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Nos Lecteurs ont la Parole - Margot LACOEUILHE

Insaisissable Liban

Fort heureusement, l'éternel cousin de mon père m'accueille chaleureusement à l'aéroport. Le tableau d'un désordre ambiant se dessine. Une fourmilière dans laquelle les taxis ou ceux qui prétendent l'être s'empressent de nous embarquer dans un concert de klaxons. La chaleur mêlée à l'humidité nocturne est frappante. Une joie profonde se manifeste, celle de revenir ici, terre de ma grand-mère. Enfance de mon père.
La circulation offre au nouvel arrivant le spectacle d'une forme d'anarchie. Il revient au conducteur le plus entreprenant de se frayer un chemin. Quid des panneaux de limitation de vitesse ? Il suffit à l'Occidental mal habitué d'observer le rapport à la contrainte, ici, sur la route. Pas de feux réellement efficaces. Venir ici est un voyage pour apprendre ou réapprendre à se fier à ses sens. Pas si mal !
De grands buildings apparaissent. Ils sont plus nombreux que dans mes souvenirs. Ils se sont multipliés à grande vitesse. Seulement trois années se sont écoulées depuis mon dernier voyage, et le tissu urbain s'est transformé ! Beyrouth est-elle devenue la petite sœur de Dubaï ? Heureusement, Hamra réconforte. Quartier ponctué de théâtres, de cafés, de librairies, le tout procurant une sensation à l'échelle humaine.

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La crise des déchets marque le paysage urbain et force naturellement le questionnement du rapport du Liban et de ses citoyens à l'environnement. Aucun quartier, riche ou modeste, ne permet à ses habitants d'être épargnés par l'odeur de leurs propres déchets. Première marque réelle d'un blocage politique.
On retrouve les déchets à Saïda, sur cette montagne de déchets de plus de 35 mètres de hauteur à l'entrée de la ville qui a vu sa notoriété augmenter ces dernières années. La plupart d'entre eux finissent dans la mer. À Batroun, Byblos, Jbeil, Saïda ou Sour, on n'échappe pas au plastique qui pollue le paysage ou à la vue du paquet de cigarettes qui flotte à quelques mètres.
Le conducteur qui jette nonchalamment sa boîte de jus, puis sa paille, par la fenêtre pour la fermer ensuite, et ce pour préserver l'air conditionné, ou encore le conducteur d'un deux-roues désossé qui jette son café sur la bande d'arrêt d'urgence ne sont pas des exceptions, des cas isolés d'incivilité, mais bien le comportement partagé par le plus grand nombre.

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N'y a-t-il pas d'espace public ?
Espace public qui rimerait avec une conscience de vie à plusieurs, d'un lien entre chacun dans un intérêt commun ? Si les privilégiés se comportent de la même manière, comment faire bouger les choses ?
La manifestation du dimanche 23 août 2015, devant le Parlement et ralliant des jeunes, des moins jeunes, des enfants, des journalistes, des audacieux (qui grimpent en haut de la grue pour hisser les couleurs libanaises face à un Parlement trop loin du peuple), crée l'effet d'un pincement d'une réalité d'espoir et d'unité.
Le Liban est d'une complexité majestueuse. La majesté de sa complexité se retrouve à la fois dans l'héritage lourd d'histoire, de culture, de patrimoine, de poésie. Trop d'histoires se heurtent dans un petit pays à qui on demande trop. Le compromis est lointain et la force l'emporte.
Que dire des Palestiniens qui vivent toujours sans savoir quels sont les responsables du génocide qu'ils ont subi ? Que dire des Syriens qui ont besoin d'être protégés fuyant la barbarie ? Que dire des Irakiens qui ont fui Mossoul et dont on parle peu ?
Et que dire des intellectuels qui mûrissent et ont des tas de projets pour ce pays qu'ils affectionnent et, plus encore, qu'ils portent en eux dans un espoir de construction et d'émancipation ? Mais qui sont toujours rattrapés par la force du politique et de ses intérêts multiples ?
Pourquoi le Liban ne peut pas faire un point sur son histoire pour en tirer des leçons et de nouvelles lignes de conduite ?
Insaisissable Liban !

Margot LACOEUILHE
Doctorante française en stage au Liban

Fort heureusement, l'éternel cousin de mon père m'accueille chaleureusement à l'aéroport. Le tableau d'un désordre ambiant se dessine. Une fourmilière dans laquelle les taxis ou ceux qui prétendent l'être s'empressent de nous embarquer dans un concert de klaxons. La chaleur mêlée à l'humidité nocturne est frappante. Une joie profonde se manifeste, celle de revenir ici, terre de ma...

commentaires (2)

PAYS DES MERVEILLES... Où L'ANARCHIE ET LE CHAOS SE CÔTOIENT POUR FAIRE NAÎTRE UNE ÉTRANGE LOGIQUE... CELLE DE L'ILLOGISME !

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 34, le 27 novembre 2015

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Commentaires (2)

  • PAYS DES MERVEILLES... Où L'ANARCHIE ET LE CHAOS SE CÔTOIENT POUR FAIRE NAÎTRE UNE ÉTRANGE LOGIQUE... CELLE DE L'ILLOGISME !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 34, le 27 novembre 2015

  • "Pourquoi le Liban ne peut pas faire un point sur son histoire pour en tirer des leçons et de nouvelles lignes de conduite ? Insaisissable Liban !". Pourquoi ? Parce qu'il lui manque des Libanais !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    06 h 43, le 27 novembre 2015

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