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Économie - Liban - Conjoncture

Le numérique bouscule le marché de la publicité

Alors que les dépenses publicitaires restent plutôt stables, le marché de la publicité sur Internet a augmenté de plus de 50 % ces dernières années. Au détriment d'autres supports médiatiques plus traditionnels ?

La part de marché de la publicité sur Internet pourrait atteindre les 50 % d’ici à quelques années. Justin Sullivan/AFP

Il y a quelques semaines, une campagne vidéo orchestrée par Leo Burnett pour l'ONG Kafa a réussi à atteindre les 3 millions de vues en moins de 24 heures. Une semaine plus tard, la société immobilière IGroup, ayant cru bon de surfer sur cette vague, crée un bad buzz avec une pub-choc proposant un logement à une femme au visage tuméfié pour pouvoir échapper à son mari violent. C'est justement parce que le web offre aux entreprises la possibilité de faire du tapage médiatique et de doper leur visibilité que la part des dépenses publicitaires numériques ont connu la plus forte croissance entre 2008 et 2015, avec une croissance de 15,93 % dans le monde pour s'établir à 167,76 milliards de dollars, selon le Lebanon Brief de la Blom Bank publié en octobre 2015.

Une tendance qui se retrouve au Liban : « La part du numérique dans la publicité est en pleine expansion. Aujourd'hui, les agences de publicité ne peuvent pas en faire abstraction, car nous devons suivre le consommateur qui est de plus en plus connecté », annonce d'emblée Samer Hajj, directeur général associé de Vertical Media, une agence médias de Quantum Group. Alors que les dépenses publicitaires n'ont augmenté que de 2,62 % depuis 2008 – pour atteindre 174,6 millions de dollars–, le marché de la publicité « digitale » a, lui, progressé de 55,59 % depuis 2009, pour atteindre 22,7 millions de dollars. Il s'agit de la plus forte progression sur le marché de la publicité, suivie par les supports magasines et télévisés avec respectivement 2,53 % et 2,49 % de croissance. Le numérique se place ainsi comme le quatrième média d'investissement des annonceurs, avec 13 % de part de marché, derrière la télévision (37,97 %), la publicité extérieure (22,97 %) et la presse quotidienne (15 %). Mais la publicité numérique aurait pu croître beaucoup plus vite si la connexion Internet n'était pas si lente au Liban : « La part du numérique a augmenté moins vite que dans les pays du Golfe ou les pays occidentaux, qui sont largement en avance sur le Liban en termes d'infrastructure informatique – certains marchés sont d'ailleurs équipés de la fibre optique », déplore Samer Hajj. En 2015, le Liban a été classé 13e pays sur les 17 de la zone Mena, avec une vitesse de téléchargement de 3,73 Mbit/s, contre 21,25 Mbit/s aux Émirats arabes unis, selon les mesures de Speedtest.

(Lire aussi : L'Internet libanais se cherche encore une gouvernance)

Moindre coût

« Malheureusement, le client n'augmente pas son budget publicitaire, de fait le budget se déplace entre les différents médias », continue Samer Hajj. D'autant plus que la publicité numérique offre de nombreux avantages par rapport aux supports médiatiques traditionnels. Premièrement, elle coute moins cher : avec les campagnes « coût par clic », l'annonceur ne paye le moteur de recherche que seulement lorsque quelqu'un clique sur le lien de sa publicité, ou grâce au système d'enchère en temps réel sur Internet, le prix d'une impression publicitaire est déterminé en temps réel en fonction de sa taille ou du moment auquel elle est visualisée.

Deuxièmement, elle est plus efficace : « Vous pouvez changer votre campagne en ligne instantanément si vous vous rendez compte qu'elle ne va pas dans la bonne direction, car vous avez accès à de nombreux outils d'analyse afin de mieux cibler votre audience, chose qui n'est pas réalisable avec les médias traditionnels », explique Samer Hajj. Enfin, grâce aux réseaux sociaux, les marques peuvent créer leurs propres plateformes publicitaires : « Avant Internet, la publicité se faisait à sens unique, de l'annonceur aux consommateurs via les supports traditionnels. Avec les réseaux sociaux, la communication se fait désormais dans les deux sens, les consommateurs deviennent des ambassadeurs de votre marque, dès lors que vous avez crée de l'engagement avec votre public », explique la directrice régionale des ressources humaines chez Leo Burnett.

(Lire aussi : Libertés sur Internet : Bon élève de la zone Mena, le Liban reste néanmoins à la traîne)

Coups durs

Pour l'instant, la télévision reste pour l'instant le support publicitaire privilégié des entreprises au Liban, avec 66,3 millions de dollars. Le plus gros perdant de cette transition vers le numérique reste la presse quotidienne sur papier, dont la part de marché enregistre la plus forte baisse, de 2,55 % pour atteindre 26,2 millions de dollars en 2015, contre 30,6 millions en 2009. Toutefois, l'annihilation des médias traditionnels n'est pas pour demain : « Chaque média possède son importance dans la journée du consommateur, et, même si les réseaux sociaux ont pris une place plus grande, il continuera à prendre sa voiture, à écouter la radio, à regarder les panneaux publicitaires et à lire le journal », explique Carol Hanna.

« Je ne pense pas que le numérique prendra totalement le pas sur les médias traditionnels. Même si le marketing en ligne est perçu comme allant dominer les autres formes de publicité, cela se traduira plutôt par une plus grande interdépendance entre les différents médias », continue Samer Hajj. Un défi d'autant plus important que le marketing numérique n'a pas fini sa phase d'expansion et pourrait même saisir 50 % de la part totale des dépenses publicitaires au Liban d'ici 5 à 10 ans, selon le Lebanon Brief de la Blom Bank.



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