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Retour aux sources

Il est parti comme il avait vécu. Simplement, discrètement, humblement. Grégoire Haddad, le « père Grégoire » pour les intimes et pour ce que l'on pourrait désigner aujourd'hui par la société civile, a rejoint son Absolu, le Christ, la veille de la Nativité. Dans un certain sens, il a opéré l'ultime retour aux sources, un thème qui a marqué la partie la plus riche de sa vie religieuse.


Celui qui a présidé aux destinées du très sensible diocèse grec-catholique de Beyrouth et de Jbeil de 1968 à 1975 avait acquis, au milieu des années 70 du siècle dernier, une renommée qui a largement dépassé les frontières libanaises du fait des idées avant-gardistes, voire révolutionnaires, qu'il défendait au sujet de la pratique de la religion chrétienne. Il prônait un retour aux sources de la chrétienté en soulignant que toute position à l'égard d'une structure ou d'une attitude chrétienne quelconque devait obéir à deux critères absolus, le Christ et l'Homme. Il ne s'agissait pas pour lui d'une simple posture intellectuelle. Il joignait la parole à l'acte et menait, en tant que prélat, une vie modeste, simple, détachée des contingences matérielles. Sa vision de ce que devrait être la vie du chrétien authentique, respectueux des deux critères absolus, il l'avait traduite dans sa réorganisation des paroisses de son diocèse.


Ce retour aux sources avait réconcilié de nombreux jeunes, surtout dans les milieux universitaires, avec la religion chrétienne, d'autant qu'il s'accompagnait, de manière concomitante, d'une action sociale tout aussi avant-gardiste, fondée, non pas seulement sur la charité, mais plutôt sur le développement socio-économique des régions les plus défavorisées du pays.


Le père Grégoire avait poussé sa modestie qui le caractérisait jusqu'à se demander, lors de la préparation de sa biographie, s'il restait quelque chose de son long parcours en tant qu'homme de religion et militant de l'action sociale. Cette interrogation existentielle au crépuscule de sa vie trouve une réponse dans la triste réalité de cet Orient déchiré par la violence aveugle, l'obscurantisme le plus rétrograde et l'intolérance destructrice. Plus que jamais, aujourd'hui, les populations de cette région ont besoin d'un retour salutaire aux sources de la pratique religieuse. Plus que jamais, cette partie du monde a besoin de s'inspirer du rêve de Grégoire Haddad, de sa vision peu commune de la religion, fondée sur le respect de l'autre, sur le droit à la différence, la préservation des spécificités de chacun, la sauvegarde de la dignité de l'individu et le développement de l'homme, de « tout homme et de tout l'Homme », comme il ne cessait de le souligner pour bien marquer la nécessité de ne négliger aucune dimension du développement de la personne humaine.
C'est ainsi en opérant un retour aux véritables préceptes de la religion, non seulement dans ce Moyen-Orient en pleine tourmente mais même, et surtout, dans le monde occidental, que la voie qu'il a tracée n'aura pas été vaine. Il peut sans doute, à cet égard, reposer en paix. Car le pape François n'est pas étranger à ce modèle de vie auquel le père Grégoire nous a longtemps accoutumés.

 

Les obsèques de Grégoire Haddad ont eu lieu dimanche 27 décembre à 15 heures en la Cathédrale Saint Élie des grecs-catholiques du centre-ville de Beyrouth. Auparavant, une marche pacifique a été organisée par des anciens proches collaborateurs du père Grégoire et par des jeunes du courant de la société civile qu'il avait fondé. La marche a eu lieu de Badaro depuis le siège du Mouvement social jusqu'à l'Hôtel Dieu où le père Grégoire repose, puis jusqu'à la Cathédrale Saint Élie.

 

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commentaires (7)

Une perte ,un grand homme ,il a vecu avec le Christ uniquement au service de l'homme...merci pour l'article cible et vrai...

Soeur Yvette

15 h 47, le 27 décembre 2015

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Commentaires (7)

  • Une perte ,un grand homme ,il a vecu avec le Christ uniquement au service de l'homme...merci pour l'article cible et vrai...

    Soeur Yvette

    15 h 47, le 27 décembre 2015

  • Mgr le Sain Père Grégoire nous est proche. Il est en tout cas tout ce qu’on met au + haut : sa scrupuleuse analyse de cette société dont la complexité dérangeante n'est jamais niée, son refus énergique d'être dupe de ces autres et sûr de soi-même, 1 honnêteté intellectuelle à l’opposé d’1 inaccessible objectivité jamais démentie. Aussi sa faculté, quand la situation l'exigeait, de faire sourdre l'émotion sans laquelle les tragédies humaines se dessècheraient. Mais sans pour autant s'abandonner à l'émotivité, qui altère et qui, parfois, corrompt. Sur ce plan toujours si humain et si Sain, c'est fou ce que la tendresse revient sans cesse dans l'évocation de ce Sain(t) Père. Et c'est bien qu'il ne soit pas only 1 abstraction sèche puisque le voici, même après son décès, tout emblématique. Un Sain(t) Père Grégoire pourtant si souvent décrié, condamné et pas seulement par ses ennemis Malsains et Satanés. Par hygiène et aussi pour prévenir la virulence de leurs basses attaques, il ne faut jamais cesser de bien rappeler, lorsqu'il arrive qu’on parle d’eux, qu’on estime en général que le coinnisme "mélikite" est 1 "enfer", 1 abîme d’iniquité et de mensonge. Que c’est même la locomotive des trahisons ! Que, et pour rester dans la nuance, on ne comprend point qu'1 main si Pure et si Saine telle celle de Mgr le Sain(t) Père Grégoire ait pu toucher 1 de ces veules "Orientaux romanisés" sans, naturally, avoir une convulsion de dégoût et de rejet. Que son Esprit repose en paix !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    12 h 02, le 27 décembre 2015

  • LES GRANDS... PAS CEUX QU'ON Y CROIT... MAIS LES JUSTES... ON LES IGNORE DE LEUR VIVANT ET ON LES PLEURE UNIQUEMENT QUAND IL QUITTENT CE MONDE ! L'HOMME DE PAR SA NATURE EST UN ÊTRE INGRAT !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 12, le 26 décembre 2015

  • Un des rares prélats qui vivait sa chrétienté à l'image du Christ! Un humaniste et un guide spirituel !

    Dounia Mansour Abdelnour

    00 h 28, le 26 décembre 2015

  • Une perte...un grand homme....que Dieu ait son ame....

    Soeur Yvette

    09 h 07, le 25 décembre 2015

  • "Il joignait la parole à l'acte, dîtes-vous, M Touma, et menait, en tant que prélat, une vie modeste, simple, détachée des contingences matérielles" ? Et n'est-ce pas ce que font nos prélats "modernes" avec leur pourpre, leurs crucifix en or, leurs voitures dernier cri, enfin tout le luxe "simple" et "modeste" possible ? N'est-ce pas le meilleur retour aux sources, c'est à dire à l'exemple de Celui dont aujourd'hui même on célèbre la naissance dans une grotte insalubre et le placement en une mangeoire misérable ? Celui qui tout au long de sa vie ne possédait même pas "une pierre pour reposer la tête", comme il le disait lui-même ?

    Halim Abou Chacra

    05 h 54, le 25 décembre 2015

  • Allah Ma3ak Mgr !!

    Bery tus

    02 h 08, le 25 décembre 2015

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