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À La Une - Éclairage

Les jihadistes nourrissent une haine spécifique envers la France

"La France est le pays où il y a le plus de frustrations par rapport au débat sur l'islam".

Photos d'archives de gendarmes français devant une mosquée à Poitiers. Photo AFP

Participation de Paris à la coalition contre l'Etat islamique (EI), interdiction du voile dans les écoles, discriminations contre la minorité musulmane... Les jihadistes avancent plusieurs griefs pour s'en prendre à la France, cible privilégiée de leurs attaques même si elle est loin d'être unique.

"Si vous pouvez tuer un incroyant américain ou européen, en particulier les méchants et sales Français, (...) alors comptez sur Allah et tuez-le de n'importe quelle manière", avait lancé en septembre 2014 un porte-parole de l'EI, Abou Mohammed al-Adnani, après le début des frappes de la coalition contre son organisation en Irak.

Inspirés ou non par cette consigne, les jihadistes s'en sont pris avec une violence inédite à la France depuis un an. En janvier, 17 personnes ont été tuées à Paris lors d'assauts contre le journal satirique Charlie Hebdo, une policière et un hypermarché cacher. En juin, un homme brandissant des drapeaux islamistes a décapité son patron dans les Alpes. Et, vendredi soir, une série d'attaques, dont pour la première fois certaines étaient kamikazes, a fait au moins 128 morts et 300 blessés dans la capitale.

(Voir aussi : Attentats à Paris : les photos et vidéos d'une nuit cauchemardesque)

La France est "une cible à cause de ses activités antiterroristes dans le nord et le centre de l'Afrique, mais aussi en raison des mauvais traitements présumés et des discriminations contre la minorité musulmane dans le pays", avance Matthew Henman du centre londonien IHS Jane's, spécialisé dans les questions de défense.
L'armée française a combattu les islamistes au Mali et soutient l'action africaine contre la secte nigériane Boko Haram, et elle a mené 283 frappes contre l'EI en Irak depuis le début de son opération dans ce pays en septembre 2014.

Depuis octobre 2015, la France agit aussi en Syrie, où ses avions de combat ont mené cinq frappes, contre des camps d'entraînement de l'EI ou des sites pétroliers. Son porte-avions Charles-de-Gaulle doit être déployé en décembre dans la zone pour intensifier cette campagne.
Un témoin de l'attaque vendredi contre la salle de spectacle Bataclan où plus de 80 personnes ont été tuées, Pierre Janaszak, rapporte avoir "clairement entendu (les assaillants) dire aux otages +c'est la faute du (président François) Hollande, il n'a pas à intervenir en Syrie+".
Mais pour Shashank Joshi, chercheur au Royal United Services Institute (Rusi), basé à Londres, "les prétextes et les causes de telles attaques sont extrêmement complexes et il y a rarement un seul facteur en jeu". "Je ne crois pas que la France serait protégée si elle arrêtait ses raids, parce que les terroristes l'accuseraient d'autres provocations", ajoute-t-il, en estimant que les dernières attaques, compte tenu de leur niveau de sophistication, avaient probablement été planifiées avant le début des frappes en Syrie.


"Frustrations"

Outre son action sur la scène internationale, la France est souvent prise à parti par les islamistes radicaux pour sa conception de la laïcité, qui a conduit à l'interdiction du foulard musulman dans les écoles françaises en 2004 puis du voile intégral dans la rue en 2010. Sa vision de la liberté d'expression, qui permet une large critique des religions, l'a également placée dans le viseur des extrémistes. Les attaques contre Charlie Hebdo qui avait publié des caricatures du prophète Mahommet ont été menées sous ce prétexte.

(Reportage : « Ils ont tiré en plein dans la foule en criant "Allah Akbar" »)

Quant aux 5 millions de musulmans qui vivent en France, la plus importante communauté musulmane d'Europe, ils souffrent de nombreuses discriminations, notamment à l'embauche selon une enquête récente de l'Institut Montaigne, un centre de réflexion.

Pour le sociologue Raphaël Liogier, professeur à l'université Sciences Po Aix, "la France est le pays où il y a le plus de frustrations par rapport à ce débat sur l'islam". Pour lui, au-delà des critiques dans le monde musulman, "ça rend désirable plus qu'ailleurs chez les jeunes d'entrer dans le processus d'embrigadement".

La France fournit ainsi d'importants contingents de jihadistes à l'EI. 571 Français ou résidents se trouvent en Irak et en Syrie, 245 en sont revenus et 141 y sont morts, selon les dernières estimations officielles.
Ces combattants sont parmi les premiers à appeler à frapper contre leur pays d'origine. Dans les vidéos de propagande de l'EI, ils appellent à cibler la France. Mais les jihadistes anglais prônent des attaques contre le Royaume-Uni, les Allemands contre l'Allemagne ou les Américains contre les Etats-Unis.

La France n'est pas la seule à avoir payé un lourd tribut cette année: plus de 200 Russes sont morts le 30 octobre dans le crash d'un avion dans le Sinaï égyptien, revendiqué par l'EI. Et le Yémen, la Tunisie, la Turquie ou le Liban figurent aussi sur cette liste tragique.


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