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Liban - Reportage

« Quand Georges sera rentré, je le prendrai dans mes bras »...

Place Riad Solh, la fin de la terrible attente, pour les proches des militaires otages du Front al-Nosra.

Les proches des ex-otages, tout à leur bonheur, place Riad el-Solh. Anwar Amro/AFP

Le père du militaire Rayan Salam n'a pas vu son fils une seule fois depuis un an et quatre mois, c'est-à-dire depuis que ce dernier a été pris en otage par le Front al-Nosra dans le jurd de Ersal en août 2014, et ce malgré les rares visites qui ont été autorisées aux parents. Et pour cause, des problèmes de santé l'avaient empêché de se déplacer pour voir son fils. Mais, en compagnie des autres parents des ex-otages place Riad el-Solh hier matin, il sait que les retrouvailles sont imminentes. « J'espère qu'ils vont arriver sains et saufs », confie-t-il alors que vient de commencer l'opération de libération des otages dans le jurd de Ersal. Oum Rayan, elle, lance des youyous, des fleurs et du riz pour fêter le retour de ce fils tant attendu.


Plus loin, assise à côté de la tente dressée non loin du Grand Sérail depuis le rapt des militaires, la famille du policier Lameh Mouzahem est venue au grand complet pour entourer la mère de ce dernier, submergée par la bonne nouvelle et évoluant entre l'allégresse et les larmes. « Je remercie l'État libanais et le Qatar pour la libération de nos enfants », dit-elle, avant d'ajouter, confuse : « Je ne sais plus quoi dire, excusez-moi. J'attends impatiemment de le voir. J'ai fait vœu d'aller au Sérail pieds nus si Lameh était libéré. Dieu merci, ils sont revenus. L'État nous a aidés et nous savions qu'il ne nous laisserait pas tomber. Nos fils retournent non seulement chez leurs parents, mais à l'institution », précise-t-elle.

 

(Reportage : Au Grand Sérail, les émouvantes retrouvailles des ex-otages et de leurs familles)


Pour célébrer l'événement, les familles offrent des pâtisseries, des bonbons et des dragées. Certains forment même des rondes de dabké et chantent. Oum Georges (mère du militaire Georges Khoury), cigarette à la main, est incapable de contenir sa joie. « Depuis qu'il a été kidnappé, je prie Dieu pour que mon fils revienne et Dieu me l'a rendu. Nos fils sont rentrés grâce à notre labeur ! » s'écrie-t-elle. « Quand Georges sera rentré, je l'entourerai de beaucoup de tendresse et de baisers, je le prendrai dans mes bras. Je veux retrouver mes habitudes avec lui, prendre le café comme on faisait et nous parler pendant des heures. Depuis qu'il a été pris en otage, je l'imaginais chaque jour sur le chemin de la maison », confie-t-elle.


Mais la joie de voir les siens libérés ne fait pas oublier à certains la détresse des familles dont les fils sont toujours otages de l'État islamique (EI). Oum Georges souhaite aux « mères des neuf otages retenus par l'EI de retrouver leurs enfants sains et saufs ». Fadi Mouzahem, oncle de Lameh Mouzahem, souhaite ardemment la libération de ces otages. « Notre joie est indescriptible, mais incomplète, car neuf militaires manquent à l'appel et nous voulons qu'ils soient libérés. Ces militaires-là sont comme nos enfants. N'oublions pas que ce sont des Libanais et que leur mère, leur femme, leurs frères et leurs enfants les attendent », dit-il.
Émues, les familles expriment leur gratitude envers le Premier ministre, Tammam Salam, et le général Abbas Ibrahim, directeur de la Sûreté générale, dont les efforts ont abouti à la libération de leurs fils. « Nous savions que l'État travaillait de manière discrète à la libération des otages et nous lui en sommes reconnaissants, même si, à des moments, nos émotions ont pris le dessus », confie Fadi Mouzahem.

 

(Vidéo : Place Riad Solh, les familles des otages apprennent leur libération : les images)


Le père du policier Maymoun Jaber remercie, pour sa part, le député Walid Joumblatt pour ses efforts. Quant à la mère de Pierre Geagea, également agent des FSI, elle tient à remercier le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, pour son intervention dans le dossier.
Présente auprès des familles dès le départ, Wadad Halwani, présidente du Comité des parents des personnes enlevées et disparues au Liban (CPPED), comprend et partage les émotions ressenties par les familles. Une rose rouge à la main, elle attend place Riad el-Solh le retour d'autres otages, elle dont le mari a disparu en 1982. Elle n'a cessé, depuis, de lutter pour que le sort des personnes disparues durant la guerre civile soit dévoilé à leurs proches. « Il s'agit d'un moment de joie que nous partageons avec les parents des militaires. Nous connaissons très bien la douleur qu'ils ont ressentie, car nous la vivons depuis 33 ans. Nous soutenons également les familles des neuf militaires qui sont toujours aux mains de l'EI », confie-t-elle à L'Orient-Le Jour. La libération des 16 policiers et militaires n'est pas sans réveiller la douleur face au silence qui entoure le sort des milliers d'otages et de disparus durant la guerre. « Nous espérons que l'État, qui a œuvré pour cette libération, écoutera les parents des disparus de la guerre civile. Nous avons proposé une solution pacifique et non coûteuse, mais ce dossier n'a toujours pas été réglé. Tout ce que nous voulons, c'est savoir où sont nos enfants et pouvoir récupérer leurs dépouilles mortelles s'ils sont morts », dit Mme Halwani.

 

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