La France et la Russie ont décidé hier de « coordonner » leurs frappes aériennes en Syrie contre les jihadistes de l'État islamique (EI), mais n'ont pas pu trouver d'accord sur la « coalition large » voulue par François Hollande.
Après plus de 90 minutes d'entretien au Kremlin, Vladimir Poutine et le président français, qui poursuivait à Moscou son marathon diplomatique pour unir les forces contre l'EI, sont apparus devant la presse pour annoncer des mesures visant à « intensifier » la lutte contre le « terrorisme ». Principale annonce : les militaires français et russes, déjà engagés dans des raids aériens en Syrie, vont « coordonner » leurs frappes contre l'EI. Ces frappes ne viseront pas ceux « qui luttent contre Daech » (acronyme arabe de l'EI), a souligné M. Hollande, faisant référence aux rebelles modérés qui combattent l'EI et Damas.
Le chef de l'État russe a fait un pas vers les Occidentaux en annonçant qu'il était d'accord pour « s'abstenir » de bombarder « l'opposition saine », un terme vague utilisé par la Russie pour désigner les opposants modérés et non islamistes qui combattent « la terreur ». Paris et Moscou vont « échanger des informations concernant les zones où se trouvent l'opposition saine, et non pas terroriste, et s'abstenir de les viser », a également indiqué Vladimir Poutine. Les frappes russes et françaises cibleront en priorité le transport de produits pétroliers, dont la vente est la principale source de financement de l'EI, a-t-il ajouté.
Soutien traditionnel du régime de Bachar el-Assad, la Russie est accusée par les Occidentaux et par les pays arabes de privilégier les raids aériens sur les groupes de combattants islamistes et nationalistes qui luttent autant contre l'EI que contre l'armée loyale à Bachar el-Assad.
(Lire aussi : Qui peut vaincre l'État islamique sur le terrain ?)
Divergences habituelles...
Mais les divergences habituelles n'ont pas tardé à refaire surface. À un François Hollande qui martelait que « Bachar el-Assad n'a pas sa place dans l'avenir de la Syrie », Vladimir Poutine a répondu qu'il revenait aux Syriens de choisir. Le président russe rappelait aussi qu'à ses yeux, l'armée syrienne est son « allié naturel dans la lutte contre le terrorisme ».
Cette rencontre avec le président russe est une étape cruciale du marathon diplomatique de M. Hollande, qui a reçu dans la matinée à Paris l'Italien Matteo Renzi, après l'Allemande Angela Merkel mercredi. Mardi, il avait rencontré Barack Obama à la Maison-Blanche au lendemain d'entretiens avec le Britannique David Cameron. Ce dernier a de nouveau appelé hier son Parlement à « étendre » les frappes britanniques contre l'EI.
De son côté, Berlin a proposé hier à Paris une frégate, des avions de reconnaissance et de ravitaillement pour sa lutte contre l'EI. L'objectif est d'atteindre « en son cœur » l'EI, avait souligné M. Hollande mercredi soir après avoir rallié les États-Unis à une intensification des frappes et obtenu que les 27 partenaires de la France au sein de l'UE aident à la lutte au Moyen-Orient de manière directe ou indirecte. Mais M. Hollande a récolté peu d'engagements auprès de M. Obama, même si des sources concordantes ont annoncé l'arrivée à Kobané de soldats américains venus assister les combattants kurdes contre l'EI.
Lire aussi
Quand l'Arabie et le Qatar deviennent des alliés encombrants pour la France...
La mission (quasi) impossible de François Hollande
Fillon : Contre l'EI, il faut soutenir le Hezbollah, les Kurdes et les armées syrienne et irakienne
Il faut renouer avec les services syriens, estiment d'anciens responsables français
commentaires (8)
C'est "genre" Hollande, ou plutôt "style" Munich 38 ?
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
08 h 19, le 28 novembre 2015