Et le Chaton d’or est attribué à...

À Beyrouth, un tueur de chats a été appréhendé après avoir sévi sur le campus de l'AUB il y a une dizaine de jours. Outre-Atlantique, 13 000 amis et adorateurs de ce félin se sont retrouvés au New St. Paul Saints Baseball Stadium pour le célébrer.
C'était dans le cadre de l'Internet Cat Video Festival qui s'est déroulé à Saint Paul, dans le Minnesota, à la mi-août. Et, chose peut-être surprenante pour certains, la presse a largement couvert l'événement dédié aux plus belles performances de cet animal de compagnie qui aime bien choisir la sienne ! Il ne s'agissait pas de retrouvailles entre amis venus échanger des avis et des impressions sur la beauté ou l'intelligence de leurs minets, souvent acquis à prix d'or ou recueillis d'un refuge. Ce festival, organisé par le très vénérable Walker Art Center de Minneapolis, l'un des plus importants centres d'art contemporain des États-Unis, au même titre que le Smithsonian et le MoMA, a projeté devant les 11 000 participants et sur grand écran les 70 meilleures minutes de films traitant d'histoires de chats et tirées d'un choix de 15 000 vidéos proposées sur la Toile.

Fous de chats
L'idée de cet événement revient à Katie Hill, responsable des programmes associés au Walker Art Center. Elle-même grande amie des chats, elle avait remarqué que de très nombreux documentaires sur le sujet leur étaient consacrés sur les réseaux sociaux. En 2012, elle invite le public à visionner, d'une manière informelle, une sélection projetée sur un grand mur. Son initiative, qui a d'abord attiré 50 personnes, a fait boule de neige jusqu'à mériter l'appellation de Internet Cat Video Festival. Car ce rendez-vous se veut une expérience culturelle et artistique axée sur la qualité de la production et de la réalisation du film. Le meilleur travail est récompensé chaque année par un Golden Kitty Award, ou Chaton d'or, comme il existe, toutes proportions évidemment gardées, le Lion d'or de Venise ou encore la Palme d'or de Cannes ! Le festival a même été surnommé le Sundance des vidéos de chats d'Internet, en référence au célèbre festival américain de cinéma indépendant... Le vote revient au public qui l'exprime sur un site spécial. Le choix est grand.
Qui a dit que la nuit, tous les chats sont gris ? À Minneapolis, ils dévoilent leurs multiples identités, tempéraments et couleurs. On découvre ainsi « les artistes, les philosophes, les démoniaques, les génies », comme le précise une journaliste du Washington Post. Cette année, le festival a été dédié à Cecil, célèbre lion d'une réserve au Zimbabwe qui a fait la une des médias après avoir été tué par un chasseur américain. Pour cette édition, le Chaton d'or a été remis au film Cat Behavior Finally Explained des deux vidéocastes Alana Grelyak et Michael Gabriele qui ont suivi une paire de pattes de chat de couleur orange à travers ses péripéties quotidiennes.

Les chats existentialistes
Pourquoi un festival célébrant les chats et pas les chiens ? Ils constituent un défi pour ceux qui les filment, car, contrairement aux chiens, il est impossible de les contrôler ou de leur demander de faire ce que l'on veut. Certains inconditionnels ne jurent que par leur « effet antistress », alors que d'autres y puisent des images plus belles. Il en est ainsi de Henri le chat noir, le premier lauréat du festival qui célèbre cette année sa quatrième édition. Une séquence filmée en noir et blanc, devenue culte et que l'on repasse chaque année, réalisée par un artiste écrivain, Will Braden, en hommage aux deux cinéastes français François Truffaut et Jean-Luc Godard. Henri a été surnommé le chat en smoking, en raison de son pelage blanc au niveau du cou, dessinant ainsi un plastron, et le bout de ses pattes blanches qui contrastent avec le reste de son corps, tout noir. Quant à sa chatte baptisée Nin (comme l'écrivaine Anaïs Nin), Braden avoue qu'elle est trop turbulente et pas encore prête pour un gros plan sur Internet.

Le succès des films qui mettent en scène les chats n'est pas récent. Il remonte, dit-on, à Thomas Edison et à son film Boxing Cats, un peu l'ancêtre de la vidéo, où l'on voit deux chats transformés en boxeurs. Une popularité qui va à présent bien plus loin puisque les inconditionnels, les sites Instagram et les événements dédiés au chat sont incalculables. Le festival de Minneapolis a même inspiré une étude intitulée Cat Is Art Spelling Wrong dans laquelle 14 écrivains cherchent à connaître les raisons de cette attirance pour les films sur cette espèce animale. Une professeure d'anglais a pour sa part précisé qu'elle a utilisé ces vidéos pour enseigner... l'existentialisme à ses élèves. Pourquoi cette ferveur ? On donne notre langue au chat.