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Moyen Orient et Monde - Terrorisme

La mort de Wahishi déstabilise el-Qaëda au profit de l’EI

Le numéro 2 d’el-Qaëda, Nasser al-Wahishi, a été tué dans un raid américain. Photo prise en avril 2012. Archives AFP

L'élimination du chef d'el-Qaëda au Yémen, qui était aussi le numéro 2 de l'organisation au niveau mondial, déstabilise le réseau au profit du groupe rival État islamique (EI), sans pour autant réduire la menace jihadiste globale, estiment des experts.
Washington a présenté la mort de Nasser al-Wahishi dans un raid américain comme un « coup sévère » porté « à el-Qaëda dans la péninsule Arabique (Aqpa), la branche la plus dangereuse d'el-Qaëda, et plus largement à el-Qaëda ».
Des analystes abondent en ce sens, en rappelant que Aqpa avait déjà été affecté par la mort de deux autres hauts responsables, l'idéologue Ibrahim al-Rubaish et Nasser al-Ansi, l'homme ayant revendiqué au nom du groupe l'attaque contre le journal français Charlie Hebdo en janvier à Paris, tués dans des attaques de drone américain en avril.
De même, ajoutent ces experts, au-delà du Yémen, la mort de Wahishi est un sérieux revers pour el-Qaëda en général car le chef jihadiste était considéré depuis 2013 comme le bras droit d'Ayman al-Zawahiri, successeur d'Oussama Ben Laden. Il était aussi l'homme par lequel des messages « opérationnels » passaient entre les différentes branches de l'organisation.
Cependant, en Syrie et en Irak, l'affaiblissement des branches locales d'el-Qaëda ces dernières années a profité à l'EI, qui a revendiqué en mars ses premiers attentats sanglants au Yémen et qui cherche à attirer de nouveaux aspirants jihadistes.
« Plus el-Qaëda est affaibli, plus les combattants jihadistes rejoignent l'EI pour le renforcer. À l'inverse, plus l'EI est attaqué, plus il y aura un retour des combattants vers el-Qaëda », explique Mathieu Guidère, professeur d'islamologie à l'université de Toulouse (France).
« Il s'agit de vases communicants » et l'avenir d'el-Qaëda dépend donc « du sort qui sera réservé à l'EI », précise-t-il.
Dans ce contexte, certains experts restent sceptiques devant les affirmations de l'exécutif américain, selon lesquelles la mort de Wahishi « nous rapproche de l'objectif visant à affaiblir et à terme vaincre ces groupes ».

« Aqpa peut rebondir »
Pour l'heure, estime le Soufan Group, qui fournit de l'analyse stratégique sur des questions de sécurité, la mort de Wahishi « va exacerber davantage les problèmes de commandement et de contrôle » au sein d'el-Qaëda, « qui sont devenus de plus en plus évidents au fur et à mesure que l'EI a pris l'ascendant à la fois sur les champs de bataille et dans les médias ».
« El-Qaëda est menacé de devenir un vague rassemblement de groupes locaux », note le Soufan Group, en s'interrogeant sur le défi posé au « ben-ladenisme » plus de quatre ans après l'élimination du fondateur du réseau par un commando américain au Pakistan.
Si la maison mère el-Qaëda est déstabilisée, il n'est pas certain que sa branche yéménite soit en difficulté dans l'immédiat, même si l'élimination récente de plusieurs responsables pose la question de la présence en son sein de « taupes » qui informeraient les États-Unis, affirment des analystes.
« Par comparaison à d'autres branches d'el-Qaëda », Aqpa au Yémen est celle qui est la mieux implantée et, « même si Wahishi est une perte, elle peut rebondir rapidement », estime Olivier Guitta, directeur de GlobalStrat, entreprise de conseil spécialisée dans l'évaluation des risques géopolitiques.
Enraciné dans le sud et le sud-est de ce pays pauvre et instable, Aqpa a profité du chaos créé par des raids aériens saoudiens contre des rebelles chiites pour s'emparer en avril de Moukalla, capitale du Hadramout, la plus grande province du Yémen.
Si Aqpa a été défié pour la première fois cette année par l'EI, il bénéficie encore d'une bonne organisation interne – le successeur de Wahishi, Qassem al-Rimi, a été nommé rapidement – et de puissants relais au sein de tribus sunnites avec lesquelles il est allié.
Selon Mathieu Guidère, el-Qaëda au Yémen est « devenu une force parmi d'autres du camp sunnite, notamment tribales », une force considérée comme « modérée et donc fréquentable par rapport à la barbarie de l'EI » qui a tué 142 fidèles dans des attentats-suicide contre des mosquées chiites en mars à Sanaa.

René SLAMA/AFP

L'élimination du chef d'el-Qaëda au Yémen, qui était aussi le numéro 2 de l'organisation au niveau mondial, déstabilise le réseau au profit du groupe rival État islamique (EI), sans pour autant réduire la menace jihadiste globale, estiment des experts.Washington a présenté la mort de Nasser al-Wahishi dans un raid américain comme un « coup sévère » porté « à el-Qaëda dans...

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