les questions de sécurité qui se posent au Liban dans la perspective d'une extension de l'autorité de l'État, seule et elle seule, sur l'ensemble du territoire national.
– Suivre une politique étrangère indépendante de manière à garantir l'intérêt du Liban et à respecter les résolutions internationales, en tissant des relations de coopération et d'amitié avec l'ensemble des États, notamment arabes (...), considérer Israël comme un État ennemi et rester attachés au droit des Palestiniens à retourner chez eux, en rejetant leur implantation.
– Contrôler toute la frontière libano-syrienne et empêcher que le Liban ne devienne une plate-forme pour le passage des armes et des éléments armés dans les deux sens.
– Respecter l'ensemble des résolutions internationales et se conformer auxChartes des Nations unies et de la Ligue arabe.
– Œuvrer pour mettre en application les résolutions adoptées lors de la conférence nationale de dialogue.
– Promulguer une nouvelle loi électorale tenant compte d'une parité et d'une représentativité authentiques, de manière à préserver la coexistence et à paver la voie à un rééquilibrage au sein des institutions de l'État.
M. Geagea a expliqué que ces points représentent le noyau d'un programme électoral, avant d'appeler ses alliés du 14 Mars et l'ensemble des Libanais à soutenir la candidature de M. Aoun, « d'autant que les points énoncés correspondent en grande partie au projet du 14 Mars et que nous espérons sortir de l'état de tension et de division pour entrer dans une nouvelle ère d'entente et de coopération, placée sous le signe du seul intérêt national ». Selon lui, « le cadre politique de cette candidature représente un point de rencontre entre les FL qui sont le fer de lance du 14 Mars et le CPL qui fait partie du 8 Mars, pavant ainsi la voie aux autres composantes des deux alliances de se retrouver autour des mêmes points ».
Il a assuré que son parti « ne prend pas ses décisions en réaction (à un quelconque développement) mais sur base des principes auxquels il croit, à savoir les principes de la révolution du Cèdre dans le cadre de laquelle les jeunes des FL et du CPL avaient lutté ensemble pour en finir avec la tutelle syrienne ».

Aoun : Une couverture envers tous les Libanais
Prenant à son tour la parole, le général Aoun a remercié les FL pour leur soutien à sa candidature, rappelant également « le combat commun » avec le parti de Samir Geagea « en faveur de la souveraineté et de la pérennité du pays ». Il a appelé les Libanais à « sortir du passé pour bâtir l'avenir » et à « tourner les pages sombres de notre histoire », espérant que l'élection présidentielle « aura lieu de manière saine dans un proche avenir ». L'ancien chef du CPL a promis de « servir de couverture à tous les Libanais d'autant que nous n'avons jamais agi de manière vindicative avec qui que ce soit, même lorsque nous étions en conflit avec certaines parties ». Le général Aoun a souligné son attachement à la coexistence islamo-chrétienne, rappelant que des chrétiens et des musulmans avaient été tués à ses côtés, à l'époque où il était commandant en chef de l'armée.