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Diaspora - Rencontre

Le regard-constat d’un émigré sur la crise des déchets au Liban

Najib Saadeh* est consultant dans le domaine de l'environnement aux États-Unis. Dans cet entretien accordé à « L'Orient-Le Jour » durant un séjour au Liban, il expose sa vision d'une solution à la crise.

Najib Saadeh prône avant tout l’adoption de stratégies environnementales adaptées à la réalité libanaise.

«Dans le domaine de l'environnement, il est crucial d'adopter une stratégie à long terme, pour des résultats plus palpables, notamment pour améliorer la qualité de l'air et de l'eau, tout en protégeant celle des sols et de l'eau souterraine. » C'est par ces mots que Najib Saadeh expose sa vision globale de ce que devrait être la politique environnementale à long terme au Liban, avec un accent mis sur le mot
« stratégie».
Cet expert d'origine libanaise est consultant en environnement et en santé et sécurité publiques aux États-Unis, travaillant depuis 25 ans dans les domaines de l'environnement et de la sécurité publique. Il a émigré à l'âge de 19 ans pour poursuivre ses études et travaillé aux États-Unis et dans plusieurs autres pays d'Europe, du Moyen-Orient et d'Afrique, avant de revenir s'installer en Californie. « Mais j'ai gardé le Liban dans mon cœur, comme si ma présence à l'étranger restait provisoire », confie-t-il.
Najib Saadeh n'a d'ailleurs jamais vraiment abandonné son pays natal. En 2008 et 2009, il a effectué deux missions au Liban à l'invitation du ministère du Tourisme et du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), qui avaient pour objectif d'instaurer une plus grande sécurité dans les stations balnéaires et les stations de ski : définition de nouvelles normes, moyens d'application de ces normes, rôle des ONG dans la sensibilisation...
Touché, comme les résidents, par la crise des déchets, qui est l'une des facettes de la dégradation environnementale, l'expert a défini quatre grandes priorités à observer pour un meilleur environnement : intégrer le changement climatique dans les politiques, préserver la biodiversité biologique, protéger la santé publique et utiliser durablement les ressources. « Il faut en priorité traiter la pollution de l'air et la pollution du milieu marin, tout en assurant le traitement et le recyclage des déchets, une question qui acquiert toute son importance dans la crise actuelle », dit-il.

De nouvelles technologies prometteuses
Par rapport à la crise des déchets au Liban qu'il suit depuis les États-Unis, Najib Saadeh a constaté autant l'absence de stratégies à long terme que l'absence de plans d'urgence. «Les solutions sont multiples: enfouissement en décharge, compostage (puisque plus de 50% des déchets au Liban sont organiques...), souligne-t-il. Sans compter qu'il existe aussi de nouvelles technologies "vertes" comme la technologie appelée "ReGreen", qui consiste à transformer les déchets organiques en des espèces de capsules ayant une valeur énergétique. Ces capsules peuvent être utilisées comme combustible ou comme engrais. Cette technologie nécessite une petite superficie, possède une empreinte énergétique moins importante que d'autres technologies, et émet un faible taux d'émissions de CO2. Elle emploie de hautes températures et une grande pression. Par comparaison, le RDF ("Refuse Derived Fuel" : combustible dérivé des déchets) est une expression qui s'applique aux matières contenant une haute valeur calorifique (c'est-à-dire des matières capables de relâcher un pourcentage élevé de calories quand elles sont brûlées), qui sont retirées des flux de déchets et utilisées comme combustible. La préoccupation principale dans ce domaine d'activité est de garantir que le RDF possède une très faible teneur en chlore. »

Les « bonnes pratiques » essentielles
Toutefois, la résolution du dossier des déchets ménagers ne passe pas seulement par les technologies. L'expert insiste sur l'importance de la sensibilisation, notamment pour l'isolement des déchets dangereux et surtout pour le tri à la source, quelle que soit la technologie employée. «La séparation des déchets par catégories est une notion de base à toute stratégie, dit-il. Et, surtout, il faut acquérir de bonnes pratiques comme celle d'isoler les déchets dangereux et les déchets électroniques. Aux États-Unis, par exemple, ceux-ci sont emmenés dans des centres spéciaux pour y être recyclés ou réutilisés. »
Sa vision pour le traitement des déchets ménagers? « Intégrer dans une politique globale des mesures pour la protection et la bonne
utilisation des ressources, la production et le traitement des déchets, de manière à couvrir toute la chaîne de production, souligne Najib Saadeh. À titre d'exemple, pourquoi persister à produire des emballages non recyclables ? Même pour l'importation, il est possible de mettre en place une politique de taxes adéquate.»
Une vision à long terme ne suffit pas à résoudre une crise, étant donné que la catastrophe est arrivée. «Pour régler la situation d'urgence, d'après moi, il est crucial de trouver des sites de stockage, d'essayer d'exporter les déchets si possible, d'adopter des technologies pouvant être appliquées rapidement (aussi bien qu'utilisées à long terme) comme le ReGreen (une simple machine), et de travailler en parallèle à une stratégie à long terme, affirme-t-il. Mais dans tous les cas, il convient de préférer les solutions diversifiées, selon les régions et les besoins.»

*nsaadeh@eecenvironmental.com

«Dans le domaine de l'environnement, il est crucial d'adopter une stratégie à long terme, pour des résultats plus palpables, notamment pour améliorer la qualité de l'air et de l'eau, tout en protégeant celle des sols et de l'eau souterraine. » C'est par ces mots que Najib Saadeh expose sa vision globale de ce que devrait être la politique environnementale à long terme au Liban, avec un...