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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Les Arabes et le 11-Septembre : entre condamnation et fierté

Des manifestants salafistes propalestiniens brûlent des drapeaux américains au Maroc. Fadel Senna/AFP

Le 11-Septembre fait-il véritablement partie de l'histoire contemporaine du monde arabe ? La question peut paraître absurde tant l'évènement a eu des répercussions directes non seulement sur le Moyen-Orient, mais aussi sur l'image des Arabes dans le reste du monde. D'autant plus absurde que les 19 pirates de l'air qui ont détourné les trois avions américains étaient tous arabes – majoritairement saoudiens et égyptiens – et qu'ils appartenaient à une organisation terroriste prônant un salafisme jihadiste et ayant elle aussi un nom arabe : el-Qaëda.

Le rapport entre le monde arabe et le 11-Septembre est pourtant beaucoup plus distancié qu'il n'y paraît. À l'exception d'une poignée de Palestiniens qui manifestent leur joie en tirant en l'air des salves d'armes automatiques au Liban et en Cisjordanie, les populations du monde arabe, à l'instar de celles du reste de la planète, réagissent, en premier lieu, avec effroi et stupeur à cet évènement. La grande majorité des gouvernants arabes, y compris le chef de l'Autorité palestinienne, Yasser Arafat, condamne fermement les attentats et dénonce même un « crime contre l'humanité ».
Même si l'attentat est perpétré contre une puissance qui jouit d'une très mauvaise réputation dans la région, essentiellement due à son soutien inconditionnel à l'égard d'Israël, le monde arabe ne se l'approprie pas vraiment. Le principal refuge de l'islamisme jihadiste ne se situe pas encore dans le cœur du monde arabe à l'époque, mais bien dans la périphérie du Moyen-Orient : l'Afghanistan. Si le chef de l'organisation terroriste, le Saoudien Oussama Ben Laden, s'attendait à devenir une figure populaire de la résistance anti-impérialiste, son pari est, au moins partiellement, perdu.
Comme l'explique Lahouari Addi, professeur de sociologie à l'IEP de Lyon, dans un article intitulé « La perception des attentats du 11-Septembre dans le monde arabe et musulman », le monde arabe réagit de deux façons contradictoires à cet évènement : « D'un côté, il y a la condamnation d'un acte ayant causé la mort de milliers de personnes innocentes ; de l'autre, il y a la fierté que des musulmans soient capables de se défendre. Aussi bien dans la presse que dans les conversations privées, deux positions différentes, voire contradictoires, sont mises en avant. L'une consiste à dire que les attentats du 11-Septembre, de par leur cruauté et leur inhumanité, ne peuvent être que l'œuvre des services secrets israéliens qui les ont organisés pour discréditer la cause palestinienne. La seconde position, revendiquant les attentats, présente Ben Laden comme le défenseur de l'islam bafoué. Il y apparaît comme le justicier et le rebelle capable d'organiser des opérations de représailles avec une précision militaire. »

« Mais pourquoi nous haïssent-ils tant ? »
Bien que reposant sur des arguments contraires, les deux attitudes résultent en fait d'une même logique : celle de populations arabes qui se sentent à la fois humiliées par la supériorité de leur ennemi, en l'occurrence l'État hébreu, et complètement dépossédées de leur histoire par le jeu des puissances régionales et internationales. Le soutien américain à l'État d'Israël est, en grande partie, à la source de ces deux postures. Il renvoie aux peuples arabes un sentiment de faiblesse qui les amène à penser que leurs coreligionnaires seraient incapables de réaliser un tel « exploit », et un sentiment de vengeance contre cette puissance accusée d'être responsable de tous leurs maux.
« Mais pourquoi nous haïssent-ils tant ? » se demandait le président américain G.W. Bush après les attentas du 11-Septembre. Parce que la politique des Américains dans la région est beaucoup trop partiale pour que les populations arabes ne ressentent pas de rancœur contre Washington, aurait-on été tenté de lui répondre à l'époque. Parce que la politique catastrophique qui a été la sienne au lendemain du 11-Septembre a eu des conséquences si néfastes que les populations locales continuent d'en payer le prix plus de dix ans après et que jamais l'antiaméricanisme n'a été aussi virulent au sein du monde arabe qu'à l'issue de son second mandat, lui répondrait-on aujourd'hui. Autrement dit, la perception de l'un dépend avant tout de la cohérence et de l'équité politique de l'autre.

 

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commentaires (1)

Les USA et l'occident doivent ,doivent cesser d'être le dérivatif de l'obscurantisme arabe....qu'ils " s'obscurantissent " entre eux.

M.V.

18 h 16, le 11 septembre 2015

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Commentaires (1)

  • Les USA et l'occident doivent ,doivent cesser d'être le dérivatif de l'obscurantisme arabe....qu'ils " s'obscurantissent " entre eux.

    M.V.

    18 h 16, le 11 septembre 2015

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