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Culture - Rencontre

Gregori Baquet : « Venir jouer Wajdi Mouawad à Beyrouth, c’est quand même assez particulier »

Il est l'un des « Cavaliers » de Joseph Kessel, énorme succès du dernier Festival Off d'Avignon, une pièce à l'affiche du Monnot ce soir et demain. Puis, à partir de jeudi, il se (re)glissera, toujours sur les mêmes planches beyrouthines, dans la peau du héros d'« Un obus dans le cœur » de Wajdi Mouawad*. Grégori Baquet, comédien double emploi ? Artiste complet plutôt, cet acteur, chanteur, musicien, auteur et réalisateur !

« Je suis un peu caméléon », reconnaît Gregori Baquet, regard et sourire en coin.

Rendez-vous dans les coulisses du théâtre Monnot, où Grégori Baquet se rue quasiment à sa descente d'avion, pour « apprivoiser les lieux », dit-il. Serait-il fébrile à la veille de sa première beyrouthine des Cavaliers ? « C'est plutôt la seconde pièce qui m'angoisse un peu, confesse-t-il. Venir jouer Wajdi Mouawad à Beyrouth, c'est quand même assez particulier. Je me dis que cela aura une résonance différente ici. »
Et pourtant, il interprète, tous les soirs, depuis un moment déjà, sur la scène du théâtre des Déchargeurs à Paris, ce monologue d'inspiration autobiographique du dramaturge libano-canadien. Des représentations qu'il a interrompues, l'espace d'une petite semaine, pour venir se produire à Beyrouth. « C'est une ville, un pays que j'avais très envie de découvrir, dit-il. Lorsqu'on m'a proposé d'y venir, je me suis dit : enfin ! » affirme dans un large sourire cet artiste français aux yeux bleus slaves hérités de sa mère « russe et orthodoxe », et qui se définit lui-même comme étant « un peu caméléon ». L'occasion d'essayer de lui tirer une sorte de portrait à larges traits, à partir de propos recueillis lors d'une conversation à bâtons rompus.

 

La polyvalence artistique en héritage.
À 44 ans, cet enfant de la balle a déjà près de 30 ans de métier derrière lui. « J'ai un père (le violoncelliste Maurice Baquet) touche-à-tout : musicien, comédien, alpiniste, skieur... J'ai un peu suivi ses traces, comme mes frères et ma sœur, d'ailleurs, qui sont tous dans le domaine. Et cette tradition familiale se perpétue puisque même mon fils est, à 17 ans, déjà comédien. Moi, j'ai commencé à 15 ans par le théâtre. Puis j'ai fait beaucoup de séries télévisées, avant de passer à la comédie musicale (Roméo et Juliette, notamment). Et là je me recentre sur le théâtre. Parce qu'il fallait que les gens du métier puissent m'identifier dans un domaine précis. En France, c'est un peu compliqué. On aime bien mettre les artistes dans des cases, les enfermer dans un carcan... » déplore-t-il.

 

La curiosité, sa plus belle qualité.
« Je suis quelqu'un qui se sent bien partout. Quand on me propose un projet, si c'est quelque chose que je n'ai jamais fait, je dis pratiquement oui tout de suite. J'évite, de plus en plus, de revenir sur quelque chose que j'ai déjà expérimenté. J'aime le renouvellement. Je suis très curieux en fait. En particulier de tout ce qui touche à l'humain. »

 

Molière de la révélation théâtrale.
« Depuis 5 ans, j'ai la chance d'enchaîner des projets magnifiques, qui m'ont amené au texte de Wajdi Mouawad. Lequel m'a valu le Molière de la révélation théâtrale en 2014. Une distinction qui récompense d'habitude les jeunes comédiens, mais que je prends de manière très positive. Et qui me donne envie de continuer et de faire plein de choses... »

 

L'amour du métier.
« Le théâtre est pour moi l'art ultime. Cette façon d'être sur scène, face aux gens, et de pouvoir peaufiner tous les soirs son métier, comme un artisan, c'est formidable. Et puis ce que je recherche dans le théâtre, c'est une belle langue. J'ai eu la chance jusque-là de jouer Paul Claudel, Jean Anouilh, Dino Buzzati, Joseph Kessel, Wajdi Mouawad. Le texte de ce dernier est le plus riche, le plus abouti que j'ai eu à jouer jusqu'à maintenant. Il parle de tellement de choses qui résonnent en moi. En tout un chacun en fait. »

 

Des rêves plein la tête... et autant de projets.
« Mon plus grand rêve est d'intégrer la Comédie-Française. J'ai envoyé des lettres mais je n'ai pas de réponse pour l'instant. C'est un réseau... Celui du théâtre subventionné, alors que moi je viens du privé. Mais je m'accroche. Je sais qu'il faut du temps. C'est un des conseils que mon père m'a donnés très tôt : "Dans ce métier, il faut que tu sois patient." Sinon, j'ai envie de faire plein de choses. J'adorerais, par exemple, jouer Hamlet. D'ailleurs, je passe beaucoup de castings en Angleterre, où je commence la version anglaise d'Un obus dans le cœur. Je ne sais pas si j'ai le droit de vous le dire parce que nous sommes en pourparlers. Mais je rêve aussi d'aller tourner aux États-Unis. J'ai écrit deux longs-métrages que j'espère bien un jour aussi réaliser. Et, en ce moment, j'adapte pour la scène On ne voyait que le bonheur, un roman de Grégoire Delacourt qui m'a bouleversé parce que c'est un livre sur le pardon. »

 

Parcours initiatiques comme thèmes de prédilection.
« Dans mes choix, il y a toujours comme fond commun les rapports humains. J'essaye de m'écarter de tout ce qui est purement agressif. Je trouve qu'il y a déjà assez de violence sur terre. Et j'aime bien me diriger vers tout ce qui rapproche les êtres humains. Comme le pardon justement... En y réfléchissant, je réalise que j'aime quand les choses ont du fond. Le pur divertissement m'amuse de moins en moins. Les deux pièces que j'interprète à Beyrouth sont des parcours initiatiques. Les deux mettent en scène des jeunes hommes qui se transforment en adultes, l'un en accompagnant l'agonie de sa mère, l'autre en tuant symboliquement le père... »

 

Sa petite musique.
« Je suis pianiste, j'écris, je compose aussi. Entre une mère russe et un père violoncelliste, Rachmaninov a accompagné mon enfance. Et puis, avec des amis, on a fondé un trio de jazz. On joue de temps en temps en concert à Paris. Mais cela reste très confidentiel. Je ne veux pas qu'on m'écarte encore du théâtre sous prétexte que je suis devenu musicien. »

 

Des liens avec le Liban.
« Il se trouve que mon oncle, le frère de mon père décédé depuis longtemps, était marié à une Libanaise. J'ai peut-être des cousins que je ne connais absolument pas qui vont venir me voir... »

 

* « Les Cavaliers » ce soir encore et demain mercredi 24. Puis « Un obus dans le cœur », les 25, 26 et 27 juin, à 21h, au théâtre Monnot.

 

Pour mémoire
Kessel, Mouawad et deux fois Baquet au Monnot

Les « Sœurs » de Wajdi Mouawad sur scène

Rendez-vous dans les coulisses du théâtre Monnot, où Grégori Baquet se rue quasiment à sa descente d'avion, pour « apprivoiser les lieux », dit-il. Serait-il fébrile à la veille de sa première beyrouthine des Cavaliers ? « C'est plutôt la seconde pièce qui m'angoisse un peu, confesse-t-il. Venir jouer Wajdi Mouawad à Beyrouth, c'est quand même assez particulier. Je me dis que...

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