Rechercher
Rechercher

Culture - En librairie

Les sultanes, ces amazones qui prennent les rênes du pouvoir

Du rêve, de l'histoire, des femmes, de la séduction, du pouvoir, des intrigues de cour, des paysages inconnus...

Sensualité, intelligence et gouvernance, ingrédients sulfureux et détonants pour stimuler l'imaginaire et cravacher les pages assoupies de l'histoire. Un moment d'évasion conjuguant culture et distraction, c'est ce que propose le roman Le Sultanat des Femmes (Erick Bonnier-500 pages) d'Alain de Savigny. Dépaysement et relaxation garantis pour cette fin d'été qui s'éternise avec sa chaleur moite et sa poisse.
Le feuilleton turc Muhteshem yûzyli, plus connu dans sa version doublée en arabe et intitulée Harim el-sultan, qui a déferlé récemment sur les écrans de plus de vingt-deux pays du Moyen-Orient, a été le sésame pour un certain engouement populaire en ce qui concerne les vénéneuses atmosphères de sérail. Engouement pour les turqueries de haut vol entre palais fastueux, intrigues de harem et personnages machiavéliques de premier rang, royalement attifés. Mais aussi royalement démoniaques ou angéliques ! Avec des dialogues fins et acérés comme des lames d'épée, tranchants, fielleux et acides! Ou truffés de déclarations d'amour incendiaires pour des passions dévorantes.

Apprendre et se distraire
Sans suivre totalement cet ordre de tendance, Alain de Savigny signe un roman riche, captivant, palpitant, où cette faune bigarrée, un peu sans foi ni loi, qui a fasciné la foule de spectateurs du petit écran par ses vertigineuses machinations, revit une fois de plus à travers les pages d'un roman. Un roman style Lagardère à l'orientale, certes porté à la fiction mais sérieusement documenté et débordant de détails minutieux. Un cinquième roman, bien touffu comme tous les précédents (mais ne craignez rien, en bon récit de gare, cela s'avale comme un « cookie » !). Alain de Savigny, homme d'affaires avisé et infatigable voyageur, est un auteur déjà nanti de plusieurs récompenses littéraires, dont en 2009 le Prix Méditerranée pour La Sublime Porte. Parfaitement dans le sillage de la littérature, style apprendre et se distraire, qu'il s'est tracé.
Sans quitter les lieux de sa narration favorite des rives du Bosphore et des frontières ottomanes, le voilà, par-delà moucharabiehs, voiles, dagues, cachots, babouches piqués de sequins d'argent et bijoux étincelants, sur les traces de ces sultanes (mères, sœurs, concubines, épouses, favorites) qui prennent en toute impunité, et souvent en dépit d'une certaine rouerie, mais en toute fermeté et sagesse, les rênes du pouvoir. Et sont brossées avec originalité, truculence et saveur des portraits hauts en couleur. Et l'on cite (cela va de la période du XVIe au début du XVIIe siècle) aussi bien les princesses que les princes. Défilent sur le podium de la narration, au gré des paragraphes et des pages, les sultanes Nurbanu, Safiye, Handan, Kôsem, Turhane Hatice, Stanca din Izverani, Saliha, Esther Handali... Des femmes émancipées avant l'heure, avant-gardistes dans leur manière de séduire, d'usurper et d'exercer le pouvoir, et telles d'habiles amazones, jonglant avec les interdits et bousculant les conventions sociales.
Du côté des hommes, non sans violence, prestance, vacheries, brutaux désirs de sexe et de domination, tueries et autant d'acharnement, si ce n'est davantage que les femmes, pour garder sceptre et couronne. Le chapelet est partagé entre Orhan effendi, Nikos, le général Youssef pacha, Koçi bey, sultan Yehya, Mihal Viteazul dit Michel Le Brave et Leonardo Donato.

Entre rebellions et comédies humaines
Autour de ces « stars » du pouvoir, aux couleurs bigarrées (des chrétiens, des Vénitiens, des Moldaves, des Roumains, des citoyens de la Valachie et de la Transylvanie), grouille un monde d'opportunistes, avides de carrière, de richesse et d'ascension sociale.
Des ombres furtives des eunuques noirs à la chute de rein d'une provocante favorite d'origine vénitienne, en passant par les basses œuvres d'un muet ou les affaires en or d'un négociant ragusain, ce livre fourmillant de vie, truffé de coups de théâtre, emporte le lecteur comme dans un somptueux et étourdissant film de cape et d'épée, à cheval entre Orient et Occident.
De l'Anatolie aux Balkans, de Constantinople à la mer Adriatique, entre rebellions et démembrement d'un empire fort de sa gloire et de sa puissance, se jouent les destinées, somme toute bien fragiles, avec l'écart du temps qui restitue sa vraie place à tout un chacun dans l'immense comédie humaine.
Écrit avec finesse, dans une langue française précise et sans sophistication, gardant le sens du suspense et l'intérêt de ce qui pique la curiosité, Le Sultanat des Femmes d'Alain de Savigny ouvre l'horizon non seulement sur ces femmes qui tirent les ficelles de la politique, mais aussi et surtout, volet un peu ignoré dans les turbulences de cette région et de sa sanguinaire fresque historique, la relation de la Sublime Porte avec l'Europe balkanique. Un excellent et enrichissant dépaysement !

« Le Sultanat des femmes » d'Alain de Savigny (Erick Bonnier-500 pages) est disponible à la librairie al-Bourj.

Sensualité, intelligence et gouvernance, ingrédients sulfureux et détonants pour stimuler l'imaginaire et cravacher les pages assoupies de l'histoire. Un moment d'évasion conjuguant culture et distraction, c'est ce que propose le roman Le Sultanat des Femmes (Erick Bonnier-500 pages) d'Alain de Savigny. Dépaysement et relaxation garantis pour cette fin d'été qui s'éternise avec sa chaleur...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut