C'est un bien triste record de longévité que la crise politique provoquée par Michel Aoun vient de battre, le Liban étant désormais sans président depuis 410 jours et 25 séances parlementaires boycottées par les blocs du CPL et du Hezbollah. Le mandat du président Sleiman s'est achevé le 25 mai 2014, rappelle-t-on. La deuxième plus longue crise a été la période d'interrègne qui a suivi la fin du mandat du président Amine Gemayel, en septembre 1988 (408 jours). Coïncidence : le trublion s'appelait déjà Michel Aoun à l'époque.
À la veille d'un Conseil des ministres crucial pour la bonne marche de l'économie du pays, et duquel dépend le sort final d'une session parlementaire jugée aussi indispensable, pour des raisons en partie économiques, les ministres du Courant patriotique libre et du 8 Mars se réuniront aujourd'hui pour coordonner leur action.
Sans que la solidarité de fond soit ébranlée, les positions affichées hier par les uns et les autres paraissent bien distinctes, notamment sur la contestation de rue que M. Aoun a l'intention de déclencher demain, après le Conseil des ministres, s'il n'obtient pas satisfaction, ce qui est plus que probable, à en juger par la dénonciation de son « chantage » par ses adversaires politiques.
On sait en effet que M. Aoun a mobilisé quelques milliers de partisans déterminés, qui ont reçu la consigne de faire du désordre autour de certaines administrations et sur certains axes routiers, histoire de démontrer aux Libanais que Michel Aoun n'a rien perdu de sa popularité, ce qui est rien moins que certain.
(Lire aussi : Aoun : « Nous irons jusqu'au bout »)
Le Hezbollah et les Marada se sont désolidarisés ouvertement ou à demi-mot de ce mouvement qui risque bien, contrairement à l'effet qui en est escompté par ses organisateurs, de rejaillir négativement sur le CPL par un surcroît d'impopularité, en fonction directe de la gêne et des embarras de toutes sortes qu'il risque de provoquer, notamment aux activités touristiques dans le « pays chrétien ». Jeudi soir, c'est Johnny Hallyday qui est programmé au festival de Jounieh !
Aux FSI, car il n'est pas question de recourir à l'armée, reviendra la pénible tâche de disperser des rues et places les quelques milliers de Libanais qui s'y sont fourvoyés à l'appel d'un obsédé des « guerres de libération » qui, pour les besoins de la cause, a assimilé le courant du Futur, symbole de la modération sunnite dans tout le monde arabe, à Daech.
(Lire aussi : L'escalade, passage obligé vers la solution ?, le décryptage de Scarlett Haddad)
Deux questions majeures
À la veille du Conseil des ministres, deux questions majeures font problème : le sort de la session parlementaire législative que le président de la Chambre et certains blocs souhaitent voir s'ouvrir, et le mécanisme de prise de décision au sein du Conseil des ministres.
En ce qui concerne le premier point, le consensus a minima n'existe toujours pas. Ainsi, tandis que des blocs comme celui du Futur, du président de la Chambre, de M. Salam et de M. Walid Joumblatt souhaitent voir cette session s'ouvrir, les grands blocs chrétiens, le CPL et le bloc Kataëb-Rencontre consultative-indépendants rechignent toujours à accepter que la Chambre soit autre chose qu'un collège électoral destiné à élire le président de la République. Enfin, c'est là surtout la position des Kataëb. Le CPL, d'accord sur ce point avec les Forces libanaises (qui ne sont pas représentées au gouvernement), accepterait l'ouverture d'une session à la seule condition qu'à son ordre du jour figurent d'abord l'examen et l'adoption d'une nouvelle loi électorale et le projet de loi sur la récupération de la nationalité libanaise par les émigrés ayants-droit.
Cette convergence d'attitude a ainsi permis hier à Gebran Bassil de se rendre au siège des Kataëb pour féliciter Samy Gemayel pour son élection à la tête de ce parti. Les deux hommes, dit un court communiqué, « ont échangé leurs points de vue sur une sortie de crise ».
Par la voix de Nabil de Freige, le courant du Futur a défendu hier l'idée d'une session législative indispensable pour empêcher certains dons et prêts accordés au Liban de la Banque mondiale, d'être réorientés vers d'autres pays.
On apprenait hier que le ministre Rony Araiji (Marada) a signé le décret itinérant réclamant l'ouverture d'une session parlementaire extraordinaire. Les Marada se distinguent ainsi de tous les autres blocs chrétiens, en accord avec le vœu de voir encourager toute action parlementaire.
La seconde grande question qui se pose concerne le mécanisme de prise de décision au sein du Conseil des ministres. Sur ce plan, le verrouillage est total. Tandis que le CPL exige que toutes les questions figurant à l'ordre du jour du Conseil des ministres soient prises à l'unanimité, M. Salam, imité en cela par les ministres chrétiens hostiles au CPL, entend ne pas accepter que l'exécutif soit paralysé par « un chantage politique » (dixit Boutros Harb) dont l'apparent prétexte est le respect de la Constitution.
« La Constitution prévoit clairement que le Premier ministre informe le chef de l'État de l'ordre du jour de la réunion et que ce dernier a le droit d'émettre son avis là-dessus, pas par obstructionnisme, mais pour des raisons nationales. De même, il ne rejette pas tout l'ordre du jour. Par ailleurs, s'il préside le Conseil des ministres, ce n'est pas pour le torpiller, et s'il ne vote pas, c'est bien pour préserver l'impartialité de sa fonction », a notamment affirmé M. Harb.
Lire aussi
Araiji : « Nous n'encourageons pas le recours à la rue »
Le bloc du Futur critique le comportement aouniste
Geagea prend le contrepied de Aoun : La situation des chrétiens est « bonne »
Pour le mufti Deriane, les conflits doivent être réglés au sein du gouvernement
Le PNL commémore Safra et se déchaîne contre... Aoun
commentaires (9)
C'EST BIEN CE QUE JE DISAIS... PERSONNE N'EN PEUX PLUS !!! DONC MONSIEUR AOUN, ON SE CALME, ON PREND SA RETRAITE ET PLACE AUX JEUNES... MAIS DE PREFERENCE PAS LES "FILS DE" IL Y A ASSEZ DE GENS EDUQUES ET COMPETENTS AU LIBAN PRETS A TRAVAILLER POUR LE PAYS (ENFIN J'ESPERE) DONC, DONNEZ-LEUR ET DONNEZ- NOUS UNE CHANCE !!!
Atallah Mansour Simone
17 h 21, le 08 juillet 2015