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Économie - Liban - Impayés

Le Liban n’a pas fini de régler la note des Jeux de la francophonie

Six ans après les Jeux de la francophonie de Beyrouth, l'État doit encore huit milliards de livres à quelque 400 sociétés libanaises.

Le fait que seule une partie des délégations ait apporté sa contribution au budget figure parmi les explications du retard de paiement des frais des Jeux de 2009.

Quelque 400 sociétés libanaises attendent toujours d'être réglées, avec six ans de retard, pour des services rendus durant les VIes Jeux de la francophonie organisés à Beyrouth du 27 septembre au 6 octobre 2009.
Les arriérés portent sur plus de huit milliards de livres, soit environ quatre millions d'euros, un montant approuvé par décision du Conseil des ministres il y a près de deux ans et demi.
Parmi les principales compagnies lésées, figurent Abniah (636 millions de livres), Market Place (395 millions), Fortune Promoseven (215 millions), Formetal (180 millions) et Avis Rent a Car (178 millions), ainsi que d'autres sociétés telles que Wooden Bakery, ISOL et Raidy Printing Press.

L'affaire remonte à 2006, lorsqu'un comité national a été formé pour soumettre le dossier du Liban à l'Organisation internationale de la francophonie (OIF). Présidé à l'époque par Saleh Farroukh, il établit un budget sur la base du cahier des charges élaboré par l'OIF et du budget des Ves Jeux de la francophonie organisés en 2005 au Niger.
« Le budget prévisionnel s'élevait à 10,6 millions d'euros », précise Michel de Chadarevian, ancien coordinateur du comité national.
Le Liban s'est acquitté – avec retard – de 5,3 millions d'euros, conformément aux textes officiels et à la coutume en vertu desquels le pays hôte assume 50 % des coûts. Mais sur les 5,3 millions restants, l'État n'a reçu que 3 millions d'euros, se retrouvant avec un déficit de 2,3 millions sur la base du budget initial.
L'autre moitié du budget est censée être répartie entre les principaux pays donateurs de l'OIF (France, Canada, Suisse et Belgique), les délégations étrangères et les sponsors. À titre indicatif, une délégation est censée verser 1 600 euros pour les dix premières personnes qui la composent, auxquels s'ajoutent 350 euros par tête supplémentaire.
« Seule une partie des quelque 40 délégations concernées ont apporté leur contribution, tandis qu'aucun sponsor international n'était au rendez-vous », explique Michel de Chadarevian. « Le cahier des charges de l'OIF ne définit pas clairement la contribution de chacune de ces parties, qui est, en outre, en grande partie facultative. » C'est ce qu'a rappelé l'ancien secrétaire général de l'OIF, Abdou Diouf, en réponse à une demande de contribution au déficit encouru par le Liban envoyée par l'ancien président Michel Sleiman, précise l'ancien coordinateur du comité national.

Dépenses « imprévues »
Au déficit du budget initial s'ajoute un autre problème, lié à l'inflation des coûts entre 2006, date de l'élaboration du budget prévisionnel, et septembre 2009, celle de la tenue des Jeux. « Le coût total effectif a dépassé 12 millions d'euros », précise Michel de Chadarevian, contre 10,6 millions initialement prévus.
Cette différence s'explique par la nécessité de réhabiliter et de mettre aux normes certains sites, de réaménager la cité sportive (eau, moquette, vestiaires, installation de la fibre optique pour retransmission télévisée, etc.) et l'accueil d'un nombre de visiteurs plus élevé que prévu.
« Toutes les dépenses en dépassement du budget prévisionnel ont été approuvées par le Premier ministre de l'époque, Fouad Siniora, et les ministres des Sports, Talal Arslane, et de la Culture, Tammam Salam », affirme l'ancien coordinateur.
À ces procédures qui ont retardé le paiement, se sont ajoutées d'autres causes de délai : « Nous avons du vérifier les factures, certaines étant manifestement gonflées. La Cour des comptes a validé notre filtrage en mai 2012, après un examen minutieux de l'ensemble des factures durant sept mois. »

Un décret erroné du Conseil des ministres ?
Neuf mois plus tard, en février 2013, le Conseil des ministres approuve (décision du 13/2/2013) le paiement des quatre millions restants et demande à la commission de consultation et de législation du ministère de la Justice de valider les factures.
Mais un nouvel incident entrave une nouvelle fois le processus. Le décret débloquant effectivement le paiement, moyennant une déduction de 4 % négociée avec les ayants droit, n'est adopté qu'en décembre 2013 (n° 10890 du 2/12/2013). Or il comporte selon M. de Chadarevian une erreur, car il ne fait référence qu'à un seul des avis de la commission de législation et de consultations du ministère de la Justice (n° 632/2013) pour un montant de 1,08 milliard de livres, alors que le total dû est de 8,03 milliards. Un problème confirmé par le directeur général du ministère de la Jeunesse et des Sports, Zeid Khiémé.
L'ancien coordinateur du comité national des Jeux y voit une faute « intentionnelle » destinée selon lui à annuler l'effet du décret et à gagner encore du temps. Contacté sur ce point, l'ancien secrétaire général du Conseil des ministres, Souheil Bougi, s'indigne de telles allégations qu'il dément catégoriquement.
Quoi qu'il en soit, le décret a été rectifié, mais la version corrigée n'a toujours pas été approuvée par le Conseil des ministres. « Si la modification avait été faite en 2013, le montant aurait été puisé dans la "réserve budgétaire" de l'année fiscale correspondant à celle du décret, c'est-à-dire 2013. À défaut, la modification n'ayant eu lieu qu'en 2015, le gouvernement n'ayant pas souhaité la faire en 2014, le Conseil des ministres attend désormais l'avis du ministère des Finances qui ne l'a toujours pas donné », explique le directeur général du ministère de la Jeunesse et des Sports.
Le cas échéant, le déblocage des huit milliards de livres devra aussi franchir l'obstacle institutionnel lié à la paralysie de l'exécutif en l'absence de président de la République.

 

 

 

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