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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Pourquoi al-Nosra s’est excusé après la tuerie de Qalb Lozé

La branche syrienne d'el-Qaëda cherche systématiquement depuis quelque temps à se démarquer de l'EI et à se positionner en interlocuteur privilégié.

Des combattants du Front al-Nosra dans le camp palestinien de Yarmouk à Damas. Rami el-Sayed/AFP

La tuerie de Qalb Lozé, mercredi dernier, était malvenue pour le Front al-Nosra. La branche syrienne d'el-Qaëda, qui tente d'améliorer son image face à un État islamique (EI) coupable et capable de toutes les atrocités, cherche depuis à faire amende honorable.

Ainsi, le groupe a reconnu avoir appris avec « un profond regret » ce qui s'est passé dans ce village de la province d'Idleb, accusant les responsables d'avoir désobéi aux ordres et envoyant une délégation rassurer la population druze, dont vingt ressortissants au moins ont été tués par des combattants du groupe sunnite extrémiste. Plus encore, il a qualifié ces agissements d'« injustifiables » et a affirmé que les responsables seraient traduits devant une cour islamique.

(Lire aussi : Le camp pro-Assad joue au pyromane, Joumblatt au pompier)

Ces développements, inédits dans le contexte actuel syrien et régional, ne sont pourtant pas si surprenants. Depuis plusieurs semaines, de nombreux médias et observateurs font état d'une prise en main du groupe par le Qatar, sur le plan logistique du moins, avec l'appui de l'Arabie saoudite et de la Turquie. Fin mai, le chef d'al-Nosra, Abou Mohammad al-Joulani, a donné une interview exclusive à la chaîne satellitaire (et, choix tout sauf anodin, qatarie...) al-Jazira pour parler de la doctrine de son groupe. Il en avait profité pour envoyer un message, surprenant certes, mais aussi très clair à l'Occident, qu'il n'attaquera pas, a-t-il promis. Très vite, commentateurs et experts ont jugé que le groupe cherche à se poser en interlocuteur crédible, contrairement aux autres composantes de la rébellion syrienne, minée par les désaccords.

Les réactions d'al-Nosra aux incidents de Qalb Lozé semblent s'inscrire dans cette même logique. Rassurer la communauté druze du village, et par extension celle de la région, tout en punissant les responsables est un signe clair que le groupe cherche à tout prix à se démarquer des violences de l'EI. Cheikh Bilal Dakmak, un prédicateur islamiste basé à Tripoli au Liban, confirme cette idée. « Ce que veut en premier lieu le Front al-Nosra, c'est prouver que l'islam n'encourage pas la violence gratuite, surtout envers les minorités religieuses, qu'elles soient druzes, chrétiennes, ou autres », juge le prédicateur, affirmant que « ce n'est pas la première fois que cela arrive, mais c'est bien la première fois que c'est ouvertement relayé par les médias », sans toutefois citer d'exemple précis d'événements similaires.

(Lire aussi : Assad veut-il punir les druzes de Syrie ?)


Mais il n'y a pas que cela. Car le mea culpa du Front al-Nosra semble avoir une origine double : rallier toutes les communautés ayant un certain poids, ne serait-ce que dans la province d'Idleb pour l'instant, et se présenter, comme lors de l'interview de Joulani sur al-Jazira, comme acteur incontournable de la future politique syrienne, c'est-à-dire post-Assad, inévitable selon le chef d'al-Nosra. « C'est tout à fait ça », confirme cheikh Dakmak. « Il n'y a rien de mal, aucune honte à vouloir s'affirmer politiquement, tout en respectant et en appliquant bien entendu les règles de l'islam. »

Reste donc à voir si les responsables du massacre de Qalb Lozé seront réellement châtiés, et pas seulement se faire taper sur les doigts dans un simulacre de procès, uniquement mis en place pour jeter de la poudre aux yeux des indécis face à leur cause.


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