Certes, l'initiative présidentielle est désormais, selon Nabih Berry, s'exprimant devant ses visiteurs, « dans le congélateur ». Preuve en est que la date de la prochaine convocation de la Chambre des députés a été fixée au 8 février, une date relativement lointaine. De toute façon, si cette prochaine séance devait ressembler à celle qui s'est tenue hier, en présence de 36 députés, il est inutile d'y investir un quelconque espoir. Elle ne servira qu'à consacrer notre crise de régime, en dépit de la volonté populaire de plus en plus vive de voir un nouveau président élu, et dont se sont fait l'écho, à l'occasion des fêtes, le patriarche maronite et le catholicos Aram Ier.
Dans les milieux économiques, en outre, on ne manque pas de rappeler que les marchés ont très vite réagi, de façon euphorique, à l'initiative Hariri-Frangié, avant de retomber quelques jours plus tard, devant les obstacles qui y ont été posés.
Jugeant éthiquement et politiquement inadmissible cet immobilisme, en raison des dangers externes qui guettent le pays et des contractions internes qu'ils risquent d'aviver, le Premier ministre et le président de la Chambre s'emploient à amortir les divisions confessionnelles apparues dernièrement entre sunnites et chiites libanais, en raison du conflit entre l'Arabie saoudite et l'Iran qui s'exprime de plus en plus ouvertement. Où va la région? Nul ne le sait au juste. Les tentatives de rapprochement irano-américaines se sont heurtées, de toute évidence, à de très sérieuses réserves saoudiennes, qui ont faussé les calculs et dissipé les minces espoirs que l'on commençait à bâtir sur elles. Toutes les prévisions peuvent ainsi s'avérer illusoires et un combat jugé gagné d'avance s'étirer en longueur.
Il en sera question, au cours du week-end, aussi bien à Riyad qu'au Caire, où se tiendront ici la réunion du Conseil de coopération du Golfe, et là le Conseil de la Ligue arabe. Ce sont des réunions convoquées dans l'urgence, pour essayer de voir où peut conduire le conflit saoudo-iranien, d'autant qu'une importante réunion se tiendra à Genève, le 25 janvier, pour donner suite à la feuille de route pouvant mener à une sortie de crise en Syrie.
Est-ce la conscience du caractère imprévisible des événements qui l'inspire ? Peut-être. Toujours est-il que l'idée d'une relance du travail gouvernemental est sérieusement envisagée, si l'on en croit le ministre de l'Information, Ramzi Jreige, qui le tient du Premier ministre lui-même. En effet, M. Jreige a annoncé hier, après avoir rencontré Tammam Salam, que le chef du gouvernement envisage de convoquer aujourd'hui ou demain le Conseil des ministres à une réunion, la semaine prochaine. Une réunion qui se tiendrait mercredi ou jeudi. À l'ordre du jour, M. Salam prévoit de faire figurer des points importants pour la population, mais qui ne font pas polémique. Les points soulevant des objections seraient immédiatement éliminés de l'ordre du jour.
Par ailleurs, deux réunions de dialogue sont prévues lundi : une réunion de la conférence nationale du dialogue et une autre du dialogue bilatéral Futur-Hezbollah.
De source proche de M. Salam, on assure que la première réunion se concentrera sur les moyens de relancer l'action gouvernementale. Quant à la seconde, et en dépit des discours incendiaires prononcés ces derniers temps, notamment par Mohammad Raad, des efforts sont déployés par Nabih Berry pour en faire baisser le ton, après les joutes qui ont suivi l'exécution par l'Arabie saoudite de cheikh Nimr Baqer el-Nimr, un opposant saoudien chiite, pour lequel l'Iran et le Hezbollah ont pris fait et cause.
Deux réunions préparatoires à cette reprise de contact difficile se sont tenues hier entre Nader Hariri, conseiller de Saad Hariri, avec le numéro deux d'Amal, Ali Hassan Khalil, qui a reçu hier soir chez lui une délégation du parti chiite. Un écho analogue à celui du Grand Sérail a été entendu par Nouhad Machnouk à Aïn el-Tiné. Nécessité de relancer le travail gouvernemental, pleinement approuvée par M. Berry, nécessité de préserver le cadre du dialogue, même s'il est formel et... organisation des élections municipales ont été au cœur de l'entretien. M. Machnouk est, dit-on, sérieusement décidé à préparer ce scrutin prévu en mai prochain. À moins que cette échéance ne se transforme en une nouvelle étape du démantèlement des institutions...
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commentaires (11)
Ah Berry , Berry quand tu nous tiens !!!!!
FAKHOURI
22 h 06, le 08 janvier 2016