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À La Une - Éclairage

Au Pakistan, les Ahmadis luttent pour leur identité

Le simple fait d'utiliser la formule de salutation musulmane "la paix soit avec vous" peut coûter trois ans de prison à un Ahmadi.

Une femme issue de la minorité ahmadie. Photo AFP

"Est-ce que ce sont les gens armés qui ont emmené mon papa?" demande anxieusement Sabiha Ahmad, deux ans, lorsque des journalistes de l'AFP entrent chez lui pour rencontrer sa famille, issue de la minorité ahmadie du Pakistan, qui vit cachée après avoir fui de nouvelles violences. Ses proches n'ont eu que très peu de contacts avec l'extérieur depuis qu'ils ont fui leur ville de Jhelum, craignant pour leur vie, lorsque des centaines de personnes ont incendié une usine après des rumeurs prétendant qu'on y brûlait des versets du Coran.

Le père de Sabiha, Asif Shahzad, était l'un des employés de l'usine appartenant à un Ahmadi, une minorité considérée comme non musulmane au Pakistan en raison du culte qu'ils vouent à un prophète postérieur à Mahomet. Cette nuit là, la foule en furie a failli le tuer. "Je les ai suppliés d'épargner ma femme et mes enfants, et ils ne les ont laissés partir qu'après m'avoir embarqué, avec l'intention de me brûler dans la chaudière de l'usine", a-t-il raconté à l'AFP cette semaine, dans le village où sa famille s'est réfugiée. "Même les meilleurs mais sont devenus nos pires ennemis". "J'ai eu une chance énorme, un musulman au bon coeur m'a aidé à m'échapper", souligne-t-il.

Son épouse Hafsa, 24 ans, s'était presque résignée à sa mort. "Je ne voulais pas l'abandonner, mais il a insisté en disant qu'il nous rejoindrait s'il survivait, et que je devais sauver ma vie et celle de nos filles", se souvient-elle, écrasant une larme. Elle a grimpé dans la voiture préparée par son mari pour fuir avec d'autres familles ahmadies de Jhelum, avant d'être happé par la foule. Le chauffeur, musulman, a frayé son chemin à travers la foule de jeunes fanatiques mobilisés par des leaders religieux, et conduit en sécurité un groupe de femme en les traitant "comme ses filles", souligne Hafsa.

Les islamistes extrémistes considèrent les Ahmadis comme des hérétiques, estimant que le foi en un prophète du XIXe siècle relève du blasphème envers Mahomet. Une question très sensible au Pakistan, où nombre de personnes, souvent issues de minorités, ont été lynchées pour de simples accusations de blasphème.

La plus importante communauté ahmadie au monde se trouve au Pakistan, où ils sont environ 500.000. Ses adeptes sont régulièrement accusés de blasphème par des conservateurs qui s'appuient sur des lois jugées discriminatoires. Des textes passés en 1974 et 1984, sous la pression des islamistes, interdisent aux Ahmadis de s'affirmer musulmans et de pratiquer l'islam.

"Harcèlement quotidien"

Le simple fait d'utiliser la formule de salutation musulmane "la paix soit avec vous" peut coûter trois ans de prison à un Ahmadi.

"Au Pakistan, les Ahmadis font face à un harcèlement quotidien, des intimidations et persécutions en raison de leur religion", a déploré Dennis Jong, du groupe parlementaire européen sur la liberté de culte, dans un communiqué de presse condamnant cette semaine l'attaque de l'usine de Jhelum. De telles attaques, a-t-il souligné, "montrent le manque de protection des droits de l'Homme et des libertés fondamentales" dont soufrent les Ahmadis.
En juillet 2014 déjà, une foule hostile avait brûlé vifs trois Ahmadis et incendié leurs maisons dans une autre ville de l'est du Pakistan, Gujranwala, dans le Pendjab.

"Les gens nous détestent à cause de notre religion", dit en soupirant Mubashira Jarri Allah, qui avait alors été victime des violences. Ils "ont brûlé notre maison après de fausses accusations de blasphème. J'ai perdu ma mère, deux nièces, et l'enfant que je portait", se souvient la jeune femme, enceinte de 8 mois à l'époque.
En mai, des tensions ont agité le district de Chakwal, à 200 km de la capitale, Islamabad, quand les minarets d'un lieu de culte ahmadi ont été détruits sur l'ordre d'un tribunal qui l'avait estimé trop semblable à une mosquée.

