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Culture - Entretien

Juan Diego Florez à l'OLJ : La musique peut changer la société

Le ténor le plus courtisé de l'art lyrique occidental sera ce soir au cœur du palais de Beiteddine. Il répond en exclusivité aux questions de « L'Orient-Le Jour ».

Juan Diego Florez à son arrivée hier à Beyrouth. Photo Michel Sayegh

Dans une ville aux trottoirs encore inondés de montagnes d'immondices, dans une ville fantomatique livrée aux flammes comme la Rome de Néron, dans une ville aux artères bloquées par des barrages de l'armée (bonsoir le tunnel Salim Salam bouché à l'émeri dans les deux sens...), dans une ville aux citoyens asphyxiés, lésés et en colère, débarque en contre-note lumineuse, sans cet aigu si aisé qui est sa marque déposée, Juan Diego Florez, le ténor le plus courtisé de l'art lyrique occidental.
Pour l'accueillir au salon d'honneur de l'AIB, les flashes des photographes et Nora Joumblatt à la tête d'un aréopage du bureau du Festival de Beiteddine où il donne ce soir, dans la grande cour intérieure du palais, un récital inaugural unique. Très attendu. Depuis déjà l'année dernière où l'évènement avait été annoncé et malheureusement reporté à deux reprises.
Précédé par sa réputation d'élégance vocale et de jeune premier romantique du bel canto, Florez répond parfaitement à l'image que le public se fait de ce chanteur péruvien devenu en 1996 l'enfant chéri de Pesaro, la ville de Rossini. Vitalité, allure, sveltesse, talent. Un bouquet aux fragrances sûres qui ne trompent pas. Encore sous l'effet des décalages des fuseaux horaires mais toujours dans le bassin méditerranéen, car il arrive d'Italie, enthousiaste et souriant, le ténor de 42 ans est aimable. Chemise saumon rayée, jeans délavé sans sophistication, chaussures hush-puppies grises et cheveux noirs annelés. Simplicité ultracool.
En un questionnaire acrostiche de huit lettres se référant au beau chant lyrique, l'interview, en un anglais métissé d'accent latino, est mené tambour battant à la cadence d'une cavatine alerte et vive.

Beyrouth vue de loin vous faisait quelle impression ? Quelle perception en aviez-vous ?
J'avais beaucoup d'échos sur Beyrouth. Notamment à Londres, où je fréquentais une communauté libanaise. Votre gastronomie me parle, car il y a les mêmes saveurs péruviennes, tout comme les arômes, les piquants. Et puis les confiseries, comme chez nous, quand c'est doux alors c'est superdoux...

Être au Palais des Eaux, écrin princier libanais, et y chanter, qu'est-ce que cela représente pour vous ?
C'est une expérience grandiose. Dans ce cadre et en plein air, c'est exaltant de donner un concert. C'est fantastique !

La capacité et l'aisance avec lesquelles on qualifie vos étourdissants aigus, est-ce un don de Dieu, du travail ou un défi de coquetterie et de prouesse vocale ?
C'est tout cela à la fois. Mais de toute façon, ces notes sont bien écrites dans les partitions. Ces extranotes sont pour l'ornementation. Mais de toute évidence, au-delà de la flexibilité ou de la célérité, il y a une combinaison entre le don de la nature et le travail.

Comment expliquez-vous votre ascension depuis 1996 à Pesaro ? Hasard, coup de chance, destin ?
Il ya certainement de la chance, mais aussi beaucoup de travail. Car un rôle, il faut l'apprendre, le mémoriser, le redonner. Quand on me l'a proposé, je venais de bénéficier de toute une formation à Philadelphie aux États-Unis. Par conséquent, cela a été la conjugaison de l'opportunité et de l'effort.

À vouloir définir votre chant, comment le formuleriez-vous ?
C'est sans doute l'expression de l'âme, comme pour tout art : peinture, dessin, danse, poésie... C'est la nature de l'être que de vouloir s'exprimer. Sauf qu'ici l'instrument c'est ma propre voix.

Nommer vos ténors mythiques, est-ce facile ? En quoi vous ont-ils fasciné ?
À Lima, à mes débuts, c'est-à-dire vers mes 17 ans, j'étais plongé dans le rock, avec les Rolling Stones, et la pop. À cette époque, il n'y avait pas encore YouTube. J'ai écouté et découvert Alfredo Kraus et Pavarotti sur cassette. Et cela me fascinait.

Tenez-vous tous vos rêves pour réalisés ? Y a-t-il encore des personnages ou des œuvres qui vous tentent ?
Notre monde ne ressemble pas à celui du cinéma. Non, je ne poursuis pas de rêves précis. Apres 20 ans de carrière, l'opéra reste un art complet où se rejoignent musique, danse et jeu. Je pense surtout que la musique peut changer la société et donner une certaine assurance dans la vie. Dans mon pays, j'ai fondé la Symphonie pour le Pérou afin que les enfants apprennent la musique. Pour de meilleurs horizons et des possibilités diverses et différentes.

Orné, recherché ou grand public ? Comment est le programme de demain soir ?
Comment le commentez-vous ? Bravoure vocale ou douceur des mélodies ?
C'est un peu tout cela. Mais c'est surtout du bel canto que le public aime. Il ya des pages franco-italiennes de Rossini, Dvorak, Offenbach, Delibes, Massenet, Gounod, Leoncavallo, Puccini et Donizetti. Que je chanterai seul ou en duo avec Joyce el-Khoury. Je dois avouer, pour terminer, que je suis emballé de rencontrer le public libanais. J'espère qu'il sera nombreux.
En épilogue, lors du dernier et récent concert de Juan Diego Florez à la Scala de Milan, l'ovation a duré plus de quinze minutes. Un record pour l'applaudimètre belcantiste. Qui dit mieux ?

* Juan Diego Florez et Joyce el-Khoury sont accompagnés par l'Orchestre philharmonique Gioachino Rossini, sous la direction de Christopher Franklin.

Dans une ville aux trottoirs encore inondés de montagnes d'immondices, dans une ville fantomatique livrée aux flammes comme la Rome de Néron, dans une ville aux artères bloquées par des barrages de l'armée (bonsoir le tunnel Salim Salam bouché à l'émeri dans les deux sens...), dans une ville aux citoyens asphyxiés, lésés et en colère, débarque en contre-note lumineuse, sans cet aigu...

commentaires (1)

BIZARRE... CE LIBAN ! LE CHAOS REGNE... LES ORDURES DANS LES RUES... D,AUTRES A L,ETOILE... ET LES FESTIVALITES BATTENT LEUR PLEIN !!!

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 55, le 29 juillet 2015

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Commentaires (1)

  • BIZARRE... CE LIBAN ! LE CHAOS REGNE... LES ORDURES DANS LES RUES... D,AUTRES A L,ETOILE... ET LES FESTIVALITES BATTENT LEUR PLEIN !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 55, le 29 juillet 2015

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