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Liban - Environnement

« Vous pensez vous en être débarrassés dans la nature, mais la mer n’en veut pas non plus... »

Campagne de nettoyage de la plage entre Nahr el-Kalb et Zouk, à l'initiative de plusieurs ONG.

Rania Bassil Eter, Émile Moukarzel et des jeunes volontaires ont pris d’assaut la plage dimanche matin. Photo RRT, «OLJ»

Le regroupement Women Uprising, créé à l'origine pour être un groupe de pression formé de femmes, a choisi hier dimanche un autre genre d'activité : participer en famille au nettoyage de la plage qui s'étend devant les complexes balnéaires de Holiday Beach jusqu'à Rimal. Une dizaine de femmes, de jeunes et des enfants qui ont accompagné leurs mères ont répondu présents à l'appel du groupe sur Facebook et à l'initiative lancée par Meher Khatcherian, en compagnie de Recycle Lebanon, une ONG à l'état embryonnaire, laquelle s'est fixé pour mission de devenir un hub pour toutes les ONG et associations environnementales et écologiques qui interviennent à un niveau ou à un autre dans le recyclage des déchets au Liban.

Bien que la plage soit parsemée de gros sacs de construction remplis de déchets bien triés et de plusieurs piles de pneus usagés soigneusement assemblés loin des eaux pour éviter qu'ils ne soient engloutis à nouveau et éparpillés, le nombre de volontaires reste timide.

« Tout ce que nous ne voulons pas, nous le jetons n'importe où, nous nous en débarrassons dans les fleuves, tout cela finira par rejoindre la mer, qui évidemment n'en veut pas non plus et nous le rejette à la moindre poussée de vent. Mais c'est la première fois en 20 ans que nous voyons autant de déchets, c'est catastrophique ! », explique Émile Moukarzel, ingénieur en télécommunications et volontaire en action depuis samedi avec les ONG.

(Lire aussi : Conventions, chiffres, principaux acteurs : une infographie pour comprendre l'exportation des déchets dans le monde)

Rania Bassil, cardiopédiatre et mère de trois enfants, debout sous un soleil de plomb avec un grand sac à la main, prend le temps d'écouter les explications de Jocelyne Kehdi, à la tête de Recycle Lebanon, concernant les différents types de déchets découverts sur le site pour savoir comment les répartir dans les différents gros sacs destinés au recyclage et qui seront pris ultérieurement en charge par des associations de recyclage locales. « J'ai beaucoup appris aujourd'hui, sur le plastique notamment, c'est une journée de sensibilisation par excellence ! », explique une jeune volontaire.

« Quelques heures, une fois par an... »

« Je vivais à Hawaï et j'ai tout laissé tomber pour rentrer au Liban qui est tout aussi beau que cette île paradisiaque. Nous avons tout autour de nous tous les ingrédients du bonheur, mais c'est la mentalité que nous devons changer afin de pouvoir gouter et préserver cette beauté, d'où l'importance que revêt ce genre d'événement », estime Jocelyne Kehdi.

« Les Libanais ne sont pas assez motivés pour nettoyer leur propre pays ou du moins arrêter de jeter leurs déchets en toute irresponsabilité », renchérit Corinne Chedraoui, propriétaire d'une académie pour enfants et fondatrice du groupe Women Uprising. « Nous sommes toutes et tous occupés, mais nous pouvons consacrer quelques heures une fois par an, pour ne pas dire une fois par mois, pour participer au nettoyage et au tri des déchets sur le littoral avec nos enfants, qui feront ainsi l'apprentissage des différents procédés de traitement des déchets », ajoute-t-elle.

(Lire aussi : Le bras de fer se poursuit autour de l'installation de Dhour Choueir)

Mirna Chidiac Saba, une jeune maman à la tête de sa propre compagnie et membre actif de Women Uprising, était là aussi depuis le matin avec ses deux enfants munis de gants et de masques, pleins d'enthousiasme mais choqués de voir autant de saletés sur une même plage. D'autres jeunes adolescents se sont joints au groupe de volontaires peu avant midi et sont restés sans voix devant les sabots et les cornes d'animaux, les chaussures, les têtes de poupées, les pailles, les canettes de boissons gazeuses et les seringues probablement infectées récoltés avec les déchets. « Il faut faire quelque chose et en urgence. Samedi 23 janvier nous revenons ici en face des Résidences-sur-mer et nous comptons sur tous les citoyens et membres de Women Uprising pour se passer le mot afin de rassembler le maximum de personnes, petits et grands, et participer à cette journée », reprennent Jocelyne Kehdi et Meher Khatcherian, bien déterminés avec les autres volontaires et ONG à rendre la gloire au sable fin qui borde la mer d'un bleu azur à couper le souffle.

Meher Khatcherian, professeur en relations internationales et résolution de conflits à l'Université de Montréal et à l'Université Saint-Paul à Ottawa, est l'instigateur de cette initiative lancée mardi dernier et qui reste selon lui assez isolée par manque de temps et de médiatisation.

Changer la mentalité

« Depuis la dernière tempête, des tonnes de plastique, de métal et de pneus ont échoué sur la plage. Il fallait en enlever le maximum. J'en ai discuté avec Ziad Abi Chaker, un ingénieur à la tête de Green Glass Recycling Initiative (GGRIL) et avec Lebanon and Cedar Environmental (LLC), qui recyclent le plastique pour fabriquer notamment des ecoboards, des planches en bois écologique. Ce contact a permis de donner de l'ampleur à l'initiative », explique M. Khatcherian.

Trois journées de nettoyage ont déjà permis de débarrasser cette plage de 400 m² de quelque 250 sacs de 60 litres, de déchets en plastique pour l'essentiel, d'un gros sac de construction équivalent à une quinzaine de sacs de 60 litres de canettes et autres déchets métalliques et d'une centaine de pneus. Ce travail physiquement dur, bien qu'il reste insuffisant, est bien visible sur la plage qui semble être moins envahie par les saletés.

« Une fois débarrassés des déchets visibles sur la plage, il faudra s'occuper d'une autre couche invisible enfouie sous le sable », explique Jocelyne Kehdi.
« Samedi prochain sera une grande journée pour nous en termes d'affluence parce qu'on a eu le temps de communiquer alors que les annonces ont été faites à la dernière minute pour les 3 premières rencontres. Toutes ces initiatives restent insuffisantes et inefficaces si elles ne contribuent pas d'une façon ou d'une autre à changer la mentalité des Libanais. Nos concitoyens doivent réaliser que chaque sac de déchets enlevé est un sac de moins qui va dans la mer, même si c'est dérisoire, et qu'il faut bien commencer quelque part plutôt que d'attendre que les choses bougent d'elles-mêmes », conclut Meher Khatcherian.


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commentaires (2)

C'est triste et heureux à la fois. Si l'on arrête de jeter alors on arrêtera de ramasser!

PPZZ58

21 h 52, le 18 janvier 2016

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Commentaires (2)

  • C'est triste et heureux à la fois. Si l'on arrête de jeter alors on arrêtera de ramasser!

    PPZZ58

    21 h 52, le 18 janvier 2016

  • Le pire , c'est les poissons et crustacés de la chaine alimentaire...sont imbibé de microbes, bactéries,toxines et de métaux lourds ...qui se retrouve dans votre assiette...!

    M.V.

    16 h 54, le 18 janvier 2016

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