Qui accompagnera la candidate du Front national, Marine Le Pen, au second tour en 2017 ? Voilà – peut-être – tout l'enjeu de la future élection présidentielle française. Pour le candidat du Parti socialiste (PS), sans doute François Hollande, ou pour celui du parti Les Républicains (LR), Nicolas Sarkozy ou Alain Juppé, un ticket pour le second tour ressemblerait, sauf improbable surprise, à une garantie de devenir le nouveau locataire de l'Élysée. À droite comme à gauche, chacun semble en avoir conscience et adapte sa stratégie pour le second tour des régionales en fonction.
Fort d'une popularité en hausse après les attentats du 13 novembre, François Hollande a dû décortiquer avec attention les résultats du premier tour des élections régionales, où le PS est arrivé troisième au niveau national, avec 23 % des suffrages exprimés. Il a pourtant décidé de ne pas intervenir sur le sujet, laissant à son Premier ministre, Manuel Valls, et au secrétaire général du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, le soin de commenter les scores du parti. Des scores désastreux pour le PS, mais qui pourraient s'avérer plutôt bons pour la gauche et pour M. Hollande. Un paradoxe qui s'explique par le fait que si le PS, seul, arrivait en troisième position, la gauche rassemblée (c'est-à-dire le PS, le Front de gauche et Europe Écologie-Les Verts) pourrait réussir à limiter la casse, en remportant la présidence d'au moins trois régions (Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, Bretagne, Corse). Elle se présenterait donc, dans ce cas-là, comme la principale force d'opposition au Front national, ce qui semble être la stratégie de M. Hollande afin d'être candidat à sa propre succession. La décision du PS de retirer ses listes dans les régions où il est arrivé troisième et où le Front national est arrivé en tête pour faire un « barrage républicain » relève de la même logique : le PS pense à 2017 et met la droite dans l'embarras en s'attribuant le monopole de la défense des valeurs républicaines contre le FN. Même si elle n'a pas été respectée par le candidat de la région du Grand-Est, Jean-Pierre Masseret, cette décision pourrait s'avérer payante tant la ligne prônée par le patron du LR, Nicolas Sarkozy, qui se résume au « ni retrait ni fusion », fait débat au sein même de la droite.
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Cap à droite ou au centre ?
À droite, deux tendances se dessinent pour lutter contre la montée en puissance du FN, qui a réussi, selon les experts, à séduire une partie de l'électorat traditionnel de la droite. La première, défendue par Nicolas Sarkozy, est de ne pas hésiter à concurrencer le FN sur ses thèmes de prédilection : l'immigration, l'islam, l'Europe, quitte à employer son vocabulaire. Cette stratégie droitière, qui était déjà celle de l'ancien président de la République lors de l'entre-deux-tours de la présidentielle de 2012, repose sur le fait que la France n'a jamais été aussi à droite et qu'il faut prendre en compte la demande des électeurs. La seconde, appuyée notamment par Alain Juppé, considère au contraire que cette stratégie a tendance à décomplexer les électeurs et à les pousser vers le FN. Celui-ci prêche plutôt pour un repositionnement au centre qui, selon lui, permettrait à la droite d'être le principal parti d'opposition au FN. À l'issue des régionales, M. Sarkozy a déjà assuré qu'il y aura un débat idéologique au sein du parti pour trancher une fois pour toutes cette divergence, avant le début des primaires. Mais davantage que sa stratégie, c'est son passé politique qui semble être le principal obstacle de M. Sarkozy. Difficile de « siphonner » les voix du FN, comme il l'avait fait en 2007, après avoir passé cinq ans au pouvoir à mener une politique libérale et pro-européenne.
En face, la montée en puissance du FN pourrait inciter la gauche à se rassembler dès le premier tour de la présidentielle pour assurer sa place au second tour.
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Mais compte tenu des divergences profondes sur les plans socio-économiques entre le PS et « la gauche de la gauche », ce scénario devrait avoir beaucoup de difficulté à prendre forme. En attendant, M. Hollande semble vouloir préserver une image de chef de guerre, comme lorsqu'il a visité le porte-avions Charles-de-Gaulle, et de leader international, en s'impliquant personnellement dans la COP21 : comme pour montrer qu'il se place, à l'instar du général de Gaulle, au-dessus des partis, au-dessus des calculs politiciens, en tant que garant de l'unité nationale.
Au lieu de contrer la montée en puissance du FN, les deux partis semblent vouloir l'utiliser, tous deux persuadés qu'ils pourront en tirer profit en 2017. Un stratégie périlleuse, mais qui profitera forcément à l'un d'entre eux. Reste à savoir lequel ?
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Que faire face à la "percée historique" du FN, se demande une presse française sous "le choc"
commentaires (4)
Moi ce qui me tourmente le plus c'est pas de savoir si marine est islamophobe etc.... C'est si les juifs de France la considère toujours antisémite ou pas ? L'inquiétude vient plus des intérêts financiers et médiatiques qu'ils contrôlent que d'une main mise islamique sur la France.
FRIK-A-FRAK
13 h 32, le 11 décembre 2015