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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

Les différentes phases du développement psychosexuel de l’enfant -1- La phase orale et l’état amoureux (suite)

La première année de la vie après la grossesse, première année de la vie en dehors du corps de la mère, est une année cruciale pour le développement de l'enfant. C'est une année intermédiaire entre la vie intra-utérine et la future vie indépendance de l'enfant. La mère aura pour fonction de préparer son enfant à renoncer à la vie fusionnelle, incestueuse et jouissive pour entrer dans le monde social, le monde des autres, le monde du langage. Lacan dira que l'enfant va renoncer à la « Jouissance Autre » pour se contenter d'une « Joui-sens ».
Joui-sens veut dire jouir de la signification des mots, jouir du langage. La mère doit accepter que son enfant renonce à elle, comme lors du sevrage. La fonction du père est de faciliter le sevrage, voire de l'imposer. « Ton enfant ne t'appartient plus, il est désormais un être à part entière, un être social, un "parlêtre" » dira Lacan. Cette fonction du père, séparateur, s'exercera, ou pas ou peu, dans les différents moments de la vie de l'enfant, de l'adolescent. Dans la phase orale, la séparation de l'enfant avec la mère est capitale. Le nourrissage imprime chez l'enfant les traces de fusion avec la mère. La Jouissance qu'il éprouvera est incestueuse, fusionnelle mais, en même temps, porteuse d'une angoisse d'annihilation, ou d'une angoisse d'abandon. D'où l'importance de la fonction du père.
L'enfant éprouvera l'absence de la mère comme angoissante, mais en même temps comme rassurante : il y a quelqu'un d'Autre auprès duquel la mère de l'enfant se rend quand elle n'est pas avec lui. Bien évidemment, l'enfant est incapable de penser les choses comme cela, il est incapable de penser tout court. Il pensera cela lorsqu'il découvrira nettement la présence du père. Cette pensée est une pensée rétroactive, dialectique. Freud en rendra compte dans le concept d'« Après-coup », concept qui permet de comprendre dans un second temps ce qu'on n'a pas pu comprendre auparavant. La fonction du père, on le voit, est rassurante : l'enfant ne sera pas englouti dans le ventre de sa mère.
Cette période de la vie, riche en amour, déterminera la santé de l'enfant et sa capacité d'aimer. En témoigne le Babil. Le babil est un langage secret entre la mère et l'enfant, langage qui ne veut rien dire, qui n'a pas de sens, mais qui porte encore une part de Jouissance Autre. C'est comme si l'enfant disait à sa mère : Tu veux que je parle, que j'entre dans le monde des autres, de mes frères, de mon père ? Je ne veux pas parler parce que je ne veux pas te quitter. Je veux rester dans l'étreinte avec toi. Je ne veux pas grandir. Devant l'insistance de sa mère pour qu'il apprenne le nom des objets, il finit par babiller. Et la mère ébahie babillera avec lui.
Ce babil, on le retrouvera dans le discours amoureux. Les amoureux se surnomment de façon étrange, murmurent de façon incompréhensible au reste du monde. Comme la dyade mère-enfant qui reste isolée du monde entier, les amoureux peuvent passer des heures sur un banc public. Ou se parler au téléphone pendant des heures sans rien dire non plus. Au point où nous pouvons reconnaître qu'on est amoureux par le temps qu'on passe avec l'autre au téléphone sans rien se dire de particulier. L'état amoureux est une reviviscence de cette étreinte fusionelle avec la mère.
L'attente caractérise également les deux états. Pendant l'attente, comme en témoigne la littérature amoureuse, l'amoureux qui attend est capable d'halluciner son objet d'amour. Quant au nourrisson, halluciner le sein de la mère est chose courante. Freud l'appelle « satisfaction hallucinatoire du désir ». Elle se comprend par l'hypothèse et les observations que le nourrisson est dans un état originel de détresse. La faim, par exemple, crée un état de tension insupportable qui ne cède que grâce à l'intervention d'une personne extérieure, la mère. La satisfaction éprouvée est alors liée à l'objet qui l'a provoquée, le sein. Quand, à nouveau, la faim provoque un état de tension et avant qu'elle ne soit assouvie, l'enfant réactive, ré-investit la trace mnésique laissée par l'objet. Cette réactivation produit un phénomène proche de la perception première : l'hallucination.
Progressivement, l'enfant fait l'épreuve de la réalité. Il va distinguer la perception de l'hallucination, l'objet extérieur de l'objet intérieur produit de son imagination. Cette expérience de satisfaction hallucinatoire du désir est absolument fondamentale puisqu'elle est à l'origine du désir humain qui se distingue ainsi du besoin dès le début. Elle fonde la distinction essentielle entre l'objet réel et l'objet imaginaire.
Nous verrons par la suite l'impact de cette phase orale du développement sur la construction des structures psychique

Chawki AZOURI

La première année de la vie après la grossesse, première année de la vie en dehors du corps de la mère, est une année cruciale pour le développement de l'enfant. C'est une année intermédiaire entre la vie intra-utérine et la future vie indépendance de l'enfant. La mère aura pour fonction de préparer son enfant à renoncer à la vie fusionnelle, incestueuse et jouissive pour entrer...

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