Laura Athié à Bkassine, le village de ses ancêtres.
« Imaginez que vous êtes dans un bus avec 70 autres personnes qui ont rêvé, comme vous, de visiter le Liban et le village où sont nés leurs grands-parents. » Imaginez aussi que deux de ces passagers veulent se marier et qu'ils ont réussi à le faire (à Tyr) à douze kilomètres à peine de la terre où Jésus a réalisé son premier miracle : celui de l'eau changée en vin durant les noces de Cana.
« Imaginez-vous alors dans une église de pierre couleur sable de mer très sobre, d'où s'élèvent les chants en arabe d'une enfant et où luisent les lumières rougeâtres et vertes que six ensembles d'icônes dorées reflètent sur le mur. Vous, comme le reste des invités, vous avez mis les plus beaux vêtements que vous avez transportés dans votre valise et vous vous sentez privilégiés d'être là.
« Personne ne connaît bien l'autre, mais tous partagent le pain et le sel. L'enfant à la voix d'ange chante un Ave Maria que vous ne comprenez pas, mais vous en sentez les vibrations et votre peau se hérisse comme celle des chats maigres qui courent ces rues quand ils vous voient arriver. Les fiancés argentins entrent dans l'église, main dans la main, arborant un sourire radieux.
« Vous avez une poignée de riz dans la main que vous êtes sur le point de jeter à terre quand vous écoutez ce que dit l'évêque maronite : "Je te mets cette couronne Federico, pour que tu sois dans ta maison un roi, et Paula sera pour toi une reine. Tu seras fort comme les cèdres du Liban pour qu'elle puisse s'abriter auprès de toi. Je pose cette couronne sur ta tête Paula qui symbolise la force de la vigne et le vin, pour que tu étendes ta ferveur à toute ta maison et donne à ton époux et à tes enfants le bonheur."
« Et si vous, la Mexicaine, êtes une de ces invitées qui, il y a peu de temps, devant l'ordinateur de votre bureau, n'imaginiez pas être ici, imaginez-vous, le jour suivant, debout sur le sable au bas d'un arbre, face à une caverne, la caverne où a eu lieu le miracle de Cana. »