Des responsables du Jamat-e-Ahmadiya, une coalition de groupes ahmadis, estiment que l'Etat orchestre leur persécution. "Nous ne pouvons même pas voter, car si nous nous déclarons musulmans, nous risquons d'être poursuivis", souligne Saleem ud Din, un porte-parole du Jamat-e-Ahmaidya.
L'Etat pour sa part, assure que les Ahmadis -- comme toutes les minorités au Pakistan -- sont "protégés constitutionnellement". "Si la communauté ahmadie a des inquiétudes ou des peurs, elle doit venir nous en parler et nous y remédierons", a promis devant l'AFP M. Sardar Muhammad Yousaf, le ministre fédéral des Affaires religieuses.


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"Est-ce que ce sont les mêmes gens qui ennuient mon papa ?" demande anxieusement Äîchâ, deux ans, lorsque des journalistes entrent pour rencontrer sa famille, issue de la minorité sunnite d’Iran. Ses proches n'ont eu que très peu de contacts avec l'extérieur dans leur ville de Jhénîm, craignant pour leur vie, lorsque des centaines de personnes menaçaient de faire des pogroms après des rumeurs prétendant qu'on brûlait des écrits d’Alî ! Le père de Äâïcha, Ahmad, et son épouse Zaïnab s'était presque résignés à la mort. Ils ont grimpé dans la voiture pour fuir avec d'autres familles sunnites cette Jhénîm. Les fakkihistes extrémistes scrutent d'un très Mauvais Œil ces sunnites. Une question très sensible en Iran, où nombre de ces Sunnites sont persécutées sur simples accusations ! La communauté sunnite en Iran compte des millions. Ses adeptes sont accusés par les mollâhs Per(s)cés conServateurs. Des textes passés depuis 1980, sous la pression de ces fakkihistes, interdisent aux Sunnites de s'affirmer ostensiblement. En Iran, les Sunnites font face à un harcèlement et des intimidations. Des responsables Sunnites, estiment que l’État des Per(s)cés mollâhs orchestre leur persécution. L’État pour sa part, assure que les Sunnites sont "protégés conStitutionnellement". "Si les Sunnites ont des des peurs, ils doivent venir nous en parler et nous y remédierons", a promis le ministre mollâh Per(s)cé chargé des (Affaires religieuses) ! C’est qu’il raconte !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

09 h 16, le 29 novembre 2015

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  • "Est-ce que ce sont les mêmes gens qui ennuient mon papa ?" demande anxieusement Äîchâ, deux ans, lorsque des journalistes entrent pour rencontrer sa famille, issue de la minorité sunnite d’Iran. Ses proches n'ont eu que très peu de contacts avec l'extérieur dans leur ville de Jhénîm, craignant pour leur vie, lorsque des centaines de personnes menaçaient de faire des pogroms après des rumeurs prétendant qu'on brûlait des écrits d’Alî ! Le père de Äâïcha, Ahmad, et son épouse Zaïnab s'était presque résignés à la mort. Ils ont grimpé dans la voiture pour fuir avec d'autres familles sunnites cette Jhénîm. Les fakkihistes extrémistes scrutent d'un très Mauvais Œil ces sunnites. Une question très sensible en Iran, où nombre de ces Sunnites sont persécutées sur simples accusations ! La communauté sunnite en Iran compte des millions. Ses adeptes sont accusés par les mollâhs Per(s)cés conServateurs. Des textes passés depuis 1980, sous la pression de ces fakkihistes, interdisent aux Sunnites de s'affirmer ostensiblement. En Iran, les Sunnites font face à un harcèlement et des intimidations. Des responsables Sunnites, estiment que l’État des Per(s)cés mollâhs orchestre leur persécution. L’État pour sa part, assure que les Sunnites sont "protégés conStitutionnellement". "Si les Sunnites ont des des peurs, ils doivent venir nous en parler et nous y remédierons", a promis le ministre mollâh Per(s)cé chargé des (Affaires religieuses) ! C’est qu’il raconte !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 16, le 29 novembre 2015

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